Lotfi Abdennadher, la liste des 127 et la bourse !

Par : Autres

Lotfi Abdennadher, la
liste des 127 et la bourse !

Interview réalisée par Khaled BOUMIZA

 

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46 ans, Monsieur Lotfi Abdennadher est à la tête d’un groupe de 12
entreprises en voie de devenir un holding générant un chiffre d’affaires de
180 MDT et employant 1500 salariés. Autodidacte, il quitte à 17 ans les
bancs de l’école pour un cabinet d’expertise à Djerba, où il acquiert les
premières règles élémentaires du monde des affaires et il apprendra vite.
Moins de dix ans après, il s’installe à Gremda – SFAX en tant que commerçant
dans le secteur des matériaux de construction. En 1988 il créé la SOTEX et
exporte déjà sur l’Europe et la Libye. Le monde de l’industrie, il y
rentrera à la faveur d’une reprise d’une petite unité de céramique à Menzel
Hayet et ainsi SOMOCER est née. Depuis, d’autres entreprises ont vu le jour
telles que l’ABC, AGROMED (Mamie nova), et AGRIMED. On notera au passage
l’entrée de SOMOCER à la bourse, et bientôt le tour de SANIMED ! Il ne
pourra cependant pas nier, que c’est un autre événement, hors du domaine des
affaires, qui contribuera à le faire connaître du grand public. Cet
événement, c’est sa présidence du Club Sportif Sfaxien. Le sport a marqué le
personnage, surtout dans le domaine de la communication et du faire play,
c’est ainsi qu’il répondra à toutes nos questions. De ses engagements
financiers, aux dettes et endettement de son groupe, sans chercher à éluder
la question sur la liste des 127. Mais il parlera aussi de la bourse et du
programme qu’il prépare à ce propos. Il y a au moins un intermédiaire qui va
être heureux !

Interview.

Ne ressentez-vous pas un certain attentisme chez
l’investisseur Tunisien ? Et si oui, pourquoi ?


Evidemment, il y a en effet un certain attentisme, lié surtout à
la conjoncture Internationale. Cependant les prémices de l’année 2004 sont,
heureusement, de bonne augure, et nous rendent confiants. L’avenir est
maintenant lié à l’exportation, notamment dans les créneaux et les services
à valeur ajoutée où la jeunesse doit investir et créer des entreprises pour
l’exportation. Il n’en demeure pas moins que cette reprise reste encore
fragile cela ne doit pas nous empêcher d’être combatif, audacieux et prendre
des risques mesurés, en vue de décrocher les marchés et les projets pour
pérenniser nos acquis.
 

Et dans votre secteur d’activité qui est
l’agroalimentaire ? On sait par exemple qu’une de vos entreprises dans le
secteur, en l’occurrence AGROMED, ne va pas très fort et qu’elle est

déficitaire ! 2004
sera-t-elle celle de la reprise ?


A ce sujet, il y a lieu de vous faire remarquer que le pessimisme
et le défaitisme n’ont pas de sens dans mon lexique des affaires ni de place
dans mon esprit professionnel du fait de mon tempérament et de mon optimisme
car pour AGROMED, il y a, en effet reprise. Notre chiffre d’affaires pour
les 4 premiers mois 2004, a en effet doublé par rapport à celui de la même
période 2003. Reste le problème de l’achat du lait qui se fait à un prix
supérieur de 40 millimes le litre, par rapport à son prix de vente. A ceci
il faut ajouter la hausse du prix de l’emballage, sous l’effet de l’euro et
la stagnation, depuis au moins 3 ans du prix de vente au public. 2004
devrait se terminer avec une compression des pertes, mais on est loin de
réaliser des bénéfices et c’est déjà une performance non négligeable pour
les raisons que je viens d’évoquer. D’ailleurs dans cette activité, tout le
monde est entrain de perdre de l’argent. Espérons que le gouvernement
prendra, dans les meilleurs délais, les mesures nécessaires pour que cela
change.

Tout le monde n’est tout de même pas comme AGROMED!
D’autres marques prospèrent et font des bénéfices ! Pourquoi pas vous ?

Je m’interdis de faire des comparaisons pour plusieurs raisons. Toutefois je
me limite à énumérer des arguments solides tels que le prix d’achat du lait,
son prix de revient avec un unique fabricant d’emballage sur la place et son
prix de vente fixé par les autorités. Le prix de vente d’un litre de lait au
grossiste est de 666 millimes, pour un prix d’achat du litre de 440 millimes
avec 140 millimes l’emballage, auxquels il faut ajouter les 2% de perte de
lait et les frais de conditionnement. Avec tout cela, le litre de lait nous
coûte 40 millimes plus cher que son prix de vente au public, malgré les 20
millimes de subvention par litre. Ceux qui réalisent des bénéfices, le font
dans des activités connexes à l’activité de production de lait.

Quel est le lien entre AGROMED et la SFBT ?

La SFBT est entrée dans le secteur pour l’améliorer à tous les niveaux. Pour
nous, on travaille en sous-traitance pour la SFBT et traitons une bonne
partie de leur production sur nos sites d’El Amra ou BELDI pour la SEABG.
Réellement, c’est un partenariat stratégique.
 

Dans le GROUPE ABDENNADHER, à part SOMOCER dont la situation semble se
stabiliser, le reste des sociétés, comme l’ABC et d’autres semblent souffrir
du poids de la dette et ne pas aller très bien. Où est la réalité de l’intox
dans tout cela ? Comment pouvez-vous nous peindre l’état du groupe ?

