La fusion entre Tunisie Leasing et Amen Lease sera une affaire gagnant-gagnant

Par : Autres

La fusion entre Tunisie Leasing et Amen Lease sera une affaire
gagnant-gagnant

 

abdelkefi_01062005.jpgDans le cadre de l’annonce de la fusion entre Tunisie Leasing et Amen Lease,
ainsi que de leur prise de participation dans le capital de la société
algérienne de leasing, Maghreb Leasing, Webmanagercenter a voulu savoir plus
sur les tenants et aboutissants de ces deux affaires. Dans l’entretien qui
suit, M. Ahmed Abdelkafi, le P-DG de Tunisie Leasing, nous apporte quelques
éclaircissements.

Parlez-nous du secteur leasing en Tunisie

Aujourd’hui, je puis dire que le leasing est une activité mature, mais loin
de penser que c’est une activité saturée et qui n’a plus d’avenir, ou au
plus un avenir réduit. Il faut savoir que le du leasing est un secteur très
diversifié qui tourne autour d’un certain nombre de produits basiques, mais
il y a de plus en plus de nouveaux produits qui se créent. De ce point de
vue, je pense que c’est un secteur qui continuera à offrir des opportunités
de croissance. Pour vous donner un exemple, pour le premier trimestre 2005,
nous avons (Tunisie leasing) eu une croissance à deux chiffres par rapport
au premier trimestre 2004 ; c’es un rebond remarquable.

A quoi est dû ce bond ?

Beaucoup de choses expliquent cette croissance. D’abord, parce que les
véhicules ont été beaucoup mieux approvisionnés cette année que les années
précédentes, il y a eu l’intervention d’un nouvel acteur (Ford) qui a
alimenté le marché, ce qui a créé une forte compétition, mais c’est dû aussi
au fait que dans le secteur des services où nous sommes très présents il y a
eu une croissance et une reprise. C’est donc la combinaison de ces facteurs
qui explique cette remarquable croissance de notre activité.

D’après les dernières notations de
Maghreb Rating, l’activité de leasing a bénéficié déjà en 2004 de la reprise
générale de l’activité économique qui est estimé à 15%. Peut-on espérer que
cela va persévérer ?

C’est tout à fait exact. En fait, nous avons eu deux années de reprises :
une bonne année 2004 pendant laquelle nous, en tant que société, avons
consolidé, en étant plus sélectif, plus prudent ; autrement dit, nous
n’avons pas progressé (contrairement à 2003 où nous avions progressé alors
que tout le secteur avait régressé).

Qu’entendez-vous par «être plus
sélectif, être plus prudent» ?

Nous avons été sélectifs, notamment au niveau du choix des dossiers, parce
que dans ce métier, aujourd’hui, il est fondamental d’avoir un pied sur
l’accélérateur et l’autre sur le frein. D’ailleurs, tout le rôle du
financier c’est essentiellement de choisir entre le bon grain de l’ivraie.
Donc notre société a beaucoup investi dans le crédit scoring, dans la
fidélisation des bons clients, etc.

De la croissance pour la croissance c’est facile en matière de crédit. Pour
résumer, je dirai que nous avons progressé à contre courant du marché en
2003, stagné en 2004 et rebondi en 2005. Cela ne veut pas dire qu’on prend
la décision de rebondir ou non, mais nous avons mis en place tous les
ingrédients et nous attendons le marché.

Est-ce qu’on pourrait dire que 2004
a été une année d’apurement des comptes de Tunisie Leasing ?

Non, pas du tout. Vous savez, Tunisie Leasing n’a pas eu de problèmes de
nettoyage en 2004 ; en fait, nous avons nettoyé pendant dix ans. C’est vrai
que quand on était tout seul sur le marché, nous étions un peu plus relaxes
; mais quand on est devenu dix, il fallait mettre les moyens parce que le
client pouvait ne pas venir chez nous et aller voir d’autres. D’ailleurs la
compétition nous a fait du bien puisqu’elle nous a obligés à introduire les
instruments de suivi, de p crédit scoring, et aujourd’hui nous avons un call
center qui est un instrument ultra moderne de recouvrement. Vous savez, dans
le leasing, si le client ne paie pas sa mensualité à la date et à l’heure,
si vous ne l’appelez pas il s’habitue à ne pas vous payer… Il y a un
problème de suivi, de gestion, d’organisation ; et je puis vous dire que
nous sommes organisés de telle façon qu’aujourd’hui que nous sommes payés à
80% à première présentation de la facture. En 2004, nous avons obtenu 99% de
recouvrement de nos créances ordinaires.

