Tunisie-Zones de libre-échange : Exécuter ce qui existe!

Au regard du nombre colossal des promesses officielles non tenues, au fil des années, nos ministres gagneraient à avoir la décence de ne plus promettre aucun projet et de n’annoncer que les réalisations accomplies, et ce pour la simple raison que la difficulté majeure rencontrée actuellement en Tunisie ne réside pas dans la méconnaissance des problèmes et encore moins dans l’identification des solutions mais dans l’exécution des nièmes stratégies mises au point pour faire avancer les choses.

zone-franche-tn.jpgCette recommandation concerne, particulièrement, plusieurs ministres qui, peu convaincus de la continuité de l’Etat, cultivent le fâcheux réflexe de faire table rase de ce qu’avaient accompli leurs prédécesseurs et de refaire éternellement les diagnostics et les stratégies au détriment de la mise en œuvre des solutions existantes.

La problématique des zones franches, c’est du réchauffé

Cette tendance s’est manifestée ces jours-ci, malheureusement, avec un “bon“ ministre, celui du Commerce Ridha Lahouel. Abstraction faite de ses exploits en matière de contrôle des prix, de lutte contre la contrebande et de réduction de l’inflation, ce ministre me semble avoir été en deçà de son niveau habituel, en annonçant, dernièrement, la création de deux zones de libre-échange.

La première zone sera implantée dans la région de Choucha, près des frontières tuniso-libyennes; quant à la deuxième, elle sera du côté des frontières algériennes, probablement à Kasserine.

Il a révélé que «les deux zones de libre-échanges seront créées prochainement et s’inscrivent dans le cadre du programme de mise à niveau des circuits de distribution dans le pays».

Mais à l’analyse, on peut constater que le ministre n’a rien annoncé de nouveau. Ce qu’il a annoncé c’est du «réchauffé». Il n’a fait que ressasser une problématique récurrente au point de devenir lassante, à savoir la création de zones franches aux frontières sud-est et ouest du pays.

Les études ne manquent pas   

Cette problématique a fait l’objet de plusieurs études, dont certaines sont très sérieuses, mais le ministère du Commerce n’a pas jugé utile, jusque cette date, ni d’informer le public de leurs conclusions ni de les synthétiser définitivement dans un document unique comme l’avait fait pour le tourisme l’ex-ministre Amel Karboul pour les études stratégiques sur le développement du tourisme tunisien.

Il faut dire que ces études présentent le désavantage d’avoir été commanditées par plusieurs départements ministériels et de n’avoir pas fait l’objet de la coordination requise.  

Au nombre de ces forums et études de réflexion figurent :

–      l’étude menée par l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA) qui prévoit, selon nos informations, entre autres, la création de quatre zones de libre-échange dans quatre gouvernorats localisées aux frontières avec la Libye et l’Algérie (Le Kef, Kasserine, Médenine et Tozeur);
–      l’étude menée par l’Institut tunisien des études stratégiques (ITES) sur la création d’une “zone maghrébine d’industrialisation et de libre-échange commercial” ;
–      et l’étude élaborée par l’Institut arabe des chefs d’entreprise (IACE) intitulée “La Tunisie et ses pays voisins: risques communs et solutions partagées”.

Pour des ZLE visibles

Par delà ces études, en toute logique économique, le ministère du Commerce a intérêt à axer tous ses efforts sur l’achèvement des premiers travaux de deux zones de libre-échange en cours de réalisation effective: celle de Choucha (gouvernorat de Tatouine) du côté de la frontière tuniso-libyenne, et celle de Hazoua (gouvernorat de Tozeur du côté de la frontière tuniso-algérienne).

En attendant la visibilité de ces zones franches, le ministère du Commerce gagnerait à lancer des appels d’offres pour la création de la logistique de ces zones (hypermarchés, aires de repos, cliniques …). Il me semble que c’est là un message fort que le ministère doit lancer pour les investisseurs intéressés par ces zones de libre-échange.

Faut-il le rappeler, l’enjeu est de taille car il s’agit de lutter, à travers ces zones, contre la contrebande, la contrefaçon et l’économie informelle qui, selon Shanta Devarajan, économiste en chef pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord à la Banque mondiale, coûte à la Tunisie, 1,7 milliard de dollars et représente la moitié des échanges commerciaux entre la Tunisie et la Libye.

Cela pour dire que la mise en place de ces zones de libre-échange est hautement stratégique sur tous les plans.