Tunisie : Dialogue national

 

ugtt-dialogue-national-1610.jpgPrévue pour le 16 octobre 2012 et initiée par l’UGTT, la Conférence sur le Dialogue politique national ne sera pas facile pour les parties prenantes. Mais lesquelles? La Troïka reste évasive et semble manœuvrer, alors que l’opposition va s’adonner à cœur joie aux critiques de l’action gouvernementale. Mais, les uns et les autres devront tenir compte de l’opinion et des incitations venant de l’étranger.

La Tunisie tout entière est accrochée à la Conférence du dialogue politique prévue le 16 octobre 2012 à l’initiative de l’UGTT (Union générale tunisienne du travail) en vue d’apporter notamment des réponses à de nombreuses questions relatives à la fin de la seconde période de transition entamée avec les élections des membres de la Constituante le 23 octobre 2011. En somme, une feuille de route pour rassurer les Tunisiens sur leur avenir.

On devra en effet voir un peu plus clair au niveau de la date de la rédaction finale du texte de la Constitution, de la date des prochaines élections générales, de la constitution de la future Instante indépendante des élections et de celles relatives à la justice et aux médias.

Un véritable chantier que devra initier l’UGTT qui joue ici un rôle de facilitateur combien important pour l’avenir du pays. Un rôle qu’elle a souvent réussi avec brio. Que se soit pendant la période coloniale, en participant au combat pour l’indépendance aux côtés notamment du Néo-Destour: le leader syndicaliste Farhat Hached a conduit le combat pour l’indépendance notamment lorsque les militants du Néo-Destour étaient éloignés.

Trancher de nombreux dossiers

Ou que se soit à la veille de l’indépendance, en permettant, lors du Congrès de la Vérité (15-18 novembre 1955), à Sfax, de trancher sur de nombreux dossiers brulants concernant l’avenir de la Tunisie. Ou encore en participant et en orientant la politique économique des premières années de la Tunisie indépendante.

Cette fois, l’UGTT devra mettre tout son savoir-faire, tout son génie, toute son expérience, sa crédibilité et son énergie pour sortir avec des décisions qui satisfassent les parties en présence.

Lesquelles parties en présence? La question qui est sur toutes les lèvres est la suivante: les partis de la Troïka, et notamment d’Ennahdha, le fer de lance de cette coalition, semblent évasifs sur leur participation dans le cas de l’invitation de certains partis politiques qui sont soupçonnés d’être un refuge pour les RCDistes, qui ont perverti le pays sous le règne du président déchu, Zine El Abidine Ben Ali.

Sont concernés six à sept mouvements –peut-être un peu plus- dont Nidaa Tounes qui semble devenir une des plus importantes composantes –sinon la plus importante- de l’opposition à la Troïka. La non-invitation de ces mouvements pourrait constituer un problème pour la réussite du Dialogue national prôné par l’UGTT.

Jouer la montre

Non pas parce qu’ils sont représentatifs d’une partie de l’opinion, mais parce que cela ressemblerait bel et bien à l’exclusion de partis qui ont pignon sur rue. Tous ont obtenu leur visa et certains sont même représentés au sein de la Constituante.

L’audience accordée par le président de la République, Mohamed Moncef Marzouki, au leader de Nidaa Tounes, Béji Caïd Essebsi, le 12 octobre 2012, constituerait une lueur d’espoir. Le chef de l’Etat a considéré que le dialogue devrait concerner toutes les parties prenantes du paysage politique.

Un autre problème risque de perturber la bonne marche de ce dialogue: celui de la décision d’Ennahdha de présenter une initiative qui ressemble comme deux gouttes d’eau à celle de l’UGTT. Dans la mesure où elle viendrait répondre point par point aux différentes questions inscrites à l’ordre du jour du Dialogue national initié par l’UGTT. Avec deux jours de retard sur la date fixée par la centrale syndicale: le 18 octobre 2012!

Et c’est là où cette initiative semble inquiéter ceux qui prendront part aux débats. S’agit-il de l’élaboration de recommandations en vue d’enrichir le dialogue politique qui est initié par la plus importante centrale syndicale tunisienne? Ou s’agit-il, par contre, d’une manœuvre pour court-circuiter ce dialogue? S’agit-il simplement de jouer la montre afin de retarder l’engagement de ce dialogue? Ou de baisser le seuil des revendications de l’opposition qui peut, la couverture médiatique aidant, s’en donner à cœur joie à des critiques de l’action gouvernementale? Ou encore et tout simplement d’avancer en rang serré: les composantes de la Troïka -on le voit déjà- ne sont pas toujours d’accord sur la marche à suivre pour ce qui reste à faire pour boucler la seconde période de transition?

Se consacrer à l’essentiel

On se perd en conjecture. On se perd également en ce qui concerne les dispositions et les intentions des uns et des autres à faire réussir ce dialogue combien primordial et difficile. La Troïka et l’opposition sont-elles prêtes à jouer le jouer et à répondre positivement aux attentes des Tunisiens? Qui souhaitent en finir au plus tôt avec les questions en suspens pour pouvoir se consacrer à ce qui constitue, pour beaucoup d’entre eux, l’essentiel: lutter contre le chômage rampant, assurer un équilibre régional et combattre l’inflation… galopante.

Il est certain que la Troïka aussi bien que l’opposition devront prendre compte et même plier sous le poids de l’opinion et de ses différentes composantes, dont notamment les représentants des travailleurs, des employeurs, de la société civile. Mais aussi des incitations de certaines parties étrangères qui souhaitent, au même titre que les intervenants et décideurs nationaux, siffler au plus vite la fin de la récréation.