Tunisie : Quel avenir pour les 2.500 diplômés en fiscalité ?

Par : Autres

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La cinquième promotion de maîtrisards en fiscalité est sortie cette année 2010.
Le nombre des titulaires de licences, de maîtrises et de mastères délivrés par
l’Institut Supérieur de Finances et de Fiscalité de Sousse dépasse les 2.000
sans tenir compte des diplômés des Facultés juridiques de l’Ariana, de Sfax et
de Gabès.

A ce titre, l’administration qui est apparemment soucieuse de l’emploi des
diplômés universitaires a-t-elle préparé le terrain pour les titulaires de la
maîtrise ou du master en fiscalité pour qu’ils s’établissent à leur propre
compte ?

Conformément à la loi n°60-34 du 14 décembre 1960 relative à l’agrément des
Conseils Fiscaux, le Conseil Fiscal est habilité à accomplir, pour les
contribuables, les formalités fiscales, à les assister, à les conseiller ou à
les défendre auprès de l’administration fiscale ou devant les juridictions
jugeant en matière fiscale et d’accomplir, à titre préventif, des missions
contractuelles d’audit fiscal qui permettent à l’entreprise d’évaluer son risque
fiscal ainsi que sa gestion fiscale avant l’intervention des agents du contrôle
fiscal. La profession de Conseil Fiscal Agréé est incompatible avec la
profession comptable qui dispose déjà d’un monopole dans son domaine
d’intervention. C’est-à-dire le Conseil Fiscal est interdit de fournir des
prestations comptables et d’être, en conséquence, inscrit parmi les
professionnels de la comptabilité. L’exercice illégal de la profession constitue
un délit pénal au sens de l’article 8 de la loi relative à l’agrément des
conseils fiscaux et de l’article 159 du code pénal.

En dépit de ces dispositions pénales, les recettes des finances ont enregistré
les statuts de centaines de sociétés exerçant illégalement la profession de
Conseil Fiscal Agréé. En outre, les bureaux de contrôle des impôts ont délivré
des matricules fiscaux à ces sociétés, usurpatrices, jusqu’à ce jour, du titre
de Conseil Fiscal, dont l’objet est illicite et qui ne sont pas, en outre,
inscrites au tableau des professionnels de la comptabilité, et ce en violation
de la loi régissant la profession de Conseil fiscal, de celle régissant la
profession de comptable, de celle relative à la protection du consommateur, de
celle relative à la concurrence et les prix ainsi que des dispositions de
l’article 1256 du code des obligations et des contrat qui stipule : «toute
société doit avoir un but licite. Est nulle de plein droit toute société ayant
un but contraire aux bonnes mœurs, à la loi ou à l’ordre public», sans toutefois
oublier les cas de violation de l’article 15 du code des droits et procédures
fiscaux relatif à la protection du secret professionnel. Ces sociétés, dont
l’objet est contraire à la loi régissant la profession du conseil Fiscal ont été
inscrites au registre de commerce en violation de l’article 3 de la loi n°95-44
régissant le registre de commerce et continuent, jusqu’à ce jour, à travailler
et à traiter avec l’administration en toute impunité au détriment d’environ
2.500 titulaires de mastères, de maîtrises, et de licences en fiscalité parmi
les diplômés de l’Institut Supérieur de Finances et de Fiscalité de Sousse ainsi
que la Facultés des Sciences Juridiques de l’Ariana, de Gabès et de Sfax qui ne
peuvent s’établir à leur propre compte.

Malgré les centaines de requêtes adressées par la profession appelant
l’administration à mettre à niveau la profession et à mettre fin à ces abus qui
sont, en principe, incriminés par la loi en vigueur la situation se dégrade
chaque jour. A ce titre, l’article 9 de la loi relative à l’agrément des
conseils fiscaux stipule : «L’exercice illégal de la profession de conseil
fiscal sera poursuivi devant la juridiction correctionnelle. Le secrétaire
d’Etat aux finances et au commerce pourra saisir les tribunaux, par voie de
citation directe, dans les termes de l’article 115 du code de procédure pénale».
Cet article est ineffectif du moment que les intermédiaires et les usurpateurs
du titre de Conseil Fiscal continuent à traiter avec l’administration, en toute
imputé, au moment où les jeunes conseils fiscaux quittent la profession du fait
des pratiques illicites tolérées par l’administration qui doit, en principe,
veiller au respect de la légalité. Les notes internes publiées de temps à autre
par l’administration et destinées à ses agents, quant aux personnes habilités à
exercer la profession de Conseil Fiscal sont, aussi, restées lettre morte et
ineffectives. La situation de la profession se dégrade et les de flagrants
délits sont en prolifération, notamment après la parution du cahier des charges
dont l’illégalité est certaine du fait qu’il viole la loi relative à l’agrément
des conseils fiscaux notamment son article 4 ainsi que l’article 3 du décret n°
93-982 régissant la relation entre l’administration et les citoyens.

