Tunisie : Afek Tounes, un parti politique qui honore le verbe avoir

afek-tounes-01.jpgAu meeting d’Afek Tounes, du 23 avril 2011, organisé au Palais des congrès à Tunis, tout s’installe et tout s’étale. Le culte de la réussite est manifeste. De l’argent. Du paraître. De l’avoir aussi. C’est clair. Nous sommes parmi les forces du marché. La classe créative. La crème de la crème. La civilisation du capitalisme. Les passeurs du monde moderne. Les privilégiés et les débordants. Les lobbys et les cartels tout puissants. Le gotha des affaires. De la finance. De la mobilité sociale. Ici on ne déteste pas l’énergie. Ni la gouaille. La grande coopérative civique est en marche. Au pas de l’oie vers le pouvoir. La consécration. Et le renouveau. Nous sommes en présence d’un parti dénicheur de talents. Eveilleurs d’ambitions. Et il recrute. A tour de bras.

Et puis on se fait la bise. On se congratule. On se flatte. On se courtise. Dans une atmosphère bon enfant. Dans la joie. Et la félicité. En attendant le coup d’envoi. La démonstration. Le savoir-faire. Les slogans nunuches. La communication tous azimuts… La culture-monde est là, structurée autour du libéralisme, du consumérisme, de l’individualisme, de l’ordre médiatique et de l’éclat. Tout cela constitue, me dit un confrère éberlué, la culture d’un monde à tendance hyperbolique…

Le service d’accueil baigne dans l’enthousiasme. Toutes voiles dehors. Prêt à décocher un sourire dents blanches à tout moment. De véritables professionnels. Eux aussi sont starisés. Vedettisés. A fond. C’est que la présence féminine est prépondérante partout au sein d’Afek Tounes. Des nanas désinhibées. De véritables amazones. Libres et libérées. Conscientes de leurs atouts. De leur mérite. De leur charme. De leur ascendant. C’est vraiment le parti des dames. Des gracieuses. De l’éternel féminin. Des énergies motivationnelles… Gaieté vaut mieux que médecine, disait Lamartine.

Eh oui!, en politique, disait Hitler, il faut avoir l’appui des femmes, les hommes vous suivent tous seuls. Apparemment, Sami Zaoui (Coordinateur général d’Afek Tounes), qui fait le tour du propriétaire au Palais des Congrès et ses amis atugéens se sont appropriés la devise du Führer! D’ailleurs, tout au long de cet après midi, féminisé à l’extrême, des jeunes filles, à la personnalité bien trempée, t-shirt en bandoulière, circulaient dans les allées de la grande salle avec des pancartes appelant la gent féminine tunisienne à la mobilisation. Contre la réaction. L’islamisme rampant. Le mâle prédateur. Et le retour du refoulé. Des mots d’ordre qu’il faut tambouriner. Sans cesse. A l’heure de la menace des barbus pardi. Car, me dit une gentille militante, très à l’aise dans la langue de Voltaire, «Dieu lui-même a besoin de cloches et de muezzin». Pour battre le rappel des fidèles, ajoute mon interlocutrice.

«Notre parti s’engage, s’il arrive au pouvoir, à veiller au rôle structurant et régulateur de l’Etat en vue de créer une économie solide, complémentaire et équilibrée en développant les activités à forte valeur ajoutée dans un environnement des affaires transparent et équitable», affirme Emna Menif, professeur en médecine et porte-parole d’Afek Tounes, dont les propos, tout au long de son allocution de bienvenue, trahissaient la volonté d’un mouvement désireux d’être le serviteur des événements, de mordre à belles dents sur l’électorat de la droite, de préserver le pays des extrémismes, de coller aux aspirations profondes du peuple tunisien et de s’engager fermement dans le tournoi des idées, qui agitent la scène locale depuis le triomphe de la révolution de la dignité.

A la fin de la manifestation, le pari de la crème de la société tunisienne est gagné. Les ténors du mouvement ont fait «bella figura». Devant une salle comble. Enthousiaste. Acquise à la cause. Prête à relever le gond. C’est le prélude à de nouveaux challenges. Car les intentions les plus pures ne suffisent pas pour diriger un pays. La politique est la fosse aux lions. Elle ignore l’idéalité des principes et ne retient que les rapports de force. Dans un contexte révolutionnaire où certains partis politiques, endurcis durant les années de braise, habitués à la confrontation virile des idées, sont assimilés à des identités batailleuses. Frondeuses. Alors que les compagnons de Sami Zaoui, déshabitués à la brutalité compulsive, risquent de découvrir un monde rude, brutal, où les sentes du pouvoir sont souvent parsemées de cruauté et de basses manœuvres.