OMC : tir de barrage de la France pour défendre ses agriculteurs

 
 
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Le commissaire au Commerce, Peter Mandelson, négociateur de l’UE à l’OMC, Peter Mandelson, à Bruxelles, le 6 décembre 2006 (Photo : Gérard Cerles)

[05/03/2007 16:42:53] PARIS (AFP) La France est remontée au créneau pour défendre bec et ongles ses agriculteurs, qui craignent d’être “sacrifiés” dans les pourparlers en cours à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et réclament le soutien des candidats à la présidentielle.

La première banderille a été placée samedi par le président Jacques Chirac.

Alors que les principaux acteurs de l’OMC tenaient des conciliabules à Londres, le chef de l’Etat a profité d’une visite au Salon de l’agriculture pour se déclarer “profondément choqué par certaines attitudes” du commissaire au Commerce, Peter Mandelson, négociateur de l’Union européenne à l’OMC.

Ce dernier “ne cesse de vouloir donner davantage alors qu’en contrepartie les Américains n’ont manifesté aucune intention de faire les moindres concessions sur le plan agricole”, ni “les pays émergents sur l’industrie et les services”, a accusé M. Chirac.

“L’agriculture n’a pas vocation à être la variable d’ajustement des négociations”, a renchéri lundi le Premier ministre Dominique de Villepin, lui aussi en visite au Salon.

Car à l’OMC, c’est du donnant-donnant: s’ils veulent pouvoir exporter plus librement leurs produits et services vers les pays en développement, les pays riches — Europe et Etats-Unis en tête — doivent de leur côté accepter de réduire leurs subventions et droits de douanes sur les produits agricoles.

Tout le jeu des négociations, qui tentent actuellement d’émerger d’un sommeil de plusieurs mois, est de savoir dans quelles proportions.

La France, première puissance agricole de l’Europe et de loin le premier bénéficiaire des subventions, a martelé sa position à de multiples reprises: aucune concession ne doit remettre en cause la Politique agricole commune (PAC), considérée comme une “ligne rouge”.

Ce point de vue est partagé par certains pays européens mais pas par tous, et Paris soupçonne Peter Mandelson d’être prêt à “brader” les intérêts du monde agricole afin d’obtenir coûte que coûte un accord multilatéral.

“On est prêt à nous sacrifier dans cette affaire”, réaffirmait la semaine dernière Jean-Michel Lemétayer, le président de la FNSEA, le principal syndicat agricole français.

Cette poussée de fièvre en France intervient dans une période “particulièrement sensible”, estime Philippe Chalmin, professeur à Dauphine.

Les pays de l’OMC n’ont en effet plus que quelques semaines pour boucler un accord, avant l’expiration des pouvoirs de négociation octroyés par le Congrès américain à l’administration Bush.

En cas d’échec, “les négociations ne reprendraient qu’en 2009”, après les élections présidentielles aux Etats-Unis, souligne M. Chalmin.

Face à cette pression, “Peter Mandelson est prêt à tout céder pour avoir un accord”, critique cet économiste, pour qui l’Europe “ne doit rien lâcher parce que les Américains ne lâcheront rien”.

Le contexte électoral en France vient encore compliquer la donne.

“Ce serait de mauvaise politique que de se mettre à dos les agriculteurs ou leurs proches dans une période comme celle-là”, relève Lionel Fontagné, du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII).

Mais “la position française n’est pas juste une position frileuse sur l’agriculture, c’est aussi une demande forte d’avancées dans les domaines industriels et de services qui mérite d’être vraiment considérée”, juge-t-il.

Inquiète, la FNSEA, a demandé aux deux principaux candidats à l’élection présidentielle –Nicolas Sarkozy (UMP) et Ségolène Royal (PS)–, pour l’heure silencieux, de s’exprimer clairement sur le sujet.

 05/03/2007 16:42:53 – © 2007 AFP