Financement de l’audiovisuel tunisien : Comment renverser la vapeur?

 

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Le manque de qualité de la programmation audiovisuelle en Tunisie trouverait-il son explication dans la faiblesse des recettes publicitaires? Le débat initié au cours d’un panel d’Open Sigma a permis de mettre les points sur les i.

«Les cahiers des charges ne vont pas permettre l’octroi d’une licence d’exploitation d’un service audiovisuel (radio et télévision) pour quiconque serait le dirigeant d’un parti ou mouvement politique». Le message de Riadh Ferjani, membre de la HAICA (Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle) a l’avantage de la clarté.

Annoncée au cours du panel sur «Financement de l’audiovisuel tunisien et politique», organisé par Sigma Conseils, le 25 janvier 2014, au cours de sa manifestation «Open Sigma», la quinzième du genre, pour présenter les chiffres de l’audience et des investissements publicitaires en 2013, la décision de la HAICA a mobilisé une part des débats consacrés au financement des médias audiovisuels.

Autre décision annoncée par Riadh Ferjani: la HAICA a préféré ne pas accorder de nouvelles licences en attendant de voir plus clair dans le PAT (Paysage Audiovisuel Tunisien). Et ce malgré les différentes «pressions» qui se sont exercées. «Cela aurait marqué un retour à la situation du cas par cas qui prévalait avant», a-t-il notamment assuré.

Ressemblance des médias audiovisuels

La publicité étant, par essence, le nerf de la guerre, il était on ne peut plus normal que sa contribution au financement des programmes soit évoquée. «Les télévisions ne font pas leur marketing. Ils ne savent que demander que l’on les soutienne», a lancé, Karim Ferjani, du groupe Mac Cain Tunisie, une grande agence de publicité mondiale. «Or, a-t-il ajouté, les choses sont claires: nous ne pouvons avancer si nous ne voyons pas des résultats».

«Certes, a affirmé Amel Smaoui, directrice des programmes du nouveau-né de l’audiovisuel tunisien, Telveza Tv». Mais, l’agence de publicité «se doit de faire un chèque» pour miser sur un programme, a-t-elle fait remarquer. Proposant de sortir du «cercle vicieux: l’annonceur a besoin de chiffres (d’audience) et les médias ont besoin d’argent (pour financer les programmes)».

Pour Jacques Geday, directeur régional de l’agence de publicité mondiale WB Media Tunisie, le jeu ne vaut pas pour ainsi dire la chandelle. «Les chaînes aussi bien de radio que de télévision se ressemblent», a-t-il témoigné. «C’est le règne des talk-shows politiques. Et la programmation qui fait de l’audience ne se rencontre qu’au cours du mois de Ramadan et pour quelques Prime time. Il n’y a pas de programmations, mais des programmes; chaque chaîne ayant celui qui fait de l’audience», a-t-il expliqué.

Et si ce manque de qualité serait dû au trop plein. Le PAT comporte-t-il beaucoup trop de chaînes? Le calcul est du reste facile à faire. Il existait, avant le 14 janvier 2011, dix chaînes de radios (huit publiques et deux privées) et quatre chaînes de télévision (deux publiques et deux privées). Le troisième gouvernement de transition, celui de Béji Caïd Essebsi, a autorisé douze radios et cinq télévisions sur recommandation de l’INRIC (Instance nationale de réforme de l’information et de la communication). Mais une vingtaine d’autres médias audiovisuels, entre radios et télévisions, sont nés après sans obtenir de licence d’exploitation.

Et ce pour des IP (Investissements publicitaires) de 82,8 millions de dinars dans l’audiovisuel. Un chiffre théorique dans la mesure où il ne comptabilise pas les remises, rabais et autres ristournes (les fameux trois R). Le chiffre réel ne dépasserait pas au mieux 55 millions de dinars.