Tunisie – Les dix idées-forces : Transparence, responsabilité sociale et participation citoyenne

Par : Tallel


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stratégie proposée pour la période 2012-2016
devra conduire à élaborer un
nouveau modèle de
développement pour la Tunisie. Elle porte dix grandes idées,
repose sur cinq principes d’action, s’appuie sur un schéma de croissance et
comporte trois phases de réalisation.

1. Construire la confiance par la transparence, la responsabilité sociale et la
participation citoyenne

Au-delà des réformes politiques, juridiques et institutionnelles rendues
obligatoires par le fait même de la construction de la Tunisie nouvelle, le pays
engage volontairement un processus démocratique privilégiant l’écoute, le
dialogue et la transparence, et fixant les modalités d’une démocratie
décentralisée et participative.

Ce processus est porteur d’une démarche de participation qui a pour finalité de
créer les conditions de la participation de l’individu à l’action publique,
partant de l’hypothèse que toute personne possède un savoir sur son
environnement de vie, et des idées pour l’améliorer. Chaque citoyen constitue
ainsi une ressource dans l’élaboration de tout ce qui relève de l’action
publique.

L’objectif est de répondre aux aspirations des tunisiens par une démocratie qui
se nourrit de la transparence et de la participation citoyenne. C’est d’autant
plus nécessaire que les besoins individuels et collectifs deviennent de plus en
plus complexes et que la conjoncture tant locale que nationale est soumise à des
mutations profondes et continues. Ceci aura l’avantage d’anticiper les
changements et d’y adapter les politiques publiques dans le temps et dans
l’espace.

Comme bon nombre de sociétés modernes, la Tunisie nouvelle se doit de se doter
d’une nouvelle Charte des droits et libertés de la personne, dans laquelle il
est affirmé que toute personne est titulaire des libertés fondamentales.

La liberté du citoyen est en effet une constante de la nouvelle démarche du
développement du pays, mais elle demeure largement tributaire des acquis de son
corollaire, la responsabilité. La vie civique exige en effet que cette liberté
soit équilibrée par une responsabilité citoyenne tout aussi fondamentale, celle
de devoir composer avec toutes diversités d’opinions, de croyances morales ou
religieuses et de conceptions de l’approche participative du citoyen, de l’Etat
et de l’ensemble des opérateurs publics et privés et issus de la société civile,
dans un environnement qui favorise la complémentarité des opérateurs, et la
consolidation du climat de confiance qui constitue la condition préalable à
toute action collective.

La question de l’instauration de la confiance sera au coeur de la construction
du nouveau mode de gouvernement en Tunisie. Il est en effet primordial qu’une
Tunisie responsable, inclusive et respectueuse de l’État de droit, soit à même
de reconstruire et de renforcer la confiance du citoyen. Il s’agit là d’un défi
de taille que tous les acteurs se doivent de relever pour mener à bien leurs
programmes, notamment quand il s’agit d’opérer des réformes et d’engager des
actions de développement. Le fait est que la confiance, la responsabilisation,
l’appropriation et la bonne gouvernance sont essentielles au progrès du pays.

La stabilisation des ordres politique, économique et social fragilisés par la
transition que connait le pays, et la gestion des affaires publiques qui se
trouvent parfois confrontée à des difficultés structurelles et matérielles, ne
vont en effet pas d’elles-mêmes. Elles supposent non seulement une volonté
politique, mais également un changement de paradigme dans les pratiques des
acteurs de la gouvernance, basées sur des principes fondamentaux tels que les
droits individuels et publics, la participation, la transparence, la
responsabilisation, l’équité et la diversité.

En Tunisie comme ailleurs, Il ne s’agit plus pour l’autorité publique, de
décider et d’énoncer simplement de nouvelles chartes au sommet, ou de produire
de nouveaux plans d’action, en suivant seulement une approche descendante. Les
nouvelles règles de la bonne gouvernance des affaires publiques, exigent aussi
de définir, par des processus de dialogue et de négociation inclusifs, un
ensemble de règles et de dispositifs institutionnels fondés sur des valeurs,
principes et pratiques connus et acceptés par tous. De tels « contrats » entre
Etat et société sont des éléments clés pour restaurer la confiance, s’accorder
sur les règles de jeux d’une gouvernance démocratique où les rôles et
responsabilités des différentes institutions et acteurs sont préalablement
définis, et où légitimité à l’Etat recouvre son importance, tout en
reconnaissant au partenaire privé, à la société civile et surtout au citoyen
leurs responsabilités respectives dans la définition et la mise en place des
Institutions de l’Etat.

Le citoyen devenant de ce fait la source et la cible de l’action publique, sera
appelé à jouer un nouveau rôle dans la vie publique dans le cadre d’un dialogue
approfondi et transparent entre les citoyens et les élus, régionaux et
nationaux. L’action de réforme consistera par conséquent à mettre en place des
mécanismes fiables favorisant la confiance, l’écoute et la concertation et
donnant au citoyen une qualité de source et de moyen d’action de portée
essentiellement publique. Plus précisément, elle sera axée sur l’ancrage des
principes de démocratie, la consécration de l’efficacité de l’administration,
l’amélioration de la gestion des ressources publiques et l’institutionnalisation
de l’accès à l’information.