La profession de Conseil Fiscal est l’une des garanties dont doit disposer le
contribuable dans un Etat de droit. Conscient de son rôle, l’Etat a créé
l’Institut Supérieur de Finances et de Fiscalité, et ce afin de former des
conseils fiscaux et de les inciter à s’établir à leur propre compte. La mise à
niveau de la profession par référence aux règles mises en place par la
Confédération Européenne des Conseils Fiscaux regroupant plus de 180 000 membres
ainsi que la Directive européenne du 12 décembre 2006 relative aux services et
la politique européenne de voisinage en vertu de laquelle la Tunisie est appelée
à harmoniser son droit professionnel avec les directives européennes.

Malgré ces efforts, la profession connaît beaucoup de difficultés du fait que la
loi de 1960 la régissant est devenue obsolète et du fait que le titre de conseil
fiscal n’est pas protégé malgré que l’exercice illégal de la profession est un
délit pénal et que l’administration est tenue, en principe, d’appliquer les
dispositions de l’article 9 de la loi régissant la profession et de citer les
délinquants devant la juridiction pénale ainsi que celles de l’article 29 du
code des procédures pénales l’obligeant de les dénoncer devant le procureur de
la république.

La mise à niveau, la réorganisation et la moralisation de la profession et la
protection du titre, réclamées, vainement, depuis plus d’une dizaine d’années
par les conseils fiscaux et leurs structures professionnelles, sont devenues une
nécessité si l’Etat compte, vraiment, encourager les titulaires de maîtrises et
de mastères en fiscalité à s’établir à leur propre compte et donner plus de
garanties aux contribuables et au trésor dont les intérêts sont, certainement,
menacés et lésés par les pratiques illicites, les tromperies et autres des
intermédiaires et des charlatans et leurs complices qui cultivent la fraude
fiscale et n’accordent aucune importance aux nouveaux diplômés demandeurs
d’emploi (environ 2500), et par conséquent, à l’intérêt général. En outre,
d’autres titulaires de monopoles dans leur domaine d’intervention (commissariat
aux comptes et services comptables) veulent accaparer le domaine d’intervention
du conseil fiscal.

Les promesses données lors des travaux préparatoires de plusieurs lois de
finances comme celles pour la gestion 2002, 2003 et 2004 et autres, quant à la
mise à niveau de la profession régie par une loi archaïque datant de 1960, sont
restées lettre morte ; malgré que l’administration manifeste beaucoup d’intérêt,
apparemment, pour l’emploi des titulaires de maîtrises et de mastères en
fiscalité qui n’ont pas pu s’établir à leur propre compte à cause de l’exercice
illégal de la profession devant les services administratifs qui refusent, en
toute impunité, d’appliquer les instructions qui leur interdisent de traiter
avec les charlatans et les usurpateurs. A ce titre, l’administration refuse
jusqu’à ce jour de communiquer la liste des conseils fiscaux à sa disposition
qui comprend des personnes interdites de l’exercice de la profession parmi les
fonctionnaires, les comptables, les décédés et autres. La non publication de la
liste joue en faveur des usurpateurs qui sont présentés par certains
administrateurs comme conseils fiscaux et ceci joue à l’encontre de l’image de
la profession.

Les usurpateurs du titre de Conseil Fiscal Agréé (parfois non titulaires d’un
diplôme) se présentent, généralement, sous les dénominations suivantes : Etudes
comptables et fiscales, Assistance comptable juridique et fiscale, Formateur
consultant en fiscalité, Enseignant universitaire consultant en fiscalité,
Assistance et conseil aux entreprises, Conseil d’affaires, Optimisation fiscale,
Accompagnement des entreprises, Conseil juridique, Consulting, Juriste
d’affaires, Assistance et conseil aux entreprises, Assistance administrative,
Expert fiscal, Contentieux fiscal, Audit fiscal, Ancien fonctionnaire et autre.
Ils conseillent leurs victimes de ne pas s’adresser à un Conseil Fiscal Agréé
afin que leur ignorance ne soit pas dévoilée et leur responsabilité pénale et
civile ne soit pas engagée.Enfin, la responsabilisation de ceux qui bloquent la
mise à niveau de la profession de conseil fiscal en avançant de faux alibis et
des tromperies afin qu’elle reste une cinquième roue pour les retraités, les
intermédiaires, certains titulaires de monopoles, les cabinets d’avocats
étrangers et de comptables et les usurpateurs d’une manière générale, au
détriment des chômeurs parmi les diplômés en fiscalité, est plus qu’une priorité
pour tous au moment où l’Etat dépense d’importantes ressources fiscales pour
employer les jeunes diplômés.

Certains administrateurs justifient le blocage de la mise à niveau de la
profession et sa marginalisation, eu égard aux dommages causés aux efforts de
l’Etat et aux diplômés en fiscalité, par une tromperie flagrante à savoir
l’existence d’un conflit avec la profession comptable alors que les conseils
fiscaux n’ont pas demandé l’élargissement de leur champs d’intervention et que
l’exercice de leur profession est incompatible avec la profession comptable
comme l’a confirmé l’administration fiscale dans sa note interne n° 30/2007 !!!