La Lituanie, le pays du lin contraint désormais à en importer

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Des articles en lin dans une boutique du vieux Vilnius, en Lituanie, le 19 avril 2012 (Photo : Petras Malukas)

[30/04/2012 06:46:28] VILNIUS (AFP) La Lituanie, où les fleurs de lin bleues étaient autrefois si abondantes qu’elles étaient célébrées dans les poèmes et chants traditionnels, doit aujourd’hui importer la matière première des textiles qu’elle fabrique et exporte, car cette plante ne pousse plus sur son sol.

Une balade dans les rues du vieux Vilnius permet de voir immédiatement le mot “linas”, lin en lituanien, qui s’affiche en grandes lettres sur les devantures de nombreux magasins. Cette culture traditionnelle a d’ailleurs inspiré un prénom très populaire dans le pays: Linas pour les hommes et Lina pour les femmes.

Vénérées dans de nombreux chants lituaniens, les fleurs bleues délicates du lin n’illuminent pourtant plus les champs au début de l’été. Selon les statistiques officielles, il ne restait pas en 2010 un seul hectare de lin planté pour produire des fibres textile, alors que vingt ans plus tôt, le lin fleurissait sur 21.500 hectares.

L’Union européenne est montrée du doigt comme responsable de cette situation.

“Les aides publiques sont désormais limitées à 675 litas (195 euros) par hectare”, déplore Beruta Vasiliauskiene qui dirige Jubarko linu verslas, l’une des dernières entreprises agricoles à encore cultiver le lin ces dernières années.

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é par la société Lincasa, à Kaunas, en Lituanie (Photo : Petras Malukas)

Mais les 50 hectares ensemencés se sont petit à petit réduits comme une peau de chagrin et cette année, rien ne sera planté.

Avant l’entrée de ce pays balte dans l’UE en 2004, les aides publiques étaient presque trois fois plus élevées. “Plus personne ne cultive le lin, cela n’est plus rentable”, regrette Mme Vasiliauskiene.

Les seuls à en planter sont les scientifiques de la station d’essais agronomiques d’Upyte, dans le centre de la Lituanie.

“Le lin lituanien pourrait être amené à disparaître si nous cessons notre activité. Chaque année, nous plantons entre 300 et 500 semences différentes afin de les renouveler”, note l’agronome Zofija Jankauskiene.

“Made in Lithuania”, un signe de qualité

La production de textiles en lin est néanmoins florissante en Lituanie. Linas, la plus vieille fabrique de textile de cette fibre située à Panevezys, dans le nord du pays, fête cette année son 55ème anniversaire. Elle a produit l’an dernier 2,5 millions de mètres de tissus, mais pour le fabriquer, elle importe depuis trois ans du fil du Bélarus voisin.

“Nous avions un atelier pour filer le lin, mais cela est devenu finalement plus rentable d’importer les bobines de fil”, explique Jurgita Senulyte, designer à Linas.

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énéral de Lincasa, une société produisant des articles et tissus en lin, le 17 avril 2012 à Kaunas, en Lituanie (Photo : Petras Malukas)

“Cultiver le lin et le travailler étaient des activités traditionnelles, c’est pour ça qu’aujourd’hui, nous avons tant d’entreprises travaillant le lin. Il existe un véritable savoir-faire”, affirme Vidas Vaitkus, à la tête d’une société produisant des tissus et des articles en lin depuis 2002. Même si la culture de cette plante herbacée a quasiment disparu, la Lituanie demeure pour lui le pays du lin.

“A l’occasion de chaque foire à laquelle nous participons, nous devons répondre aux questions: le produit est-il tissé en Lituanie, cousu en Lituanie?”, raconte M. Vaitkus.

“Made in Lithuania reste un signe de qualité”, affirme-t-il. A l’instar de ses concurrents, il écoule sa production, tissus et linge de maison, vers la France, l’Italie ou le Japon.

Mais les étrangers restent pourtant les seuls à succomber au charme du lin lituanien. Chez Linas, moins de 5% de la production reste en Lituanie. Et de manière générale, elle est destinée aux touristes.

“Acheter du lin revient cher pour les Lituaniens”, relève Mme Senulyte. Les cours de la matière première sont à la hausse, mais le coût relativement bas de la main d’oeuvre en Lituanie rend les produits en lin lituanien compétitifs sur le marché étranger, explique-t-elle.