Les sociétés dont les activités sont orientées vers l’exportation n’ont pas
de problème. C’est le cas par exemple de SOMOCER qui réalise des bénéfices
malgré la mauvaise conjoncture. C’est le cas aussi d’AGRIMED qui exporte 90%
de sa production. ABC est passée par une période difficile, mais elle
devrait terminer 2004 bénéficiaire. L’ETABLISSEMENT
ABDENNADHER, une société commerciale, l’est aussi tout comme SANIMED qui est
entrain de faire une extension. Le groupe a choisi des secteurs d’activités
où l’exportation est difficile, mais à forte valeur ajoutée et c’est
pourquoi nous continuons à investir.
 

Quel est l’état de l’endettement du Groupe ?
 

L’état d’endettement du groupe reste justifié par le volume d’affaires
réalisé par le groupe, néanmoins nous oeuvrons sans relâche à multiplier les
efforts pour de meilleures performances.
 

Le montant affiché dans la « fameuse liste des 127 », vous place pourtant
à un niveau plus important !
 

Il faut faire la différence entre endettement et engagements bancaires. Des
opérations comme les lettres de crédits pour des opérations d’export ou des
traites avalisées pour des opérations de ventes, sont considérées comme
tels. Cela ne devient, à mon sens inquiétant, que lorsque le chiffre
d’affaires et les résultats ne suivent pas. Pour 2004, le groupe Abdennadher
compte réaliser au terme de cette année un chiffre d’affaires total de 220
MDT dont 100 MDT à l’export. En ce qui concerne l’engagement du groupe, nous
sommes confiants et persuadés qu’il n’y a pas de dérapage d’endettement et
donc pas de risque pour les entreprises du groupe. A cela, il faut ajouter
nos efforts pour ramener des capitaux de l’étranger, comme ceux de l’AIG
pour AGROMED, le Groupe Italien LA FAENZA et AL MAL AL KUWAITI pour SOMOCER
et le Groupe Italien GSI pour SANIMED. Nous sommes persuadés que notre
réussite est la preuve de la bonne santé financière du groupe.
 

Avez-vous été gêné par la sortie de votre nom sur cette liste justement ?
 

Aucunement cela ne m’inquiète pas, si Monsieur tout le monde, comprend que
le montant indiqué comme étant une somme d’engagements et s’il comprend que
ce que nous gagnons est le fruit de notre travail et que c’est en créant des
richesses que nous rendons service à l’économie du pays tout entier. Nous
sommes des industriels et créons de la valeur ajoutée dans un pays où il n’y
a pas de fuite de capitaux, ni trop d’entreprises qui font faillite, mais
des hommes d’affaires dynamiques qui prennent des risques et investissent
pour relever les défis du développement de leur pays.

Ce qui m’inquiète par contre, c’est la mauvaise utilisation qui peut être
faite de cette liste, et cela, je l’ai senti lorsqu’il m’est arrivé d’être
exclu de certains marchés à l’export sur la foi de rumeurs concernant la
santé financière du groupe. Avec tous les avantages que nous accorde l’Etat,
on est pour l’information et on joue la transparence.
 

Avez-vous remarqué un changement de comportement, de la part de votre
banquier et du secteur bancaire en général, suite à la sortie de cette liste
?
 

Je n’ai jamais eu cette impression, ni de la part du secteur bancaire, ni de
la BCT dont j’estime et j’apprécie beaucoup par ailleurs le travail en
matière de crédit, un coup de vis qui est arrivé à temps et dont les
résultats ont été favorables pour l’économie du pays.
 

Comment jugez-vous, au moins à partir de votre propre expérience, la
relation banque et entreprise ? Estimez-vous que les banques sont capables
d’accompagner l’entreprise en Tunisie, de lui être d’un bon conseil
financier et de bien la financer ?

Il faut d’abord rappeler que c’est le secteur bancaire qui a financé et créé
le tissu industriel tunisien. Il n’en demeure pas moins qu’en période de
crise, les banques ont des contraintes et leurs marges de manœuvre se
trouvent réduites, mais je reste convaincu que cela changera avec la reprise
 

ABDENNADHER a-t-il jamais regretté de faire entrer une de ses entreprises
à la bourse ?
 

Bien au contraire ! Cela, pour la simple raison que lorsqu’on investit, on
crée l’entreprise pour les autres et non pour soi. Personnellement, je crois
que l’industrie tunisienne ne peut être financée que par la bourse et c’est
cette institution qui peut faire bouger le marché financier. Ce qui est
arrivé à certaines entreprises et qui a, en quelque sorte fait du tort aux
petits porteurs, n’est à mon sens qu’un accident de parcours et je pense que
2004 sera l’année du sursaut de la bourse et 2005 devrait marquer le retour
de vitalité et de rentabilité à la bourse de Tunis et j’appelle de tous mes
vœux une plus grande présence de nos entreprises à s’y engager.
 

Pourquoi vous n’y faites alors pas entrer plus d’une entreprise de votre
groupe ?
 

Nous y travaillons et précisément pour AGROMED. Après la restructuration
dont elle fait actuellement l’objet, nous espérons que dans 3 années au
plus, selon les engagements pris avec l’AIG, elle devrait y être. D’autres
entreprises, tels que AGRIMED qui devrait réaliser cette année un chiffre
d’affaires de 60 MDT. Sanimed aussi devrait entrer dans les prochaines
années en bourse. Cela, devrait nous permettre de mieux gérer le financement
de nos entreprises et de travailler dans la transparence la plus complète.
Nous espérons pour cela, pouvoir être accompagnés par des investisseurs
confiants en l’avenir de l’Economie Tunisienne.
 

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