Le poids de la dette d’Electrostar

Par : Autres


Le poids de la dette d’Electrostar

Par

Khaled Boumiza
 


logoelectro.gifLa dernière notation, sollicitée et abaissée, d’Electrostar, a été publiée
avec l’accord de la direction de cette entreprise cotée en bourse. Elle met
surtout en exergue le poids de la dette, surtout court terme, qui pourrait
constituer une menace sur les perspectives de développement de cette société
à 68% entreprise familiale. Alors que la question de l’endettement des
groupes Tunisiens est à l’étude, ni l’équipe de M.Fethi Hachicha, ni les
principales banques de ce groupe n’ont souhaité commenter la baisse de
notation.

 

Le 10 novembre 2003 Maghreb Rating, décide d’abaisser les notes attribuées à
la société Electrostar, à BB (tun) pour la note long terme avec perspective
d’évolution Négative et B (tun) pour la note court terme. MR motivait cette
décision par la persistance d’un niveau d’endettement très élevé ainsi que
par l’implication d’Electrostar dans le plan de sauvetage de la Société BATAM (notée D(tun)).

Il faut rappeler que la note BB (tun) signifie une qualité de crédit,
relativement faible par rapport aux autres entités émettrices ou émissions
dans le pays.
Cela signifie aussi et surtout, selon l’échelle de
notation de l’agence, une capacité, relativement incertaine, à honorer en
temps et en heure les engagements financiers contractés. Une capacité plus
vulnérable à une évolution défavorable des conditions économiques ou
d’exploitation
!

Contactées, ni la direction générale, ni la principale banque du groupe
n’ont voulu répondre à notre demande de réaction, de leur part, à la
notation de Maghreb Rating. On sait seulement que cette notation,
sollicitée par la société en question, n’a pu être publiée qu’avec l’accord
de la direction générale d’Electrostar.

Dettes
et gros besoins en fonds

Le 9 août 2002, la même agence avait pourtant attribué à Electrostar des
notes plutôt positives : un BBB (tun) pour la note long terme et un F3 (tun)
pour la note court terme. Ces notes étaient en plus assorties d’une
perspective d’évolution stable, fondées sur la position de leader de la
société dans un marché, de surcroît présentant un bon potentiel de
croissance, selon MR, sur la forte notoriété acquise par la marque LG en
Tunisie et la bonne image de ses produits et enfin sur la stratégie qu’elle
est en train d’implémenter.

Cependant, l’agence de notation avait alors fait remarquer que ces notes
sont contraintes par l’importance des besoins en fonds de roulement de la
société et de son endettement dans un contexte de resserrement du crédit
bancaire, par une exposition accrue au risque de crédit sur sa clientèle et
à plus long terme par de possibles impacts négatifs découlant des accords de
libre échange conclu entre la Tunisie et l’Union Européenne. Entre 2001 et 2002, le montant de la dette nette a
finit par augmenter et les chiffres des premiers six mois de cette année
reconduisent le même mouvement à la hausse.

En 2002, en effet, la dette nette passe de 20,8 MDT à 24,9 MDT. Ce chiffre,
représente plus de 143% du capital corporel, en nette augmentation après les
120% de l’année 2001, tel que le rapporte l’agence de notation à partir d’informations de la société. Et si le montant de cette dette
avait donné, en 2001, l’impression de diminuer, cela est dû à une
augmentation du capital de 7,5 MDT. Pour 2003, les choses ne s’annoncent pas
meilleures. Pour les premiers six mois de cette année, le total de
la dette ajustée (la dette bilan + les engagements hors bilan) est de 38,5 MDT, dont 12 MDT en court terme et l’agence de notation reste réservée quant
à la capacité de la société de faire moins, pour la fin 2003.

 

Entre court, long et moyen terme, cette dette n’avait pas,
depuis 1997, arrêté d’augmenter. Le total de la dette ajustée a certes
baissé de 2,3 MDT. Mais c’était juste un effet d’écriture. La baisse est
principalement due au remplacement du financement par billets de trésorerie
et par escompte d’effets, par du financement bancaire court terme.

En face de tout cela, il y a un chiffre d’affaires qui revient de 47,9 MDT à
42,1 MDT en 2002. Pour cette année 2003, il devrait être, selon Electrostar,
entre 25 et 30 MDT. A fin juin, il était de 14,3 MDT. Les prévisions
de ventes sont, également, revues à la baisse et passent de 60 MDT à 42 MDT
seulement pour cette année. Electrostar revoit même ses prévisions pour les
années 2004 et 2005.

Vendre
avec des remises pour avoir du cash

A ce problème d’endettement, s’ajoutent des besoins croissants en fonds de
roulement. Cela poussera Electrostar à faire «des
promos» pour récolter du cash. L’idée est inspirée
d’une première tentative faite en 2002. Cette année, là Electrostar avait
réussi à augmenter de 6% le pourcentage de ses ventes au comptant, grâce
essentiellement à des ventes au comptant à un client irakien. En 2003, Electrostar met en place «un système de remise encourageant les règlements
rapides».

 

Elle réussit ainsi à augmenter la proportion de ses ventes au comptant qui
atteindront les 15% des ventes totales. Ceci lui a permis de faire baisser les
délais de règlement clients de 260 jours à 180 jours en moyenne en 2002.
Cela lui a aussi surtout permis d’avoir du cash. Par ailleurs, comme le
précise Maghreb Rating, les retards de paiement de ses clients se sont multipliés (pour
culminer, à fin 2002, à 6 MD dont 3,5 MD sur BATAM) et ont nécessité la
constitution d’une provision de 1 million de dinars.

