Les entreprises françaises entrent à reculons dans l’ère du travail mobile

 
 
SGE.LLR56.141106100811.photo00.quicklook.default-167x245.jpg
Une femme surfe sur internet (Photo : Seyllou )

[14/11/2006 10:17:39] PARIS (AFP) Les entreprises françaises entrent avec réticence dans l’ère du télétravail, freinées par des raisons souvent culturelles en dépit des gisements de productivité offerts par ce nouveau mode d’organisation.

En France, les télétravailleurs représentent seulement 7% de la population active, contre une moyenne de 13% en Europe, selon un rapport sur le sujet remis la semaine dernière au Premier ministre par le député Pierre Morel-A-L’Huissier (UMP).

Pourtant, à l’heure où les nouvelles technologies facilitent toujours plus la mobilité, le télétravail permet aux entreprises de réaliser d’importants gains de productivité et de réduire leurs coûts tout en donnant satisfaction aux salariés, s’accordent à dire les spécialistes du travail à distance.

Souvent vanté pour les avancées qu’il offre sur le plan social ou environnemental, ou encore de la revitalisation rurale, le télétravail est avant tout une opportunité sur le plan économique, soutient Nicole Turbé-Suetens, consultante du cabinet Distance-Expert.

Selon elle, le gain de productivité d’un télétravailleur salarié varie entre 10% et 30%. “L’amélioration vient du fait qu’il s’agit de conditions de travail choisies et non subies”, souligne-t-elle.

Si aujourd’hui seulement 2% des salariés pratiquent en France le télétravail à domicile et 5% le télétravail “nomade”, c’est essentiellement en raison d’obstacles culturels, relèvent les spécialistes.

En France, “les supérieurs hiérarchiques aiment bien contrôler ce qui se fait et donc avoir les gens sous les yeux”, souligne notamment Matthieu Billette de Villemeur, auteur de plusieurs ouvrages.

Dans l’Hexagone, ce sont des entreprises américaines comme Hewlett-Packard (HP), IBM ou Cisco Systems, qui, en innovant en matière de travail à distance, lui ont ouvert la voie.

Ainsi, IBM compte en France sept “espaces de proximité” délocalisés, mis en place à partir de 1998, offrant des bureaux en libre service aux 66% de “collaborateurs mobiles”.

De son côté, HP veut aller “au-delà du télétravail, en développant la transformation des espaces de travail” grâce au concept de mobilité.

La stratégie d’optimisation des actifs immobiliers vise à “réduire d’un tiers (les) coûts en la matière”, selon le directeur des ressources humaines de HP France, Pierre-Yves Tilly. Ainsi, 85% des salariés ont un ordinateur portable avec accès sécurisé à l’intranet et il n’est plus nécessaire que chacun ait son bureau attitré, a-t-il expliqué.

En outre, deux tiers des cadres de HP en France ont recours occasionnellement au travail à domicile mais il faut veiller à ne pas devenir un “électron libre”, souligne M. Tilly. “On tient à garder le lien avec l’entreprise”.

Le groupe français Alcatel a développé largement le télétravail en Belgique, où près de 60% des salariés utilisent régulièrement cette possibilité. Le gain de productivité est réel et provient essentiellement du temps gagné sur les transports, selon un porte-parole du groupe. En France en revanche, le télétravail en est encore à un stade expérimental, malgré une demande interne forte des salariés d’Alcatel.

“Si la France ne fait pas évoluer ses modes d’organisation du travail avec ses salariés et les partenaires sociaux, elle risque de prendre du retard sur le plan de la compétitivité”, prévient à cet égard Mme Turbé-Suetens.

 14/11/2006 10:17:39 – © 2006 AFP