Ceci signifie que Tunisie Leasing est une société dont les états financiers
sont parfaitement clairs, qui entame aujourd’hui une nouvelle phase de
croissance.

Vu la taille du marché tunisien,
est-ce qu’il n’y aurait pas trop de sociétés de leasing ?

Ce n’est sûrement pas moi qui vous dirai le contraire. Cependant, je dois
vous avouer que la concurrence nous a fait du bien, au client, mais aussi à
tout le marché parce qu’elle a engendré le benchmarking, stimulant du coup
la bonne gestion et l’amélioration des entreprises du secteur… Sans oublier
l’aide du marché financier qui nous a permis d’améliorer, de désintermédier
notre dette, c’est-à-dire que nous nous sommes émancipés du crédit bancaire
en quelque sorte, nous sommes devenus autonomes en accédant directement aux
sources de financement.

Vous disiez tout à l’heure que le
leasing n’a pas utilisé tout son potentiel…

Vous savez que le leasing revêt plusieurs formes : il y a le leasing
financier (celui que nous faisons), le leasing opérationnel, la LLD
(location à longue durée) que nous venons d’introduire en Tunisie.
Aujourd’hui, 30% des immatriculations des voitures professionnelles en
Europe sont faites par la LLD ; et on voit la LLD intervenir de plus en plus
chez les particuliers notamment dans les PME. Il y a également le leasing
immobilier qui doit être développé, car dans ce domaine très peu de choses
ont été faites, nous espérons faire comme l’ont fait certains pays du
Sud-est asiatique en créant des usines à l’avance afin de favoriser la
délocalisation. En somme, beaucoup de secteurs n’ont pas encore été touchés,
notamment le secteur public.

Est-ce qu’il est possible aujourd’hui de travailler avec les ménages ?

Il s’agit là d’un autre métier, le crédit à la consommation destiné aux
ménages. Dans tous les pays du monde se développe de plus en plus ce qu’on
appelle le consumer credit, c’est-à-dire le crédit destiné aux ménages.
Aujourd’hui nous travaillons avec l’entrepreneur particulier (entreprise de
bâtiment, commerce…), à condition que ce soit un bien d’équipement stricto
sensu ; quand il s’agit de voiture, de téléviseur, de réfrigérateur, de
machine à laver, etc., ça devient un bien de consommation durable. Au Maroc,
il existe une dizaine de sociétés spécialisées dans le crédit à la
consommation. Pour l’heure, en Tunisie seules les banques peuvent et même
sont encouragées à le faire. Pour notre part, nous avons demandé un agrément
pour pouvoir le faire.

 

C’est en tout cas un besoin pour le pays de développer ce produit, d’autant
plus que c’est la seule manière d’éviter deux types de problèmes : le
développement de l’usurier, et le second problème, c’est le crédit
désorganisé fourni par le distributeur. Si nous obtenons l’autorisation du
crédit à la consommation, nous donnons le crédit à notre client qui sera
libre d’acheter là où il veut, ce qui va lui permettre d’obtenir le meilleur
prix chez le commerçant de son choix; par contre, si le marché reste tel
qu’il est aujourd’hui en Tunisie, c’est-à-dire laisser au commerçant la
latitude de fixer le prix, il a tendance à appliquer des taux prohibitifs au
client final en faisant jouer le prix de la vente. Par exemple, si vous
achetez cash un réfrigérateur, vous bénéficiez d’une réduction de 15%, mais
si c’est au crédit, vous ne bénéficiez pas de ces 15% et qui vont s’ajouter
au taux nominalement autorisé. Officiellement, c’est réglementé mais en
pratique il est facile de démontrer que ce n’est pas appliqué.

Venons en maintenant à la question
de la fusion avec Amen.

Je suis ravi que vous vous intéressiez à cette question, que vous écriviez
sur ce sujet à l’intention de vos lecteurs. Ceci dit, tout ce que je peux
vous dire, pour le moment, c’est que le conseil d’administration de Tunisie
Leasing a approuvé le principe, il n’y a pas encore eu d’engagement
définitif qui ne sera pris que par l’assemblée extraordinaire. Nous avons
été approchés pour examiner cette affaire et nous avons donné notre accord
de principe. Mathématiquement, c’est une affaire gagnant-gagnant, dans la
mesure où le Groupe Amen clarifie ses structures et peut développer des
synergies et de nouveaux produits ; et gagnant pour Tunisie Leasing
elle-même parce qu’elle augmente sa base (340 MDT) et son PNB sans augmenter
proportionnellement ses charges, donc nous améliorons notre coefficient
d’exploitation.

