Algérie – Marché de l’automobile : Un «ilot isolé»

De notre correspondant à Alger, Salah Slimani

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le marché algérien de l’automobile
opère bel et bien en vase clos. Au moment où l’on assiste à un écroulement
du secteur de l’automobile aux quatre coins de la planète du fait de la
crise financière, le marché algérien reste inébranlable comme en témoignent
les statistiques. Le premier trimestre de l’année en cours clôture les
ventes avec un volume global en nette évolution par rapport à 2008, soit un
taux de progression qui avoisine les 17%. Deuxième marché en Afrique après
celui de l’Afrique du Sud, l’Algérie importe en moyenne 200.000 véhicules
annuellement.

Le secteur représente 10% des importations globales du pays, soit 2,8
milliards de dollars par an. L’instauration d’une nouvelle taxe sur l’achat
de véhicules neufs, en août dernier, n’a pas freiné la frénésie des
acheteurs algériens. En janvier 2009, les ventes ont progressé de près de
50%. Selon l’AC2A (Association des concessionnaires d’automobile algériens),
les constructeurs européens continuent à se placer en haut du podium des
ventes en dépit de la concurrence acharnée des constructeurs asiatiques.

Le groupe Renault arrive en tête avec une augmentation de ses ventes de 30%
par rapport à la même période en 2008, talonné par Peugeot Algérie (49%).
L’année 2008 a été celle des records en matière d’importation de véhicules
malgré la crise. Les concessionnaires et les particuliers ont importé
352.315 nouveaux véhicules (tous segments confondus), d’une valeur globale
de plus de 4 milliards de dollars (plus de 286 milliards de dinars
algériens), soit une hausse de 49,42%. Une hausse que certains ont du mal à
expliquer. A quelle logique obéit alors l’évolution du marché de
l’automobile en Algérie ?

Pour le président de l’AC2A, Mohamed Baïri, interrogé par un confrère de la
presse algérienne, «La voiture est chez nous, aujourd’hui, une nécessité et
non un caprice d’enfant gâté. Un besoin que les clients algériens expriment
de plus en plus fortement pour faire face à leurs exigences de mobilité
personnelle, familiale ou professionnelle. Le seul moyen fiable pour
transporter dignement sa famille devant la défaillance criante du secteur
des transports en commun censé prendre en charge correctement les
aspirations de la population dans toutes les régions du pays».

A propos de l’augmentation inattendue des prix des voitures, M. Bairi estime
que «ces augmentations sont la conséquence logique de la dépréciation du
dinar par rapport aux devises étrangères et qui s’apparente plus à une
dévaluation de notre monnaie nationale qui ne dit pas son nom. Néanmoins,
les représentants des différentes marques tentent de maintenir leurs tarifs
à la hauteur des attentes des clients à travers des remises et autres
opérations de promotions dont la presse se fait l’écho d’une manière
régulière».

Invité à donner son avis sur les menaces à peine voilées des pouvoirs
publics à durcir encore davantage les conditions d’accès à la voiture, notre
interlocuteur affirme que «les autorités se trompent de cible. Ce n’est pas
le secteur de l’automobile qui consomme le gros du budget des importations.
C’est au contraire une activité qui crée de la richesse et de l’emploi, et
qui est en train de défricher le terrain à une future industrie automobile.
Et il ne faut surtout pas perdre de vue que 40% des ventes globales
réalisées chez nous sont au profit de l’Etat et de ses nombreux organismes
et entreprises. Il est donc mal venu de continuer à pénaliser à tort le
client qui n’hésite pas à s’endetter pour disposer d’un véhicule, dont le
prix ne dépasse pas, dans la majorité des cas, les 1.000.000 DA ou de
décourager les rares efforts d’investissement».