Le fonds d’investissement public chinois voit le jour

 
 
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Un Chinois avec des yuans à Pékin le 30 août 2007 (Photo : Teh Eng Koon)

[29/09/2007 10:25:15] PEKIN (AFP) Annoncé en début d’année, attendu avec inquiétude parfois à l’étranger, le fonds souverain chinois chargé de faire fructifier une petite partie des vastes réserves de change du géant asiatique, les premières au monde, est officiellement entré en service samedi.

Baptisée en anglais China Investment Corp (CIC), cette société publique d’investissement, qui sera présidée par Lou Jiwei, un ancien vice-ministre des Finances, démarre avec un capital jugé plutôt modeste : 200 milliards de dollars.

Cette somme qui ne représente en effet qu’entre le sixième et le septième des réserves de change chinoises, ne la propulse pas à la tête des fonds similaires existant dans le monde, encore dominés par quelques Etats exportateurs de pétrole, mais elle devrait cependant se placer dans les 4-5 premiers rangs, selon des analystes.

“La société fonctionnera de manière indépendante et sur la base de principes commerciaux”, a indiqué le communiqué diffusé à l’occasion de la cérémonie d’inauguration à Pékin.

En reconnaissant avoir procédé à pas mal d’approximations, vu l’opacité du secteur, les économistes de Morgan Stanley avaient estimé en mai que l’ensemble des SWF (Sovereign Wealth Funds) existant totalisait quelque 2.500 milliards de dollars.

La banque d’affaires américaine avait aussi souligné que “les exportateurs non pétroliers asiatiques devenaient désormais aussi importants” que les exportateurs d'”or noir”.

Témoin : la Chine. L’atelier de la planète dont les excédents commerciaux naviguent de record en record était fin juin à la tête d’un pactole de 1.332,6 milliards de dollars de réserves de change, grâce à ces performances.

Ces réserves sont aujourd’hui majoritairement composées d’actifs en dollars (70% selon des estimations), et notamment en bons du trésor américain, placements sûrs mais à la rentabilité limitée. La Chine en était le deuxième détenteur au monde après le Japon fin juillet, avec 407,8 milliards de dollars de titres américains.

Au moment où l’économie américaine traverse des turbulences et le billet vert s’affaiblit, les autorités chinoises cherchent non seulement “à augmenter la rentabilité de leurs réserves mais aussi à les abriter contre d’éventuelles fluctuations du dollar”, souligne l’économiste française du CEPII Françoise Lemoine.

Pékin a donc chargé la CIC de diversifier ses investissements en s’inspirant de quelques expériences réussies à l’étranger, comme par exemple celle du GIC (Governement of Singapore Investment Corp), fondé en 1981 pour investir les réserves de change de Singapour, gérant aujourd’hui plus de 100 milliards de dollars d’actifs dans plus de 40 pays.

La CIC devrait donc se tourner vers “les bons d’autres Etats, des actions, des matières stratégiques, de la technologie”, prédit He Fan, un économiste de l’Académie des sciences sociales.

“Elle devrait favoriser les placements en actions, et notamment un certain nombre de petites prises de participations de l’ordre de 1 ou 2%, loin des presque 10% de Blackstone”, estime de son côté Sun Mingchun de Lehman Brothers.

Le fonds d’investissement américain Blackstone, l’un des plus puissants au monde, a représenté le premier investissement du fonds chinois, avant même sa création officielle.

Il a aussi marqué un tournant dans la façon dont le géant asiatique gère ses réserves de change, les fonds d’investissement anglo-saxons, qui multiplient les achats d’entreprises dans le monde entier, offrant actuellement les rendements parmi les plus intéressants sur le marché (même si l’action Blackstone à peine introduite cet été a chuté).

Soucieuse de ne pas effrayer, la Chine a aussi pris soin de n’en acquérir qu’une participation minoritaire et sans droit de vote.

Via la CIC, “à long terme la Chine va procéder à des achats à travers toute la planète (…) si les questions économiques se politisent, elle va se heurter à des problèmes”, souligne He Fan.

D’où peut-être une volonté de ne pas occuper le devant de la scène : plutôt que de procéder à des investissements directs, la société devrait s’en remettre à des gestionnaires de fonds extérieurs.

“Si les Américains sont inquiets (de la création de ce fonds), c’est parce qu’ils sont encore englués dans une mentalité de Guerre froide”, estime pour sa part Zhang Taowei, professeur de finances à l’université Tsinghua de Pékin.

 29/09/2007 10:25:15 – © 2007 AFP