à Freising, en Allemagne, le 25 novembre 2010 (Photo : Christof Stache) |
[31/08/2011 10:29:07] BERLIN (AFP) Le marché du travail allemand est en éclatante santé et le chômage à son plus bas depuis environ 20 ans. Ce qui signifie, pour ceux qui sont encore sur la touche, que les chances de trouver un emploi s’amenuisent.
Frank Holzmann en sait quelque chose. Il dirige une association de réinsertion de chômeurs de longue durée dans un quartier du nord de Berlin. A Marzahn, succession de barres d’immeubles entrecoupées de grandes allées, le taux de chômage avoisine les 13%.
Le chiffre n’est pas dramatique quand en comparaison, en Espagne, le taux de chômage affiche 21%. Mais il est presque quatre fois plus élevé qu’en Bavière qui connaît le plein emploi. Et surtout, le profil des chômeurs de Marzahn fait que, pour beaucoup, l’espoir d’entrer ou revenir sur le marché du travail est minime.
“Chez les gens dont je m’occupe, la durée moyenne d’éloignement du marché du travail est de sept ans”, explique M. Holzmann, “beaucoup n’ont jamais travaillé du tout”.
Peu qualifiés, déconnectés du monde de l’emploi, “50% d’entre eux n’entreront jamais sur le marché du travail même si la conjoncture est florissante”, juge-t-il même. Et parmi les autres “un quart est paresseux, on ne peut rien faire, et un quart ne trouvera malheureusement que de l’emploi précaire”.
Le président de l’Agence pour l’emploi, Frank-Jürgen Weise, estime que “quiconque n’a pas de travail, dans ce marché de l’emploi en très bonne santé, a vraiment un problème”. Et là, admet-il, le travail classique de placement effectué par ses services “ne suffit pas”.
A Neubrandenburg (nord-est), le travail de l’Agence pour l’emploi s’assimile de plus en plus à “de l’assistance, de l’aide psychologique”, explique son directeur Heiko Mirass, parce que parmi ses 27.000 “clients” au chômage, “une forte proportion a des problèmes sociaux, de santé ou de dépendance”.
A plus de 14%, le taux de chômage dans cette localité proche de la frontière polonaise est l’un des plus élevés du pays. La conjoncture très porteuse a permis de diviser par deux le taux de chômage en six ans, explique M. Mirass, “et ceux qui n’ont pas réussi à se remettre en selle ont du mal”.
“Nous devons en faire plus pour que les gens qui sont encore au chômage aient leur chance”, reconnaissait récemment la ministre de l’Emploi Ursula von der Leyen, rappelant qu’il y a environ un million d’emplois vacants en Allemagne.
Mais les chômeurs de Marzahn et de Neubrandenburg n’ont pas le profil pour occuper ces postes d’ingénieurs, de techniciens spécialisés ou de programmateurs informatiques, dont la majorité sont de toute façon dans d’autres régions d’Allemagne.
“Les employeurs allemands ne trouvent plus assez de travailleurs qualifiés pour occuper les postes. A la place, ils demandent à leurs employés de partir plus tard à la retraite, ou recrutent des gens qui n’étaient pas inscrits au chômage”, explique Holger Schmieding, économiste de Berenberg Bank.
En d’autres termes, “l’Allemagne puise dans ses réserves de main d’oeuvre”. Ce qui se traduit par un paradoxe: la hausse de l’emploi est vigoureuse, alors que le déclin du chômage ralentit.
Outre le suivi des chômeurs, les Agences pour l’emploi consacrent donc une grande partie de leur énergie à convaincre les entreprises d’embaucher les sans-emploi qui sont dans leurs fichiers.
“Nous faisons campagnes auprès des employeurs pour qu’ils engagent des gens âgés, ou avec des problèmes de santé, nous essayons de les convaincre de donner une seconde chance aux gens”, explique M. Mirass.
Une stratégie qui a ses limites quand l’offre et la demande sont trop éloignées pour se rencontrer.
“Tout le monde ne peut pas trouver un emploi, ce n’est pas vrai”, résume M. Holzmann.