L’ancrage des principes de démocratie suppose la mise en place d’un nouveau
contrat social impliquant un climat de confiance mutuelle et un cadre de
responsabilité commune et partagée sur lequel peut se définir le champ
d’intervention. Il suppose, également, une concertation active et une
participation agissante de toutes les forces vives au processus de prise de
décision publique tout en respectant la suprématie de la loi et des institutions
du pays.

Ce nouveau cadre consacrera le droit et la liberté d’expression, d’association
et de mouvement et veillera à réduire toutes les entraves qui pourront s’opposer
au développement du paysage médiatique, politique et associatif du pays.

Dans le court terme, dans le cadre du programme « Gouvernance et Opportunités »
susmentionné, la loi sur les associations sera amendée en supprimant les
principales clauses discrétionnaires et restrictions pesant sur la création et
le fonctionnement des associations à travers, notamment, le remplacement du
système d’autorisation par un système de déclaration, la suppression de la
classification des associations ainsi que la suppression de la disposition
limitant la liberté d’accepter ou de refuser des membres.

Une révision plus exhaustive du cadre juridique et réglementaire des
associations et des lois connexes, tels que le code pénal et les lois
sécuritaires, aura lieu sur le moyen terme et sera fondée sur un processus de
consultation avec tous les acteurs clefs de la société.

La consécration de l’efficacité de l’administration repose sur l’amélioration de
la gestion publique, garante au premier plan de la démocratie, et ce, à travers
la consécration d’une vraie réforme des rouages et des pratiques de
l’administration afin de disposer d’une administration moderne qui puisse
contribuer au développement socioéconomique et assurer des prestations de
services de la meilleure qualité possible, au moindre coût et dans des délais
réduits.

Dans le cadre de cette nouvelle approche, un processus systémique, participatif,
mesurable et visible de révision des procédures et des autorisations
administratives est déjà initié en vertu d’un arrêté du Premier Ministre. Il
concerne dans une première phase les secteurs et services clefs pour les
citoyens et les entreprises et vise à simplifier les procédures et à limiter la
discrétion et l’arbitraire dans l’application des règles, tout en veillant au
développement de l’administration électronique et au développement de la
déontologie dans le service public.

Ce processus de réformes se poursuivra dans le sens de l’amélioration des
formalités et des procédures administratives avec l’implication des usagers, sur
la base d’objectifs stratégiques et de critères clairs : cohérence légale,
nécessité, efficience/coût, discrétion, etc.

Les réformes seront axées, également, sur la modernisation de la fonction
publique et de la gestion des ressources humaines de l’administration à travers
l’instauration d’un système de promotion basé sur le mérite et la compétence,
ainsi que l’institution d’un système d’évaluation de performance des
fonctionnaires.

Le développement des systèmes d’information intégrés au sein de l’administration
développera la capacité d’analyse et la dématérialisation des échanges
d’information favorisant, en conséquence, l’amélioration de la productivité et
renforçant l’efficacité de l’ensemble des services publics.

Par ailleurs, l’amélioration de la gestion budgétaire exige une bonne gestion
des comptes publics dans le sens du développement de la transparence et de
l’efficacité de la gestion budgétaire et ce, à travers l’approfondissement et la
généralisation du système de programmation budgétaire pluriannuelle et axée sur
les résultats ainsi que la consolidation du contrôle avec l’introduction de plus
de flexibilité dans son exercice dans le sens de la mise en place un système de
contrôle des dépenses publiques orienté vers un audit de performance axé sur
l’appréciation de l’efficacité et de l’efficience de la dépense publique.

L’amélioration de la gestion budgétaire requiert, également, une revue
approfondie de la réglementation des marchés publics pour conférer davantage
d’efficacité et de transparence sur les procédures de passation de marchés
conformément aux meilleures pratiques internationales.

L’institutionnalisation de l’accès à l’information passe par la révision du
cadre législatif et réglementaire régissant l’information dans le sens de la
consécration de la liberté d’information, conformément aux principales pratiques
et normes internationales en la matière et ce, à travers la diffusion au public
de toutes les données d’ordre statistiques, économiques, sociales,
administratives et financiers.

Dans ce cadre, un décret-loi a été promulgué dans le but d’institutionnaliser
l’accès aux documents administratifs des organismes publics, conformément aux
principales pratiques et normes internationales en la matière. Ce nouveau cadre
règlementaire précise le principe d’accès à ce type d’informations, les
principales catégories d’informations diffusées par le gouvernement, notamment
par Internet, des critères objectifs d’exclusion (données personnelles,
sécurité, etc.) et une procédure claire d’accès à l’information.

Sur le moyen terme, une loi sur la liberté d’information d’application générale
sera élaborée. Elle devra intégrer des questions importantes telles que la mise
en oeuvre d’une structure institutionnelle adéquate.

Les collectivités régionales et locales ont également un rôle non moins
important à jouer dans la construction de la Tunisie nouvelle. En s’appuyant sur
une décentralisation effective, accompagnée de la mise en oeuvre de nouvelles
règles démocratiques où le citoyen constitue le maillon central de l’action
locale et régionale, l’espace local se présentera en effet comme le niveau
stratégique le plus approprié pour une refondation de la gouvernance, et une
reconstruction de la confiance avec le citoyen.

A suivre : 2. Assurer le développement inclusif et équilibré

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Source : Stratégie de développement économique et social de la Tunisie –
2012-2016 (du gouvernement provisoire de Béji Caïd Essebsi)