Tunisie – Médias : A quoi sert –vraiment- la HAICA?

L’«avis conforme» donné par la HAICA concernant les deux nouveaux patrons de
l’audiovisuel public tunisien était-il vraiment le bon? Difficile à répondre par
un oui lorsqu’on connaît le profil des deux hommes. Et l’étape qu’ils devront
gérer, celle des élections. Dans des structures connues pour ne pas être
toujours «malléables».

Une erreur de casting. De nombreux professionnels ne sont pas loin de qualifier
ainsi les récentes nominations à la tête de l’audiovisuel public tunisien.
D’abord, celle de Mustapha Beltaief, le 16 juin 2014, comme PDG de la TT
(Télévision Tunisienne), relatif à la liberté de communication audiovisuelle, et
d’Abderrazek Tabib, le 30 juin 2014, comme PDG de la RT (Radio Tunisienne).

S’ils ne sont pas tout à fait des inconnus du PMT (Paysage Médiatique Tunisien)
-le premier a collaboré à la rédaction du décret-loi n° 116 du 2 novembre 2011,
et le second a été correspondant de la chaîne France 24 à Tunis-, ils n’ont pas,
force est de le constater, le profil nécessaire pour diriger les deux plus
importants médias tunisiens.

Tous deux n’ont jamais, d’abord, dirigé des médias. Ils n’ont pas, ensuite, une
expérience professionnelle dans le secteur où ils opèrent actuellement: la
télévision pour Mustapha Beltaief et la radio pour Abderrazek Tabib. Donc une
connaissance des techniques et des hommes. Une connaissance qui ne peut être
acquise que sur le terrain et pendant de longues années.

Il faut du reste observer le profil des personnes nommées un peu partout dans le
monde à des fonctions de ce type pour se rendre effectivement compte que
rarement des nominations se font en dehors du cercle des professionnels des
secteurs concernés et que rarement les nominations oublient de prendre en ligne
de compte la capacité des hommes à pouvoir gérer les dossiers. Une compétence
largement –répétons-le- en rapport avec l’expérience acquise et le rayonnement
professionnel et pas seulement les diplômes.

La HAICA responsable

Cela prend, par ailleurs, un caractère particulier avec l’importance que revêt
l’étape actuelle. Certes, les deux nouveaux PDG ne sont pas seuls dans cette
bataille et disposent de toute une logistique, ils devront cependant réussir à
gérer convenablement les élections de l’automne 2014. Donc à rectifier souvent
des tirs, à choisir les hommes ou encore à anticiper des difficultés et à les
gérer au quotidien. Donc à peser sur des décisions qui ne peuvent qu’être
importantes.

Au fait en fonction de quels savoir et savoir-faire pourront-ils s’essayer à ces
exercices?

En tout état de cause, la HAICA, qui a un «avis conforme» concernant la
nomination des premiers responsables de l’audiovisuel public (art. 19 du
décret-loi 116), est tout à fait responsable de cette erreur de casting.

Des idées d’ordre général et de grandes recommandations

Force est de constater, primo, que la HAICA ne compte à proprement parler qu’un
seul ou à la limite deux professionnels ayant touché à proprement parler à
l’audiovisuel. La HAICA n’a pas eu, secundo, selon toute vraisemblance, les
moyens de donner un «avis conforme» en bonne et due forme.

Celui-ci s’est fait à partir des CV des intéressés et de leurs déclarations
d’intention lors des auditions conduites avec plus moins de professionnalisme.
Il est à se demander d’ailleurs qu’est-ce que pouvaient dire les candidats d’une
manière générale lorsqu’on connaît leur profil. Sinon des idées d’ordre général
et de grandes recommandations. Comme «améliorer le contenu», «fédérer les
énergies», «développer la formation»… Des promesses qui remplissent, depuis des
années, les différents rapports sur l’audiovisuel tunisien.

A-t-on interrogé les candidats sur la refonte des organigrammes, sur les
changements à introduire au niveau de la programmation, sur les achats de
matériels pour les tournages en studios ou à l’extérieur, sur les décors
virtuels, sur les directives de la réalisation, sur les modes de diffusion, sur
la gestion des coûts des programmes…? Difficile à imaginer lorsqu’on connaît les
profils et des deux heureux élus et de leurs interrogateurs.

De toute manière, les échos qui parviennent de la TT et de la RT disent bien que
nos deux hommes donnent l’impression, pour le moment du moins, de patauger