Tunisie : Sac à puces…

C’était un spectacle désolant qui a pratiquement disparu de nos villes et
villages, un homme ou une femme, enfin un être humain ou ce qu il en restait,
courbé sous le poids des ans, ridé, vêtu des mêmes guenilles hiver comme été,
mal chaussé, des cheveux ébouriffés et une barbe de plusieurs jours, se grattant
de partout, affalé dans un coin se faisant tout petit et tendant la main à la
recherche d’une pièce et qui vit au jour le jour; son seul objectif est de
remplir son écuelle… les enfants de bonne famille l’évitaient et on appelait
ces pauvres hères des sacs à puces ….

Et si ces sacs à puces ont pratiquement disparu de nos rues, les puces ont
réapparu sous d’autres formes et on en trouve actuellement partout… La plupart
sont chinoises et ne causent pas les mêmes dégâts que leurs ancêtres qui, elles,
étaient bien vivantes : regardez autour de vous des puces, il y en partout, dans
l’ordinateur avec lequel je fais ce papier, dans le portable, dans les machines
que vous utilisez, et pour certains, ces puces stimulent le coeur pour leur
permettre de survivre.

Serions-nous devenus tous des sacs à puces ? L’autre soir, je regardais un
orchestre qui jouait, j’avoue avoir été déçue : où sont passés la darbouka, le
naii, le luth, le violon et autres? et même le chanteur qu’une orgue et un cd
pleins de puces ont remplacé. J’avoue que j’étais inquiète de trouver ces
sacrées puces dans l’assiette qu’on me tendait.

Il paraît que l’excès de puces finit par tuer les puces et il semble que
certaines finissent par se faire du tort et bloquer le système qu’elles gèrent
et on paie des experts pour les rebooter ces systèmes.

Et si le pauvre hère avec ses puces était un rebut du système, des puces
tombaient en panne et ne pouvaient être rebootées elles devenaient un rebut du
système… et on le jette. Et le pauvre sac à puces, bien vivant, les ramasse
pour qu’on les recycle vu le nombre de métaux rares qui la composent, comme
dirait un Afghan en colère.