Effondrement du système sanitaire tunisien  : Mekki et Chérif réagissent à cette déclaration de Ben Alaya

Au départ, cette déclaration atterrante faite par la porte-parole du ministère de la Santé, Nissaf Ben Alaya : «le système sanitaire s’est effondré (…) ».

Alors qu’elle s’exprimait, le 8 juillet 2021, sur les ondes de la radio privée Mosaïque FM, la responsable impute la hausse des décès à trois facteurs : le non-respect des protocoles sanitaires et la levée hâtive des mesures à chaque fois que la courbe des contaminations commence à fléchir et la saturation des hôpitaux et la saturation des hôpitaux. 

Abou SARRA

A propos de ce dernier facteur, elle n’a pas précisé s’il s’agit d’un débordement du personnel ou d’une incapacité d’ordre logistique.

Alarmiste et sans nuances, cette déclaration a suscité plusieurs réactions, certaines venant même de son propre ministère, et de deux anciens ministres de la Santé.

Du coup, le ministère de la Santé n’a pas manqué de recadrer sa porte-parole en la désavouant dans un communiqué publié le lendemain de cette déclaration.

Le système sanitaire est toujours résilient

Tout en reconnaissant la gravité de la situation, le département de la Santé affirme que « le système de santé ne s’est pas effondré et restera inébranlable face à toutes les difficultés et urgences grâce aux efforts, aux compétences de tous les professionnels de la santé, ainsi qu’à la solidarité de la société civile et à la coopération conjointe avec les pays amis ».

Et le ministère de la Santé d’ajouter sur un ton optimiste: « L’expérience accumulée par nos équipes de santé, la mise à disposition de capacités de réanimation et d’oxygène, et les hôpitaux de campagne ciblés ont permis au système de santé de faire face aux défis épidémiologiques et de continuer à soigner les patients malgré les insuffisances accumulées depuis des décennies ».

Réagissant à son tour à la déclaration de Nissaf Ben Aleya, l’ancien ministre de la Santé, Abdellatif Mekki, a déclaré sur les ondes de la radio privée Shems Fm que la Tunisie est capable, avec sa logistique médicale en place, de contenir la pandémie sans être obligée d’arriver au stade de déclarer le pays « nation sinistrée ».

La solution pour ralentir la propagation de la pandémie serait l’institution d’un confinement sanitaire général de deux semaines. « L’idéal, a-t-il dit, serait de faire un confinement pendant trois semaines car cette mesure ne peut être pleinement efficace que si elle s’étend sur trois fois la période d’incubation du virus ».

La saturation perceptible au niveau du personnel

Pour sa part, Abderraouf Chérif, ancien ministre de la Santé dans le gouvernement Chahed, a été plus précis.

Dans une interview accordée à L’Economiste maghrébin, il a relevé qu’«au niveau des hôpitaux, c’est-à-dire de l’infrastructure hospitalière, il n’y a pas de dépassement, c’est le personnel qui est dépassé. Les besoins se font sentir de manière dramatique dans le paramédical. Il faut en recruter, en urgence».

D’après lui, la Tunisie, avec une capacité totale de 22 000 lits (22 CHU, 36 hôpitaux régionaux 105 hôpitaux locaux dont une dizaine fonctionne normalement et 2 500 dispensaires dont 500 seulement sont opérationnels), est en mesure de prendre en charge les 500 malades Covid-19 qui ont besoin d’oxygène et de réanimation.

Comme solutions à l’accélération de la propagation de la pandémie, il en propose deux : l’intensification de la vaccination pour atteindre une moyenne de 100 000 vaccinés par jour, et la mobilisation de fonds budgétaires pour financer l’achat des vaccins et les nouveaux recrutements.

Sur ce dernier point, il estime que «pour motiver, un tant soit peu en cette période difficile, les éventuels postulants, les recrutements doivent se faire au moins pour une année au minimum et non pour trois mois, car personne ne peut accepter de telles conditions».

Au sujet du financement, il suggère de reporter certains projets de développement et de transférer vers le secteur de la santé d’autres fonds budgétaires affectés à d’autres départements. Le principe étant pour lui : « la santé des Tunisiens doit être la priorité des priorités ».