Au Salon du livre, l’édition fait sa révolution numérique

 
 
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Un livre et un e-book nommé “Kindle”, en novembre 2007

[18/03/2008 12:43:58] PARIS (AFP)
La
numérisation du livre, passée de l’artisanat
à l’ère industrielle, va entraîner un
bouleversement des modes de lecture et du monde de
l’édition, selon les professionnels réunis au
Salon du livre à Paris.

“C’est assez inévitable que le livre
numérique emporte la bataille sur le livre
papier, un peu comme le kleenex a gagné la
bataille contre le mouchoir”, résume,
un brin provocateur, le sociologue Serge Tisseron.

Le basculement a même commencé, avec la
numérisation de masse d’ouvrages initiée en France
par la Bibliothèque nationale (BNF) et la mobilisation
des principales maisons d’édition, résolues à
rattraper leur retard sur les grands groupes anglo-saxons.

“Le numérique fait partie de nos
priorités. Ca ne va pas être simple,
mais on n’aura pas le choix”, reconnaît
Stéphanie van Duin, directrice du
développement d’Hachette livre, l’un des
principaux acteurs du secteur.

Les nouveaux supports de lecture, e-readers,
tablettes e-book, légers, maniables,
permettent désormais une lecture dans des
conditions acceptables d’ouvrages
numérisés, même si des progrès restent
à faire vers une meilleure qualité ou une plus
grande rapidité d’affichage des pages.

Des secteurs entiers ont déjà fait leur
mue. Premier touché, celui des
encyclopédies, pour des raisons
évidentes de poids et d’encombrement, dont des
titres vedettes, comme Universalis où même le
Quid, ont renoncé au papier au profit de version
numérisées disponibles sur internet.

L’édition scientifique, médicale,
juridique, propose également de plus en
plus de contenus numérisés: des
ouvrages pratiques, destinés à
être consultés pour un usage professionnel,
plutôt que lus dans leur intégralité.

“Il faut s’attendre à une forte progression
du numérique dans les années qui
viennent, d’autant qu’il y a une demande
très forte de l’Education nationale”,
souligne le président du Syndicat national
de l’édition, Serge Eyrolles.

La numérisation des manuels scolaires est
inévitable “ne serait-ce que pour le poids des
cartables”, fait valoir M. Tisseron et les nouvelles
générations seront familiarisées dès le
départ avec les supports numériques.

Pour l’édition, c’est un énorme travail
à conduire. “Le numérique, c’est
cher”, souligne Mme van Duin. “Ca
demande de la part des éditeurs un travail
d’adaptation. Les investissements, les
équipements, sont chers”, ajoute-t-elle.

En France, le secteur a jusqu’à présent
été préservé par le prix unique du
livre, qui n’existe pas sur internet. Les éditeurs
réfléchissent donc avec les pouvoirs publics
à “un nouveau mode économique”, une
rémunération sous forme d’abonnement, de ventes
à la page, à l’unité, qui permette à
chacun d’être payé pour son travail. Parce que
“si c’est gratuit, ça tue la création
littéraire”, note M. Eyrolles.

Si les professionnels sont d’accord pour
considérer que le e-book cohabitera
longtemps avec le papier – qui résistera
notamment pour une lecture de détente – le
numérique induira forcément de nouveaux comportements.

Auteur de “Virtuel mon amour, Penser, aimer,
souffrir à l’ère des nouvelles
technologies” (Albin Michel), M. Tisseron
évoque “une nouvelle façon de
penser”, “une pensée
copiée-collée”, par fragments, avec un livre
numérique où l’on n’a jamais qu’une seule page
affichée sur son écran.

Tout comme le numérique modifiera les
capacités d’attention ou de
mémorisation des lecteurs de demain.

 18/03/2008 12:43:58 – © 2008 AFP