Denis Hennequin évincé de la tête d’Accor, un trio transitoire le remplace

[23/04/2013 20:15:36] PARIS (AFP) L’histoire s’est répétée mardi chez Accor: le PDG du groupe d’hôtellerie Denis Hennequin a été débarqué à l’occasion d’un conseil d’administration, tout comme son prédécesseur Gilles Pélisson l’avait été fin 2010, sous la pression des actionnaires Eurazeo et Colony Capital.

M. Hennequin, 54 ans et ancien patron de McDonald’s en Europe, a été poussé sans ménagement vers la sortie à deux jours de l’assemblée générale annuelle, alors que les résultats d’Accor ont été décevants au premier trimestre.

Il sera remplacé par un trio “de transition” composé de l’ex-banquier Philippe Citerne, le patron de Colony Capital Sébastien Bazin et le directeur général délégué Yann Caillère, qui deviennent respectivement président non exécutif, vice-président et directeur général, a annoncé Accor.

“La situation du groupe a fait l’objet durant cette réunion d’un diagnostic partagé par tous les administrateurs: la stratégie suivie est la bonne et restera inchangée”. Mais face à la concurrence, Accor a besoin “d’accélérer le rythme de mise en oeuvre de cette stratégie”, a expliqué le groupe dans un communiqué.

Le Conseil d’administration, dominé par Eurazeo et Colony (deux sociétés d’investissement), a demandé que “les énergies et les ressources soient en priorité allouées à la transformation du modèle de Accor”. En d’autres termes, à l’accélération de la vente des murs des hôtels du groupe.

“Le Conseil a pris acte des réserves de Denis Hennequin et a donc mis fin à son mandat à l’unanimité” avec effet immédiat.

Après avoir affiché une perte nette de 599 millions d’euros en 2012, Accor, qui gère Sofitel, Novotel, Mercure, Ibis ou F1, avait encore vu ses ventes reculer de 1,2% au premier trimestre.

“Les actionnaires principaux avaient le sentiment que Hennequin n’y allait pas avec l’assurance et la conviction qu’ils attendaient et que Hennequin avait révisé ses ambitions en baisse. Il y avait une déception”, a indiqué à l’AFP une source proche du dossier.

Denis Hennequin était arrivé à la tête d’Accor il y a un peu plus de deux ans. Il a mis en oeuvre une stratégie de cession d’actifs jugée trop lente et un plan de départs “trop généreux”. Mais il a aussi fait les frais de la mollesse du cours de Bourse qui, en dépit de sa petite hausse depuis un an (+6,31%), n’a toujours pas rattrapé son niveau d’il y a trois ans (-13,50%).

Le président d’Eurazeo, Patrick Sayer, estimait il y a un an “qu’Accor (était) sans doute la société la plus mal valorisée du secteur hôtelier” parce que son important patrimoine était mal pris en compte dans le cours de Bourse.

En février, le groupe s’est fixé pour objectif de réduire la part de ses hôtels possédés en propre à 20% de son parc pour dégager les liquidités.

Mais cet engagement n’a semble-t-il pas été suffisant aux yeux de Colony et d’Eurazeo, qui avaient souhaité qu’Accor créé une société foncière séparée afin de “mieux identifier la partie immobilière de la partie opérationnelle” pour “gagner en efficacité”.

Eurazeo et Colony Capital détiennent ensemble 27,51% des droits de vote au sein d’Accor.

Selon des analystes de Barclays, des “tensions existaient depuis quelque temps” au sein du conseil d’administration, voyant s’affronter d’un côté la logique d’entrepreneur de M. Hennequin, qui avait annoncé un plan d’action courant jusqu’en 2016, et de l’autre une stratégie financière, soucieuse de résultats rapides, portée par les actionnaires.

Les syndicats du groupe ont d’ores et déjà fait savoir qu’ils manifesteront jeudi, appelant tous les salariés du groupe à cesser le travail 15 minutes à l’ouverture de l’assemblée générale.

Ils dénoncent “la stratégie financière désastreuse” des actionnaires d’Accor et “la spirale infernale du profit à tout prix”.

L’éviction de M. Hennequin n’a pas profité au titre Accor qui a clôturé mardi en recul de 2,14% à 25,40 euros, dans un marché en hausse de 3,58%.