USA : la crise des prêts dépasse le “subprime” et menace le système financier

 
 
photo_1206096637397-1-1.jpg
Ben Bernanke, président de la Réserve fédérale américaine le 14 mars 2008 à Washington (Photo : Brendan Smialowski)

[21/03/2008 12:24:05] WASHINGTON (AFP)
La crise
immobilière américaine, jusqu’ici relativement
circonscrite aux prêts les plus risqués, dits
“subprime”, s’étend aujourd’hui progressivement
à d’autres catégories de prêts, menaçant
par ricochet les marchés financiers de nouveaux déboires.

“Le niveau élevé des défauts de
remboursement et des saisies immobilières n’est pas
limité au +subprime+”, a affirmé, la semaine
dernière, le président de la Réserve
fédérale américaine (Fed), Ben Bernanke.

L’agence de notation Standard and Poor’s a indiqué jeudi
que le taux de défaut sur les prêts dits
“Alt-A”, catégorie située entre le
“subprime” (risqué) et le “prime” (peu
risqué), était en forte hausse en février.

L’attribution de ces prêts “Alt-A” est
essentiellement basée sur l’historique du foyer en
matière de paiements et de remboursements. Son examen
ne doit pas révéler d’incident de paiement,
condition qui n’est pas requise pour le “subprime”.

Mais il s’agit souvent là de la seule condition majeure
d’obtention du prêt, l’emprunteur n’ayant pas à
fournir d’informations concernant ses revenus.

D’après l’agence Fitch, le montant des prêts
“Alt-A” émis entre 2005 et 2007 dépasse
600 milliards de dollars.

Le décalage entre l’augmentation des impayés entre
le “subprime”, constatée il y a plus d’un an,
et le “Alt-A”, qui commence juste à prendre de
l’ampleur, s’explique d’abord par le fait que ce dernier a
été émis massivement jusqu’en 2007, soit plus
tard que le “subprime”.

Selon Standard and Poor’s, le taux de défaut sur les
prêts “Alt-A” titrisés en 2007 a atteint
10% en février, en hausse de 14% par rapport à janvier.

L’autre facteur de l’effet retard par rapport au
“subprime” vient de la structure de ces prêts.
Ils permettent souvent de fixer de faibles mensualités
durant les premiers mois ou les premières années.

Mais une règle fait que, lorsque la différence
entre le montant restant à rembourser et le prix
estimé du bien dépasse un certain seuil, les
remboursements sont immédiatement revus à la hausse.

Les faibles remboursements initiaux n’ayant pas
empêché le montant encore dû de gonfler et
les prix de l’immobilier ayant tendance à baisser
actuellement, de plus en plus de foyers sont concernés.

“Cela peut représenter un bond de plusieurs
centaines de dollars. Pour une famille modeste, c’est
beaucoup d’argent”, explique Mark Adelson, du cabinet
Adelson and Jacob Consulting.

Tout comme ce fut le cas pour le “subprime”, la
détérioration du marché du “Alt-A”
est, par ricochet, en train de se transmettre aux
marchés financiers.

Le 6 mars, l’agence Fitch a notamment placé 160
milliards de dollars de titres adossés aux prêts
“Alt-A” sous surveillance négative, ce qui
implique qu’elle envisage de les dégrader.

En cas d’abaissement de notation de ces titres, les banques
qui en détiennent encore en portefeuille seraient
contraintes de passer de nouvelles dépréciations d’actifs.

“Il y a une possibilité raisonnable” que la
dégradation du marché des “Alt-A”
déclenche une nouvelle vague de
dépréciations, estime M. Adelson.

photo_1206097109775-1-1.jpg
Les bureaux de la banque Bear Stearns à New York le 17 mars 2008 (Photo : Michael Nagle)

L’abaissement massif de
notation par Moody’s sur des titres adossés au
“Alt-A” et détenus par la banque Bear Stearns,
le 10 mars, est bien l’un des facteurs qui a mené
à sa perte.

Annoncée mercredi, la décision de l’autorité
de régulation des deux géants américains du
refinancement hypothécaire, Fannie Mae et Freddie Mac,
de leur permettre de garantir davantage de prêts,
pourrait offrir une respiration aux “Alt-A”.

“Ils ont une marge de manoeuvre, mais ils ne sont pas
stupides. Ce sont désormais des sociétés
privées et leur mission n’est pas de faire perdre de
l’argent à leurs actionnaires”, tempère
néanmoins M. Adelson.

 21/03/2008 12:24:05 – © 2008 AFP