Tout a commencé le 21 août 2015 avec l’inauguration en grande pompe, par la marine nationale, de la frégate tunisienne «Al Istiklal» (Indépendance), unité conçue et réalisée entièrement par des compétences tunisiennes dans le cadre d’un partenariat public-privé (PPP). Depuis, l’idée de lancer en Tunisie une industrie militaire a germé avant de devenir une réalité avec la mise au point d’une stratégie pour la promotion de cette nouvelle industrie.

Concrètement, il s’agit de mettre au point des unités de production en partenariat avec les technopoles du pays. L’objectif de cette stratégie est de développer une expertise tunisienne dans le domaine militaire, d’économiser de la devise, d’employer des ressources humaines tunisiennes et de dynamiser les activités y afférentes.

Deux points forts de cette stratégie méritent qu’on s’y attarde.

Le premier concerne la poursuite des projets réalisés en PPP par la marine nationale. Les résultats sont édifiants. Trois ans après la mise en service de la frégate Al Istaklal, deux nouveaux patrouilleurs baptisés ”Kerkouane” et ”Utique“ ont été construits par la Société de constructions industrielles et navales (SCIN) dans le cadre d’un partenariat avec le ministère de la Défense nationale.

Les deux patrouilleurs sont entrés en service à l’occasion de la célébration du 62ème anniversaire de l’armée nationale et du 60ème anniversaire de la marine nationale (juin 2018).

Ouverture du site Tunisie à l’investissement dans l’industrie militaire

Le deuxième point consiste en l’ouverture du site Tunisie de production à l’investissement étranger dans le domaine militaire.

L’actuel ministre de la Défense nationale, Abdelkrim Zbidi, a récemment déclaré que «plusieurs pays désirent faire de la Tunisie une plateforme de l’industrie militaire dont la production sera destinée à l’exportation vers l’Afrique».

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Un premier groupe étranger vient de se manifester. Il s’agit du conglomérat industriel turc Nurol, Orguz Carmikli, spécialisé dans le bâtiment, l’énergie, le tourisme et l’industrie militaire.

Les ministres de la Défense nationale, Abdelkarim Zbidi, et de l’Industrie et des PME, Slim Feriani, se sont entretenus, le 10 juillet 2018 à Tunis, avec le président du conseil d’administration du groupe.

Ce dernier s’apprête à installer dans la région de Bizerte deux unités de production ; la première sera spécialisée dans la confection des gilets pare-balles, et la deuxième dans la fabrication du matériel militaire.

En dépit de cette volonté de développer une industrie militaire en Tunisie, il faut reconnaître que notre pays accuse un grand retard en la matière, en tout cas comparativement avec d’autres pays comme l’Egypte et l’Algérie.

Actuellement l’industrie militaire tunisienne souffre de plusieurs difficultés. Elles ont été recensées et examinées par l’Institut de défense nationale (3 juillet 2018).

Celles-ci se rapportent, pour l’essentiel, à l’incompatibilité du cadre juridique avec les exigences du secteur en ce qui concerne les aspects liés au financement et à l’investissement. Autres difficultés signalées : absence de coordination entre les différentes structures intervenantes, absence d’un mécanisme de partage des risques dans le domaine de la recherche scientifique, ce qui aboutit, en somme, à des résultats inexploitables.

Nous estimons que la décision de développer une industrie militaire est une bonne option tant elle vient consacrer le souci des autorités tunisiennes de diversifier le tissu industriel et de générer de nouvelles opportunités en matière d’économie de devises, de création d’emplois et de maîtrise de la technologie militaire.

L’adhésion de la Tunisie à des zones de libre-échange africaines (CEDEAO et COMESA) peut beaucoup l’aider à écouler sa production sur l’Afrique subsaharienne.