Maghreb Rating reste tout de même confiante, quant à la liquidité de l’entreprise du
groupe Hachicha. Pour 2003, «Electrostar prévoit de ne pas dépasser ses
autorisations de crédit bancaire soit un total 20 MDT de dette à court terme
et d’engagement par signature. Elle convertira une partie de sa dette à
court terme
(notamment celle contractée en début d’année pour financer sa
participation au capital de BATAM) en un crédit à long terme de 9,3 MDT
accordé par la BIAT, et de 2,9 MDT sur trois ans accordé par la Citibank
.
Electrostar a aussi intégré deux nouvelles banques étatiques dans son
pool bancaire, la STB et la BNA
». Maghreb Rating estime donc que «l’étroite
relation qui existe entre MHG et la BIAT
(MHG est membre du directoire de la
BIAT) devrait continuer à sécuriser l’accès d’Electrostar aux financements
bancaires
». L’agence de notation relativisera cependant plus loin cette
appréciation, en ajoutant qu’elle «reste préoccupée par le niveau
d’endettement très élevé d’Electrostar ainsi que par sa dépendance du
crédit bancaire court terme
».


Le poids de Batam

Electrostar pâtirait aussi du poids de l’affaire Batam.
En 2002, les graves difficultés de Héla BATAM, ont touché de plein fouet les
ventes d’ Electrostar et même ses équilibres financiers. La facture Batam se
montera ainsi à 6 MDT. De cette somme, nous précise Maghreb Rating, 54 mille DT ont été
passés par pertes et profits et ont déjà fait l’objet d’une provision en
2002. 1,86 MDT ont été payés au comptant les 09 Décembre 2002 et 31 Mars
2003; 3,24MDT ont été convertis en participation dans le capital de BATAM.
Les 0,5 MDT restants seront réglés sur les 12 mois à venir.

 

A la suite de ces événements, Electrostar se retrouvera avec deux nouvelles
prises de participation, parfois avec des représentants de produits
concurrents, chez Bonprix et Batam. Des participations qui lui ouvrent
peut-être de nouveaux débouchés d’écoulement de ses produits, mais avec un
concurrent direct pour certains de ses produits comme les climatiseurs, les
réfrigérateurs et les machines à laver, dont essentiellement Samsung et Arçelik que représente
M.Atef Ben Slimane, autre sociétaire des même Bonprix
et Batam.

L’entreprise de M. Fethi Hachicha a certes aussi gagné, par cette entrée chez
Batam, le contrôle d’un large réseau de distribution pour ses produits. il
n’en demeure pas moins, comme le souligne l’agence de
notation, que le redressement de Batam sera une oeuvre de longue haleine et
dont le coût pour Electrostar pourrait se révéler élevé à moyen terme.
 
LG
n’entrerait pas dans le capital ?

Note importante dans ce communiqué de l’agence de notation, lorsqu’elle
précise que « Du point de vue de Maghreb Rating,
l’entrée de LGE au capital d’ Electrostar est devenue très hypothétique

». L’appréciation est basée sur un travail d’investigation de Maghreb Rating et une
réponse évasive de LG qui a été contactée par l’agence de notation .

Le 16 septembre 2002, la société Electrostar informait ses
actionnaires que la firme coréenne LG Electronics était en train d’évaluer
l’opportunité d’entrer au capital de la société Electrostar et d’en faire
une base commerciale et industrielle pour son développement sur l’ensemble
de l’Afrique du Nord.

La société avait aussi promis de porter à la connaissance du public toute
information complémentaire concernant tout éventuel accord qui pourrait
intervenir entre la société Electrostar et LG Electronics dans les semaines
à venir. Plus d’une année après, aucune information n’était donnée à ce
sujet. Il n’en demeure pas moins vrai qu’Electrostar avait enregistrée, suite à cette annonce,
quelques succès sur la cote de la BVMT Entre le 13 septembre 2002, où l’action était cotée à 6,5 DT et le 30 du même
mois, l’action Electrostar a gagné quelque 2 DT. Dès le 18 septembre 2002
elle montait en effet à 7,1 DT, pour culminer à fin septembre à 8,68 DT.

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Sans directement remettre en cause les perspectives de la société, l’agence
estime que certains développements observés en 2002 et 2003 à savoir : la
non-implication d’ Electrostar dans la distribution des téléphones portables
LGE en Tunisie (il s’agit en fait de tout le créneau de la téléphonie dont
la vente a été confiée à la société TTE) ainsi que le fait qu’elle ne soit
pas autorisée à vendre en Libye qu’à travers le distributeur local désigné par LGE, contredisent l’intention déclarée dans un passé récent de faire de
Electrostar la tête de pont régionale de LGE.
 

Entre
information et démenti

Le 3 novembre 2003, un communiqué de Presse de la société Electrostar
démentait une information de presse faisant état d’un possible rapprochement
entre l’entreprise et la société Eletrokallel, une entreprise
commerciale spécialisée dans la vente par facilités des produits
électroménager. On y lit notamment que « Suite à l’évocation par un
journal de la place de pourparlers entre les Groupes Hachicha et Atef Ben
Slimane avec Electro Kallel pour un rapprochement entre les trois groupes
pouvant se traduire par un rachat en partie des actions d’Electro Kallel, la
société Electrostar tient à préciser que cette information est dénuée de
tout fondement. Aucun rachat et aucune prise de participation au capital,
même partielle ne sont envisagés
».

 

 

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-12 – 2003 à 07 :00