Espionnage : Renault muet sur le rôle d’un salarié de Geos dans son enquête privée

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à Boulogne Billancourt, le 10 janvier 2011. (Photo : Eric Piermont)

[02/02/2011 13:00:28] PARIS (AFP) Le constructeur automobile Renault a refusé mercredi de confirmer avoir eu recours aux services d’un salarié du groupe Geos, spécialisé dans l’intelligence économique et la sécurité des entreprises, dans l’enquête privée sur un cas d’espionnage présumé au sein de l’entreprise.

“Nous avions indiqué dès le 13 janvier que nous ne participerons d’aucunes surenchères polémiques et réserverons exclusivement les éléments en notre possession aux services compétents chargés de l’enquête”, a réagi mercredi une porte-parole de Renault auprès de l’AFP.

Geos a indiqué mardi soir, après la publication d’une information du Canard Enchaîné, qu’un de ses salariés basé en Algérie “avait pris l?initiative, à titre personnel et sans en référer à sa hiérarchie, de servir d?intermédiaire entre ses contacts chez Renault et un tiers investigateur”.

Renault soupçonne trois cadres dirigeants, qu’il a licenciés, d’avoir diffusé des informations sensibles sur son programme phare de véhicules électriques.

Avant que la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) ne se saisisse du dossier, dans la foulée du dépôt de plainte du constructeur, la direction de Renault avait diligenté à l’été 2010 une enquête interne.

Dans ce cadre, elle avait eu recours à un “spécialiste de l’intelligence économique” qu’ils “connaissent bien, basé hors de l’Europe”, avaient indiqué à l’AFP des sources proches du dossier.

Pour le Canard Enchaîné, Renault manque de preuves écrites tangibles pour étayer les accusations d’espionnage contre trois de ses ex-salariés.

Les informations transmises au cours de l’enquête interne l’auraient été “sans la moindre pièce justificative +présentable+”, avance l’hebdomadaire satirique, “d’où le vide abyssal du dossier de plainte déposé par Renault”.

La CGT de Renault, dubitative sur l’espionnage présumé qui secoue le groupe automobile, a estimé pour sa part que la direction exploitait l’affaire “pour accentuer la régression sociale”, en diminuant les effectifs et en imposant une “culture du secret” aux syndicats.

La CGT, qui n’a pas eu de réponses de la direction à ses demandes d’informations sur cette affaire, “s’étonne du licenciement de trois salariés sur la base d’une intime conviction, et du fait que Renault n’ait pas saisi la justice plus tôt”, a déclaré le délégué syndical central Fabien Gâche, lors d’une conférence de presse à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine).

De plus, le syndicat n’est pas surpris que des fuites éventuelles puissent avoir lieu, étant donné “la vente de filiales et d’activités depuis des années ainsi que l’externalisation vers des prestataires qui travaillent pour plusieurs constructeurs”.

“Lorsque l’on sait que Renault n’intervient que dans moins de 20% dans la conception et la fabrication d’un véhicule de la marque, on peut s’interroger fortement sur sa maîtrise de ses secrets technologiques”, a souligné le délégué.

Parmi le personnel, “cette affaire en rajoute au climat de défiance à l’encontre des dirigeants de Renault, dont les objectifs s’opposent de plus en plus à l’intérêt commun”, a-t-il ajouté.