Tunisie : Ras Jebel, capitale du”jean”

Il s’agit d’une petite ville andalouse, à une bonne heure de route au nord
de Tunis, une bourgade tranquille, à vocation agricole, prospère, entourée
de plaines fertiles, au bord de la Méditerranée, nommée, à juste titre,
depuis deux décennies, «Lee Cooperville», en raison des lettres rouges
annonçant Perspex Lee Cooper à l’entrée de la ville, de la concentration,
dans la région, d’un grand nombre de confectionneurs, d’écoles privées de
couture et de toute une industrie textile off shore au point que des postes
de douane ont été installés sur place afin de renforcer et de conforter une
infrastructure, tournée résolument vers l’avenir.

«A mon arrivée à Ras Jebel, il ya maintenant vingt ans, les femmes du coin
se couvraient généralement de la tête au pied, s’adonnaient, surtout chez
elles, au travail artisanal d’inspiration locale et excellaient dans l’art
de la broderie», nous confie M. Fethi Labidi, Directeur Général des
entreprises «WIC wash lavadry», spécialisées dans la fabrication des jeans
et leur lavage, situées à mi-chemin entre Metline et Ras Jebel. Il met,
également, l’accent sur l’attractivité du site, le goût du labeur et de
l’effort chez les habitants de la région dont les mœurs et les habitudes ont
subi une véritable métamorphose avec l’arrivée massive d’un patronat
cosmopolite et d’une main-d’œuvre, venus de tous les coins du pays.

Après avoir fait le tour, avec notre interlocuteur, des différents
compartiments de l’usine et de ses gigantesques machines à laver
industrielles, celui-ci évoque pour nous l’odyssée du «Jean», objet de
consommation incontournable dans les principaux centres marchands de la
planète, filé, tissé, anobli, délavé en Tunisie, pour être expédié, par
bateau, vers les étagères des magasins de mode en Europe et vendu à des prix
astronomiques à une clientèle habituée à garnir la garde-robe à chaque début
de saison.

Inventé à la fin du XIXème siècle par Levi Strauss, un Américain d’origine
allemande, le «Jean», fabriqué au début à partir d’une toile tissée à Nîmes
(d’où son nom de baptême : Denim), n’a rien perdu de sa superbe ou pris un
pli, d’après les statistiques de l’Institut français de la mode (IFM), qui
souligne l’écoulement de 90 millions d’unités dans l’Hexagone, l’année
dernière (2008) et l’engouement de plus en plus manifeste des Français pour
les grandes marques, symboles d’élégance et de distinction sociale.