Arcelor pris à son propre piège avec son chevalier blanc russe Severstal

 
 
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Le PDG de Severstal, Alexeï Mordachov, le 27 mai 2006 à Moscou (Photo : Yuri Kadobnov)

[26/06/2006 05:33:22] PARIS (AFP) Le géant européen de l’acier Arcelor, qui va fusionner avec son rival Mittal Steel, s’est pris à son propre piège en faisant monter les enchères pour ses actionnaires grâce à sa proposition de mariage avec le russe Severstal, censée contrer l’OPA hostile de Mittal.

Tentant de se justifier, une source proche du sidérurgiste européen a argué dimanche que “si Arcelor n’était pas allé chercher Severstal, Mittal n’aurait jamais amélioré sa proposition”. “L’offre de mariage de Mittal correspond au modèle d’Arcelor”, a assuré cette source.

Avant de faire spectaculairement volte-face dimanche, Arcelor avait farouchement repoussé pendant cinq mois toutes les avances de son concurrent, allant jusqu’à appeler à la rescousse un chevalier blanc, le sidérurgiste russe Severstal.

Mais ces fiançailles russo-européennes annoncées en grande pompe le 26 mai ont déclenché la fronde d’une partie des actionnaires d’Arcelor, réfractaires à l’irruption d’un oligarque russe mal connu, le milliardaire Alexeï Mordachov, patron de Severstal. Une hostilité, mâtinée de russophobie, que la direction d’Arcelor a mal anticipée, reconnaît-on chez le sidérurgiste européen.

Pourtant, Severstal avait multiplié les gestes pour tenter de rassurer les marchés, révisant ses prétentions à la baisse avec une prise de participation réduite à 25% du capital d’Arcelor contre 32% initialement prévu. Severstal, partenaire de longue date d’Arcelor, avait même invité la semaine dernière en Russie des actionnaires sceptiques.

Rien n’y a fait. Des actionnaires d’Arcelor ont réussi à faire s’effondrer un pan entier de la défense anti-Mittal. Ils ont attaqué Arcelor en justice et poussé le groupe sidérurgique à annuler une assemblée générale qui aurait eu pour effet de faire de M. Mordachov l’actionnaire de référence du groupe européen.

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(de GàD) Le PDG de Severstal Alexeï Mordachov, le président du conseil d’Arcelor Joseph Kinch et le PDG d’Arcelor Guy Dollé, le 26 mai 2006 à Luxembourg (Photo : Stéphane de Sakutin)

Mais les dirigeants d’Arcelor ont joué “un jeu double” depuis la mi-juin, a expliqué une source proche du dossier. Pour tenter de se réconcilier avec ses actionnaires, Arcelor a poussé pour établir un contrat de mariage plus présentable avec Severstal et a simultanément amorcé le 13 juin des négociations secrètes à “très haut niveau” avec son rival Mittal Steel.

Arcelor a quelque 85% de son capital en Bourse. Au départ, le groupe franco-hispano-luxembourgeois laissait entendre que ses discussions avec son ennemi juré Mittal Steel permettraient de donner des gages aux actionnaires et de relâcher ainsi un peu la pression. Officiellement, le sidérurgiste basé au Luxembourg continuait de soutenir mordicus son mariage avec Severstal.

Mais les négociations entre Mittal et Arcelor se sont clairement accélérées en fin de semaine dernière, ont indiqué dimanche des sources proches des deux sidérurgistes. Constatant l’échec de son alliance avec Severstal, et déterminé à faire monter les enchères, Arcelor escomptait depuis lors un nouveau renchérissement de la proposition de Mittal, déjà relevée une première fois à la mi-mai à plus de 25 milliards d’euros. En face, Lakshmi Mittal faisait savoir jeudi et vendredi à sa cible Arcelor qu’il était prêt à “aller jusqu’au bout” pour emporter le morceau.

L’offre d’achat améliorée faite par Mittal à 40,40 euros, constitue un quasi doublement du prix de l’action Arcelor par rapport à la veille de l’annonce de l’OPA hostile le 27 janvier. Une résistance somme toute payante pour les actionnaires.

Severstal s’est dit dimanche soir “très surpris” d’avoir été éconduit et n’a pas exclu de modifier une nouvelle fois sa proposition de mariage avec Arcelor.

 26/06/2006 05:33:22 – © 2006 AFP