Les internautes européens mobilisés contre l’accord ACTA

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çon ACTA. (Photo : Michal Cizek)

[08/02/2012 14:39:42] VARSOVIE (AFP) La signature de l’accord multilatéral sur la contrefaçon ACTA par la plupart des pays européens suscite une vague de protestations, en particulier dans les pays ex-communistes où les internautes considèrent ce document comme une grave atteinte à leur liberté.

“Je n’ai jamais vu d’aussi importantes manifestations en Pologne depuis 20 ans, même la guerre en Irak n’a pas provoqué de telles protestations”, déclare à l’AFP le sociologue Adam Ostolski.

Fin janvier et début février, des milliers de jeunes sont descendus dans les rues en Pologne, avec des autocollants “Nie à ACTA” (Non à ACTA) sur la bouche, des masques noir et blanc des pirates informatiques Anonymous, des banderoles “Non à la censure” à la main.

Des dizaines de sites internet du gouvernement ont été piratés.

Les jeunes, qui se sont mobilisés spontanément à travers les réseaux sociaux, protestaient contre la signature, le 26 janvier à Tokyo, par la Pologne et 21 autres gouvernements européens de l’accord ACTA (Anti-Counterfeiting Trade Agreement).

Négocié entre l’Union européenne, les Etats-Unis, le Japon, le Canada, la Nouvelle-Zélande, l’Australie, Singapour, la Corée du Sud, le Maroc, le Mexique et la Suisse, ce texte est destiné à lutter contre la contrefaçon de manière très large, depuis les médicaments et autres marchandises, jusqu’au téléchargement illégal sur l’internet.

C’est ce dernier volet qui suscite des protestations massives. Elles font écho à la levée de boucliers contre les projets des lois antipiratage, à l’étude aux Etats-Unis, dit PIPA (“Protect Intellectual Property Act”) et SOPA (“Stop Online Piracy Act”).

Les détracteurs d’ACTA le jugent trop imprécis, laissant la voie à des abus de la part des propriétaires des droits d’auteurs.

“Les Polonais sont une des nations des plus actives sur internet et sur des réseaux sociaux en Europe”, explique Adam Ostolski.

“Pour les jeunes, qui n’ont guère de perspectives de promotion sociale, l’internet est le dernier espace public où ils se sentent libres. Avec ACTA, on commence a contrôler cet espace. C’est pour eux une question de liberté, de dignité personnelle et d’accès à la culture “, ajoute-t-il.

Selon Mikulas Ferjencik, vice-président du Parti pirate tchèque, les sociétés post-communistes ont également, compte tenu de leur histoire, “des expériences plus grandes avec la censure, et font moins confiance aux institutions d’Etat”

Suite à une vague de protestations sans précédent, les gouvernements polonais et tchèque ont décidé de suspendre la ratification de l’accord.

A Varsovie, le Premier ministre Donald Tusk, sévèrement critiqué pour l’absence de consultations autres que celles des défenseurs des droits d’auteurs, a lancé un vaste débat avec des organisations représentants les internautes.

En Europe occidentale, la vague de protestation anti-ACTA monte également, avec une journée de protestation internationale prévue samedi.

Des manifestations sont programmées dans 54 villes allemandes, parmi lesquelles Berlin, Munich, Hambourg et Francfort, mais également en France, en Italie, en Hongrie, ou en Bulgarie.

Au Parlement européen, où se jouera la prochaine étape de la bataille autour d’ACTA, le sujet focalise de plus en plus l’attention des eurodéputés qui doivent se prononcer sur ce texte, a priori en juin.

Les eurodéputés socialistes, libéraux, et verts dénoncent les dangers d’un texte qui défend trop, à leurs yeux, les intérêts des ayants droit au détriment des citoyens.

Ils s’indignent également de l’opacité qui a entouré la signature du texte, auquel ils n’ont eu accès que très tard.