Turquie : appels au boycott des marques françaises, le gouvernement tempère

 
 
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Manifestation à Istanbul appelant au boycott des produits français après le vote d’une proposition de loi sur le génocide arménien, le 8 octobre 2006 (Photo : Bulent Ki)

[14/10/2006 11:07:15] ANKARA (AFP) Le vote par les députés français d’une proposition de loi punissant la négation du génocide arménien a suscité en Turquie de multiples appels au boycott des produits français, tandis que le gouvernement restait muet sur la riposte commerciale qu’il envisage d’exécuter.

L’Union des consommateurs de Turquie a annoncé vendredi un boycott des produits français au lendemain de l’adoption par l’Assemblée nationale française du texte controversé qui prévoit la prison et une forte amende pour quiconque qui nierait le génocide arménien de 1915, sous l’empire ottoman.

Ankara reconnaît qu’un grand nombre d’Arméniens ont été tués dans des combats et des expulsions de masse au début du XXe siècle, mais récuse catégoriquement l’appelation de génocide.

L’association de défense des consommateurs a indiqué qu’elle s’en prendrait d’abord aux produits pétroliers de Total qui dispose de 500 stations-essence en Turquie et comptait présenter chaque semaine un appel au boycottage des produits d’une nouvelle entreprise française et ceci jusqu’au retrait de la proposition de loi ou l’annulation du texte.

“A partir d’aujourd’hui, chaque semaine nous allons boycotter une marque française et montrer notre réaction dans un langage que la France peut comprendre”, a lancé le président de l’Union Bülent Deniz.

A Istanbul, dans certains centres commerciaux, les magasins appelaient les Turcs à ne pas acheter les biens français mais les ventes au magasin Lacoste allaient toutefois bon train.

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Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, le 13 octobre 2006 à Ankara (Photo : STR)

En 2005, les échanges entre la France et la Turquie ont atteint plus de huit milliards d’euros. Les importations françaises en Turquie ont représenté 4,7 mds d’euros.

L’Union des commerçants d’Ankara a décidé d’indiquer sur des panneaux d’affichage dans la capitale les produits français qui seront boudés par les clients, notamment les parfums et la cosmétique, a indiqué son président Mehmet Yiginer.

A travers la Turquie, des unions de commerce et d’hommes d’affaires ont exhorté leurs concitoyens à ne pas acheter les marques françaises.

Le gouvernement turc qui a annoncé jeudi par la voix de son ministre des Affaires étrangères Abdullah Gül qu’il mettrait en oeuvre “d’une manière sérieuse et pondéré toutes les mesures considérées” contre la France est resté muet sur les détails de son arme commercial.

De l’avis général, l’exclusion des sociétés françaises de plusieurs gros contrats publics comme l’armement et l’énergie semble la manière la plus appropriée pour représenter la colère d’Ankara.

Tout comme la presse libérale, le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a tenté de calmer l’ire des Turcs et ne pas lancer dans une campagne, qui finalement, en raison de l’interactivité des économies nuirait plus aux Turcs qu’aux Français.

“Qu’allons-nous gagner ou perdre à boycotter des produits? (…) Nous devrions considérer cela avec beaucoup de précaution”, a dit vendredi M. Erdogan en précisant que son gouvernement procèderait “avec calme”.

Quelque 250 entreprises françaises font depuis de longues années des affaires en Turquie comme le géant automobile Renault qui a une usine à Bursa (nord-ouest).

Un drapeau turc géant a été hissé sur le complexe jeudi pour montrer que cette marque bien française emploie essentiellement des ouvriers turcs.

Le directeur d’Alcatel en Turquie, Lütfü Yenel, s’est dit “stupéfait” d’être considéré comme français alors que ses 330 employés sont tous Turcs. “La France ne dispose que d’une part de 10% dans notre entreprise” a-t-il dit au journal Vatan.

Des initiatives plus personnelles ont aussi été signalées: Süleyman Saribas, un député conservateur a demandé au Parlement de lui échanger sa Peugeot officiel pour une autre marque, affirmant avoir “honte de circuler dans une voiture française”.

 14/10/2006 11:07:15 – © 2006 AFP