Tunisie – USA : Pourquoi n’a-t-on pas posé les bonnes questions à Hillary Clinton ?

klinton-19032011-art.jpgNessmaTV nous étonnera toujours, elle reçoit l’une des personnalités les plus
puissantes de la planète (peut-être un peu grâce à Silvio Belusconi, l’un de ses
plus gros actionnaires) et la rencontre se passe en platitudes, en sentiers
battus comme si on avait juste voulu se faire plaisir et… faire plaisir à
Hillary Clinton! Celle-ci ne s’en est d’ailleurs pas privée en débitant des
propos qu’on lit partout dans les journaux à propos de la Tunisie, de l’Algérie,
du Maroc, du Sahara Occidental, de la Libye…

Pourtant, une question qui était sur toutes les lèvres aurait dû être posée…
pour secouer tout cela et mettre tout de suite la diplomate-en-Chef des USA
devant les devoirs de la toute-puissance de sa position; le devoir d’engagement:
“Alors que nous sommes à quelques heures de la décision du Conseil de sécurité
de l’ONU,
si celui-ci vote l’intervention militaire cintre la Libye (ce qu’il a
fait en bout de compte), le contre-amiral Harris, patron de la 6ème Flotte US,
a-t-il des ordres pour des attaques immédiates contre les défenses aériennes
libyennes?“

La Libye, actualité oblige!

Pourquoi justement commencer par cette question? C’est tout simple, ce même 17
mars, des dizaines de citoyens tunisiens se sont rassemblés devant le siège du
ministère des Affaires étrangères pour crier haut et fort leur opposition à la
visite de la secrétaire d’Etat américaine, génériquement, à cause des “positions
américaines négatives vis-à-vis des causes arabes et particulièrement la cause
palestinienne“ et du soutien “inconditionnel des Etats-Unis à Israël“ mais,
spécifiquement, à cause de l’absence de “position ferme soutenant le peuple
libyen“.

Ces manifestants disaient tout haut ce que pensent tous les Tunisiens, et
Hillary Clinton le sait. Dans sa conférence de presse en compagnie de notre
ministre des Affaires étrangères, elle a pourtant été évasive en parlant
d’efforts internationaux visant à protéger les civils et à mettre fin aux
exactions de Gueddafi et des décisions de la Communauté internationale en nous
laissant sur notre faim quant à l’attitude des Etats-Unis qui, selon elle,
soutiendront les décisions du Conseil de sécurité et tiendront à une large
participation qui inclut les pays arabes.

Un allié stratégique!

Les officiels tunisiens avaient la tête ailleurs pour être en mesure de demander
une attitude plus tranchante de Mrs Clinton. Ils ont tous parlé de l’amitié
séculaire et du caractère stratégique qui caractérisent les relations tuniso-américaines
en tenant à souligner clairement la volonté de la Tunisie d’ouvrir un nouveau
chapitre avec les USA, plus diversifié, plus fort, plus clair…

Foued Mebazaa a même demandé de l’aide à mots couverts en parlant juste des
“priorités de la période à venir“, c’est-à-dire le développement équitable entre
toutes les régions, le développement des plus défavorisées, l’emploi,
l’amélioration des conditions de vie…

Démocratie

Hillary Clinton a joué à fond le jeu “amitié“ et “stratégie“… souriant à “la
transition démocratique“ et aux “élections libres et transparentes“ pour une
“Assemblée constituante“, à la formation des partis politiques, au “potentiel de
construction démocratique et de développement économique“ en Tunisie et
promettant le soutien des USA dans sa transition vers la démocratie…

Economie, le gros dossier

Hillary Clinton sait également que l’économie a toujours été la tasse de thé des
Tunisiens et elle a eu des mots dans ce sens qui font la promesse de programmes
pour de nouvelles opportunités d’emploi où l’Overseas Private Investment
Corporation donnera de l’argent frais et des garanties qui ont valeur d’argent
et encouragera les visites d’investisseurs américains en Tunisie.

Le Congrès créera un Fonds pour les projets tuniso-américains pour épauler les
privés qui se lancent dans l’Atlantique. Le gouvernement US serait aussi en
train de penser à activer des mécanismes relevant de l’USAID. “La Tunisie est
aussi éligible pour contracter des prêts auprès du Fonds pour les défis du
millénaire“, a souligné H. Clinton.

Société civile

Un point qu’il faut mettre en évidence car les Etats-Unis en sont
particulièrement friands: un nouveau partenariat entre la société civile
tunisienne et des sociétés de technologie américaines, comme Microsoft qui
soutiendra des associations des droits de l’Homme, de la démocratie et de
l’éducation civique avec des ordinateurs, des logiciels, de la formation…

Sur tout cela, sur le sens et l’avenir du concept d’un allié stratégique des
Etats-Unis aussi bien que sur les détails de la pratique de la Démocratie, mais
également à propos de très gros dossiers comme l’est de fait l’économie dans la
Tunisie de l’après-14 janvier 2011 et même sur l’avenir de la Société civile
avec les nouvelles règles issues de la légitimité de la Révolution (un concept
qui existe bel et bien dans les jurisprudences internationales)…

Sur tout cela donc, des questions auraient dû être posées clairement à Mrs
Clinton car pour nous tous, ce n’était certainement pas le moment d’avoir une si
haute personnalité à portée de la main et de ne pas être allés au bout de la
logique de la Révolution. Pas ce fameux “Dégage!“ qui a fait le tour de la
planète mais un appel clair à l’adresse des grands de ce monde pour un
“Engage-toi!“ sans réserves.