La Russie continue de jouer cavalier seul face à l’Opep

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ésident russe Dmitri Medvedev le 4 septembre 2009 à Moscou (Photo : Dmitry Astakhov)

[13/09/2009 10:58:22] MOSCOU (AFP) La Russie, un des tout premiers producteurs mondiaux de pétrole au coude-à-coude avec l’Arabie saoudite, a su tirer parti des baisses récentes de production de l’Opep pour gagner des parts de marché dans le secteur, oubliant qu’elle avait un temps fait les yeux doux au cartel.

Il y a quelques mois à peine, alors que le baril de brut avait plongé, Moscou assurait vouloir soutenir l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), dont elle n’est pas membre, pour limiter les surplus et permettre aux cours de se redresser.

En décembre 2008, les autorités russes avaient ainsi proposé au cartel de réduire la production du pays de 320.000 barils par jour. Le président Dmitri Medvedev avait même annoncé que son pays n’excluait plus de rejoindre les rangs de l’Opep pour “défendre” ses intérêts.

Mais depuis le début de l’année, la production russe a en réalité graduellement remonté.

En août, le pays a pompé près de 10 millions de barils par jour, un volume record, grâce au lancement par le groupe pétrolier Rosneft du gisement géant de Vankor, dans le Grand Nord, qui renferme des réserves estimées de 520 milliards de tonnes de pétrole.

Et début septembre, le ministre de l’Energie, Sergueï Chmatko, indiquait que le pronostic pour la production de brut pour 2009 avait été revu à la hausse, à 490 millions de tonnes – soit plus qu’en 2008, année au cours de laquelle 488 millions de tonnes avaient été extraits.

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étrolier russe (Photo : Tatyana Makeyeva)

Une annonce qui n’a pas manqué d’exaspérer l’Opep. “Nous n’avons rien vu se concrétiser” sur les négociations pour coordonner les baisses de production, donc “ce n’est pas encourageant”, a déclaré jeudi le secrétaire général du cartel, le Libyen Abdallah el-Badri, à l’issue d’une réunion ministérielle de l’Organisation à Vienne, cité par l’agence Dow Jones Newswires.

Samedi, M. Chmatko a remarqué que la Russie était souvent accusée de ne pas respecter les règles du jeu avec l’Opep, mais qu’elle était prête à donner des explications, selon l’agence Ria Novosti.

Pour les experts, Moscou a toujours fait passer ses propres intérêts en premier.

Le pays “développe son secteur pétrolier en accord avec ses intérêts politiques et ses ressources, selon la conjoncture du marché mondial et le développement de la coopération avec notamment les pays de l’Opep”, remarque Valeri Nesterov, analyste chez Troïka Dialog.

“Mais la ligne principale est d’assurer les intérêts économiques nationaux avant tout”, poursuit-il.

La Russie a en réalité “tiré parti des baisses de l’Opep pour augmenter sa production et sa part de marché”, relève pour sa part Chris Weafer, directeur de la recherche à la banque Uralsib, chiffrant à 20 milliards de dollars les gains du budget fédéral obtenus grâce aux actions de l’Opep.

Lorsqu’elle avait promis de réduire sa production en décembre 2008, “les perspectives sur les prix du pétrole étaient très sombres”, rappelle Alexeï Kokine, analyste à la banque d’investissement moscovite Metropol.

“Le gouvernement et les analystes pensaient sincèrement que d’ici la fin 2009 la production commencerait à baisser un peu”, explique-t-il, ajoutant que peu de personnes s’attendaient à ce que Vankor entre en exploitation dès cet été, celui-ci ayant subi plusieurs délais dans le passé.

Toutefois, Moscou avait pris soin de ne pas prendre d'”engagement ferme”, précise le spécialiste. Et “quand la situation a changé, la Russie a vite renoncé à ses promesses”, puisqu’elle n’était liée par aucune obligation, dit-il.