Tunisie : La réforme bancaire, mode d’emploi

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bct-tunisie-2013.jpg“Nous sommes déterminés à rattraper le temps perdu, tant avant qu’après le 14 janvier 2011. En étroite collaboration avec tous nos partenaires“. C’est en gros le message adressé par le gouvernement aux bailleurs de fonds internationaux, le 18 juin dernier, lors de la «conférence des partenaires» dédiée à la présentation des «nouvelles orientations stratégiques de l’intervention publique dans le financement de l’économie».

Rattraper le temps perdu, car, comme l’a souligné Hakim Ben Hammouda, ministre de l’Economie et des Finances, le dossier de l’intervention de l’Etat dans le secteur bancaire ne date pas d’aujourd’hui. «Les réformes attendues pour renforcer les banques ont toujours été présentes dans le débat public, mais peu a été fait». D’où la décision de l’actuel gouvernement de «traiter ce dossier de manière énergique» pour mettre en exécution les cinq axes de la réforme (restructuration des grandes banques publiques, création de l’Asset Management Company –AMC- qui doit reprendre les créances classées de ces banques, transformation et renforcement de la Caisse des Dépôts et Consignation –CDC- pour en faire le bras financier de l’Etat, rénovation de la BFPME et développement de la microfinance).

Le timing de ce chantier n’est pas fortuit. Les Tunisiens étant bien lancés, selon le mot de Chedly Ayari, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), pour «se doter d’un nouveau contexte politique qui nous a fait défaut pendant trois ans», et ayant entamé la préparation «des grandes lignes du nouveau modèle de développement», le pays doit se donner les moyens, sur le plan économique, de retrouver une croissance économique «forte, durable, inclusive, et solidaire». Car, «sans croissance économique, aucune démocratie ne pourra survivre».

Pour retrouver la croissance, «il faut produire, et pour produire, il faut investir, donc trouver de l’argent et, par conséquent, réformer le secteur bancaire». «Nous nous sommes donné jusqu’en 2017 pour phaser ce processus au bout duquel nous aurons un nouveau système grâce à un travail collectif, y compris avec les bailleurs de fonds», souligne le gouverneur de la BCT. Un système financier qui «réponde aux besoins divers de l’économie tunisienne, avec toute la panoplie» de produits et services qu’un tel système doit offrir à l’économie d’un pays. «Un système dans lequel l’Etat n’aura plus le même rôle que par le passé. Il sera un Etat facilitateur et non plus un Etat banquier», précise le gouverneur.

C’est donc parti. «Il y aura des difficultés, mais ce sera irréversible», assure M. Ayari. Dans le système à venir, «on n’aura plus également la confrontation public#privé. Il y aura une synergie entre les deux secteurs, mais il faudra inventer le modèle».

Ce chantier doit «ouvrir le système bancaire tunisien sur la modernité». Et pour ce faire, il faudra instaurer une «gouvernance moderne, c’est-à-dire décider de la manière de nommer un président, des organes à mettre en place». Surtout, estime le gouverneur de la BCT, il va falloir apprendre à «sanctionner les réussites et les échecs, car il ne doit pas y avoir de situation de rente dans le secteur bancaire».

Cela impose de «passer par un processus d’assainissement». A ce sujet, Chedly Ayari affirme que le gouvernement a opté pour «une approche évolutive». «Il n’y aura pas de Bing bang».

Enfin, «il ne faut pas que le projet soit imposé mais vendu à l’ensemble de la société qui doit se l’approprier».