Sapin et Montebourg contraints de gérer des réformes économiques déjà ficelées

c14bd2e8125095034fe27812c12ae8395ac5f473.jpg
ée le 21 janvier 2014 (Photo : Kenzo Tribouillard)

[02/04/2014 15:21:02] Paris (AFP) Pacte de responsabilité, réduction de 50 milliards des dépenses, réforme fiscale: les nouveaux patrons de Bercy, Michel Sapin et Arnaud Montebourg, auront la charge de gérer un tournant économique du quinquennat dont les contours n’ont pas été tracés par eux.

“Le pacte de responsabilité est prêt”, a assuré le président de la République François Hollande lundi, en annonçant avoir nommé Manuel Valls, Premier ministre.

Depuis trois mois qu’elle a été exposée, débattue, et négociée avec les partenaires sociaux, cette mesure phare de son quinquennat qui vise à réduire de 30 milliards d’euros les cotisations patronales en échange d’embauches, va donc tomber entièrement ficelée dans les mains des deux hommes.

Situation étonnante pour des ministres prenant à peine possession de leurs nouveaux portefeuilles que de ne pas avoir à mener ni négociations ni arbitrages sur des mesures qu’ils seront néanmoins amenés à défendre devant le Parlement et l’opinion publique.

D’autant plus que le président Hollande a engagé la responsabilité du gouvernement devant la représentation nationale sur son pacte.

bf5fb56aa102d820c85ed5f0982d3799498bcbe9.jpg
à Matignon (Photo : Patrick Kovarik)

Difficile de croire en outre que le détail des 50 milliards d’économies sur la dépense publique, une tâche présentée comme inédite, n’a pas déjà été bouclé par l’ancien titulaire du Budget, Bernard Cazeneuve, passé au ministère de l’Intérieur, et le ministre sortant de l’Economie et des Finances, Pierre Moscovici.

Les groupes de travail réunis dans le cadre des assises de la fiscalité des entreprises et des ménages ont également achevé leurs travaux fin mars.

– Des arbitrages sur une baisse des impôts –

La “remise à plat” complète du système fiscal voulue par l’ancien ministre Jean-Marc Ayrault devait donner lieu à une baisse des impôts pour les entreprises et, dans une moindre mesure pour les ménages. Les arbitrages devaient être rendus par le gouvernement début avril.

Or l’exposé des données précises de ces trois réformes ne peut plus tarder, alors que l’exécutif avait déjà été critiqué pour l’avoir repoussé après les municipales. Elles sont en effet partie intégrante du texte budgétaire que le nouveau gouvernement doit présenter dans moins de quinze jours.

Chaque pays de la zone euro doit remettre en avril la trajectoire de ses finances publiques pour les trois prochaines années. C’est la deuxième année que Paris se plie à l’exercice.

Economies dans la dépense, coup de pouce aux entreprises et réformes fiscales sont au coeur de la politique économique social-démocrate que le président Hollande a réaffirmée lundi, faisant le choix de garder le même cap tout en desserrant l’étau du redressement des comptes publics pour privilégier le retour de la croissance.

Le nouveau texte budgétaire doit être présenté à la mi-avril au Parlement pour être adressé avant la fin du mois à Bruxelles. C’est à sa lumière que la Commission européenne décidera ou non d’accorder un nouveau délai à Paris pour ramener son déficit public sous la barre des 3% du produit intérieur brut.

Bien sûr, l’ancien ministre de l’Emploi qui a déjà occupé les fonctions de ministre de l’Economie et des Finances il y a plus de 20 ans, Michel Sapin, sait de quoi il va parler. D’autant qu’il a été associé aux discussions, notamment sur la réduction des dépenses publiques, et qu’il a négocié plusieurs réformes difficiles avec patronat et syndicats.

Mais il n’en est pas de même pour Arnaud Montebourg. C’est Pierre Moscovici qui avait en charge le financement des entreprises et c’est lui, avec Jérôme Cahuzac puis Bernard Cazeneuve, qui a créé puis mené à bien le crédit d’impôt emploi compétitivité (CICE), première étape de la baisse de cotisation pour les entreprises (20 milliards).

Sans compter que la répartition des rôles entre les deux hommes, dont l’un est ministre des Finances et l’autre de l’Economie reste floue, d’autant plus qu’elle n’a jamais été expérimentée sous cette forme pendant la Ve République.