Aviation : l’UE maintiendra sa taxe carbone malgré les pressions américaines

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éroport de Roissy Charles de Gaulle, le 29 octobre 2011. (Photo : Thomas Samson)

[20/12/2011 16:14:26] BRUXELLES (AFP) La Commission européenne entend maintenir son projet d’obliger les compagnies aériennes à payer pour leurs émissions polluantes dans l’UE, si la justice avalise cette décision mercredi, et ce malgré des menaces américaines de mesures de rétorsion.

“Il n’est pas question de renoncer”, a affirmé mardi à l’AFP un responsable européen, “c’est une loi approuvée par l’Union européenne”.

L’UE a décidé en 2008 d’obliger toutes les compagnies aériennes desservant les pays de l’Union, donc y compris les étrangères, à racheter l’équivalent de 15% de leurs émissions de CO2 à compter du 1er janvier 2012, pour lutter contre le réchauffement climatique.

La loi prévoit des sanctions pécuniaires d’un montant de 100 euros par tonne de CO2 et une interdiction de vol dans l’UE pour la compagnie réfractaire.

La secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton a enjoint l’Union européenne de “renoncer” à cette taxe carbone ou “au moins de différer” sa mise en oeuvre, sous peine de “mesures appropriées”.

Elle a formulé cette menace dans une lettre en date du 16 décembre, dont l’AFP a obtenu copie, adressée à la commissaire chargée du Climat, Connie Hedegaard, avec copie au président de la Commission José Manuel Barroso, au président de l’UE Herman van Rompuy, à la représentante de la diplomatie européenne Catherine Ashton et au commissaire aux Transports Siim Kallas.

La Commission européenne s’est refusée à tout commentaire sur cette missive. Elle a indiqué attendre la décision que va rendre mercredi la Cour européenne de justice sur un recours introduit par plusieurs compagnies américaines.

L’avocat général de la juridiction de Luxembourg a jugé le système européen d’échange de quotas d’émission de CO2 conforme au droit international et la Cour devrait suivre son avis, selon la plupart des experts du secteur.

Mme Hedegaard est ulcérée par les lourdes pressions de l’administration américaine.

“L’Union européenne a toujours respecté les lois américaines et nous attendons que les Etats-Unis respectent la législation européenne”, a-t-elle averti en novembre.

L’Association des compagnies aériennes européennes (AEA) a déploré mardi la “politisation” de l’affaire.

“Même si la Cour européenne de justice juge le système européen légal, cela ne va pas empêcher l’hostilité vis-à-vis de la manière dont il a été imposé”, a souligné le secrétaire général de l’AEA, Ulrich Schulte-Strathaus.

“Cette confrontation politique ne peut se résoudre qu’à Montréal, via l’OACI”, a-t-il affirmé.

“Cela fait quinze ans que nous attendons que l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) conclue un accord, quel qu’il soit”, répond la Commission.

L’OACI, institution des Nations unies créée en 1944 pour promouvoir le développement sûr et ordonné de l?aviation civile dans le monde, a adopté début novembre une résolution non contraignante dans laquelle elle recommande d’exempter les compagnies étrangères de la taxe carbone.

Le texte a été soutenu par 26 des 36 membres de l’OACI, dont les Etats-Unis, la Chine et la Russie.

Les compagnies européennes redoutent d’être victimes de rétorsions, a souligné la représentante de l’Association des compagnies internationales (IACA) Sylviane Lust.

“Si ces tensions débouchent sur une guerre commerciale, il n’y aura pas de vainqueur”, a pour sa part averti le directeur général de l’Association des compagnies régionales européennes (ERA).

L’obligation de payer pour 15% des émissions de CO2 devrait coûter 380 millions d’euros (528 millions de dollars) en 2012 aux compagnies desservant l’UE et cette facture annuelle augmentera encore en 2013, le quota d’émissions attribué gratuitement étant ramené de 85% à 82%.

Aux Etats-Unis, la Chambre des représentants a adopté un projet de loi interdisant aux compagnies aériennes américaines de s’acquitter de cette taxe.

La Chine a pour sa part menacé l’UE de rétorsions commerciales, notamment contre le constructeur Airbus, si ses compagnies ne sont pas exemptées de cette taxe.