Donc, je suis convaincu que, si nous faisons cette fusion, dans les
conditions souhaitées par Tunisie Leasing et Amen, ce sera une affaire
gagnant-gagnant.

Vous dites que l’affaire n’est pas
encore conclue, mais on remarque par ailleurs que pour votre déploiement à
l’international, notamment votre participation dans le capital d’Algérie
Leasing, vous faites comme si c’était déjà réalisé parce que c’est Amen et
Tunisie Leasing qui détiendraient 51% du capital de cette société.

Il faut savoir que sans la fusion, le Groupe Amen détient déjà 49% de notre
capital, et nous sommes des partenaires depuis 20 ans ; cette affaire est
née parce que nous voulons être majoritaires en Algérie d’autant plus par
ailleurs nous n’avions pas la capacité de mettre sur la balance 51% des 16
MDT du capital de Maghreb leasing. Tout ceci pour dire que l’affaire
algérienne a précédé cette annonce de la volonté de fusionner Tunisie
Leasing et Amen Lease.

Alors à quand interviendra-t-elle
cette prise de participation dans le capital de Maghreb Leasing?

Merci à vous de me donner la possibilité de communiquer sur notre
déploiement à l’international, et notamment en Algérie. Nous attendons début
juin la réunion de la Commission de la monnaie et du crédit qui existe dans
le cadre de la Banque d’Algérie ; ce conseil a déjà examiné notre dossier,
nous a convoqués à Alger pour répondre à un certain nombre de points que le
secrétaire général de ce conseil nous a posés. En tout cas, nous sommes très
optimistes, et si nous avons l’agrément de la Banque centrale d’Algérie,
nous espérons signer notre premier contrat d’ici à la fin de l’année.
D’ailleurs nous avons déjà des équipes de plusieurs cadres (à Alger et à
Tunis) qui travaillent là-dessus. La nouvelle société s’appellera Maghreb
Leasing dont les actionnaires sont Tunisie Leasing (31%) et Amen Group
(20%), et nous avons avec nous PROPARCO, FMO, Maghreb Fund CFAO et une
société algérienne d’assurance la CIAR.

Il faut dire que le marché algérien recèle des promesses extraordinaires,
avec le développement fulgurant des PME suite à une vaste opération de repli
du secteur public engagée par les autorités algériennes dans plusieurs
secteurs (bâtiment et matériaux de construction, industrie agroalimentaire…)
; des entreprises émergent de partout et le secteur bancaire n’est pas
encore en mesure de suivre le rythme.

On imagine que le leasing n’est pas
bien développé en Algérie…

Il n’existe qu’une seule société, l’Arab Leasing Company qui est dans le
giron d’ABC et qui marche bien.

Revenons sur la fusion pour savoir
davantage sur l’état d’avancement des études d’évaluation.

Je ne vous cache pas, nous sommes en retard, nous attendons le rapport des
évaluateurs au mois de juin suite à cela, nous allons actualiser notre
calendrier. L’équipe d’évaluation, qui travaille actuellement en rapport
avec nos commissaires aux comptes respectifs, est composée des personnes
indépendantes. C’est un travail difficile, puisqu’il faut évaluer tous les
biens hypothéqués (une centaine d’évaluations à faire).

Il y a 3-4 ans le leasing finançait
l’acquisition de biens mobiliers et immobiliers à hauteur de 100%,
aujourd’hui on exige un autofinancement de 30%. Est-ce une anticipation de
la baisse des valeurs du marché mobilier ou pour pallier à l’augmentation
des impayés ?

Ecoutez, il s’agit d’une bonne gestion du risque, nous appelons cela «
ticket modérateur». Au début nous faisions du crédit auto sans
autofinancement. La règle que nous avons instituée –et que tout le marché a
suivie-, c’est 15% ; à moins que vous soyez un triple A, tunisien bien sûr,
personne aujourd’hui ne vous fait du leasing si vous ne payez pas 15% ; cela
a beaucoup amélioré nos produits, permet aux gens de ne pas rêver.
Toutefois, on ne l’applique pas à une société dont les états financiers sont
superbes, solides… Après tout, c’est un réducteur d’incertitude, une
attitude de prudence et non une analyse futuriste défavorable du marché.
Nous voulons que les gens qui s’engagent à acheter ne soient pas induits en
erreur par les facilités que donnerait le leasing à 100%.

 

Propos recueillis par


Hechmi Ammar
et

Tallel Bahoury

 

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– 06 – 2005 :: 06:00  –  ©webmanagercenter