Marée noire : BP pris en étau entre ses actionnaires et l’Etat américain

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à Washington, le 4 juin 2010 (Photo : Chip Somodevilla)

[10/06/2010 16:11:03] WASHINGTON (AFP) Le géant britannique BP était pris en étau jeudi entre ses actionnaires inquiets des conséquences financières de la marée noire dans le golfe du Mexique et l’administration Obama qui veut lui faire rendre gorge jusqu’à ce qu’il assume pleinement ses responsabilités.

Le groupe, à l’origine de la pire pollution de ce type jamais survenue aux Etats-Unis a poursuivi jeudi sa descente aux enfers boursière, portant à 50% la chute de sa valeur depuis le début de la marée noire il y a sept semaines.

Cette dégringolade de BP, qui a déjà payé près d’un milliard et demi de dollars pour la pollution, pourrait se poursuivre et sa facture finale pourrait se chiffrer en dizaines de milliards de dollars.

Dans le même temps, la colère des Américains ne semble pas en voie de s’atténuer. Elle est largement alimentée par la diffusion en boucle par les médias des images de la fuite sous-marine qui se déverse encore à gros goulots et des oiseaux et autres animaux mazoutés. Celle des autorités monte en puissance en parallèle.

Mercredi, le secrétaire américain aux Affaires intérieures, Ken Salazar, a ainsi affirmé lors d’une audition au Congrès que l’administration allait demander à BP de prendre en charge les salaires suspendus des employés du secteur.

Le président Barack Obama a annoncé le 27 mai qu’il prolongeait l’interdiction d’octroyer des permis de forage pétrolier en haute mer de six mois supplémentaires, jusqu’à fin novembre. Plusieurs compagnies pétrolières intervenant dans le golfe ont commencé à retirer des plateformes de prospection de cette zone à cause de la prolongation de ce moratoire.

En réponse à ces assauts anti-BP, certains élus britanniques ont déploré jeudi la montée d’une “rhétorique anti-britannique” aux Etats-Unis, et le premier ministre David Cameron est lui-même monté au créneau, indiquant qu’il évoquerait la marée noire lors de son prochain coup de téléphone à Barack Obama, prévu ce week-end.

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à Washington le 3 juin 2010 (Photo : Saul Loeb)

Ce dernier s’apprêtait de son côté à recevoir jeudi les familles des 11 victimes de l’explosion de la plateforme Deepwater Horizon le 20 avril, catastrophe qui a signé le début de la marée noire.

Il devait leur exprimer ses “sincères condoléances”, selon son porte-parole Robert Gibbs.

M. Obama, qui craint sans doute de laisser des plumes politiques dans cette affaire, comme son prédécesseur George W. Bush jadis avec l’ouragan Katrina de 2005, retournera dans la région pour la quatrième fois la semaine prochaine.

Il pourrait aussi rencontrer le patron de BP Tony Hayward pour la première fois depuis la catastrophe lorsque celui-ci se rendra dans la capitale américaine la semaine prochaine pour des auditions au Congrès, a rapporté la chaîne américaine ABC.

Pendant ce temps, la désolation se poursuivait dans les Etats du Sud, où beaucoup de familles vivant de la pêche sont privées de leurs moyens de subsistance.

“Personne ne peut nous dire combien de temps cela va prendre”, a déploré Clarice Friloux qui se trouve dans ce cas. “Ils ne peuvent pas nous assurer que nous serons de nouveau au travail dans cinq ans”.

La marée noire commence aussi à avoir un impact sanitaire. Plus de 70 personnes ont ainsi fait état de problèmes de santé en Louisiane, notamment des troubles respiratoires, irritations et maux de tête, et huit personnes ont été hospitalisées.

En ce qui concerne la fuite en elle-même, les autorités espèrent récupérer sous peu jusqu’à 28.000 barils de pétrole par jour, soit 4,45 millions de litres, contre 15.000 barils actuellement.

La quantité totale de brut qui s’est déversée reste pour l’heure un mystère, mais elle a sans doute déjà dépassé les 100 millions de litres.