Tunisie : Objectifs et prérogatives des commissions chargées de la réforme politique, de l’examen des dépassements et de la corruption

 

Les présidents des trois commissions nationales chargées de la réforme politique
et de l’examen des dépassements et des cas de corruption ont tenu, samedi à
Tunis, une conférence de presse pour présenter les objectifs et les prérogatives
des trois commissions nationales.

Ces commissions regroupent des experts, des juristes et des représentants de la
scène politique et de la société civile. Chacune des trois commissions est
composée de 10 à 15 membres. Leurs rapports seront rendus publics à la fin de
leur mission.

Les présidents des trois commissions ont affirmé l’indépendance et la neutralité
de ces structures que ce soit au niveau de leur composition, leur mission, leurs
méthodes de travail ou encore en ce qui concerne les résultats auxquels elles
aboutiront.

M. Iyadh Ben Achour, président de la haute commission nationale pour la réforme
politique, a affirmé que la commission se penchera sur l’examen des différents
aspects de la vie politique, des institutions et des lois y compris la
constitution.

Il a expliqué que l’ancien régime a utilisé la loi pour exclure toute personne
ayant une opinion différente et l’empêcher de participer à la vie politique. Il
a affirmé que la commission de la réforme politique contactera les acteurs de la
scène politique et les représentants de la société civile afin qu’ils puissent
contribuer aux travaux de la commission.

Il a expliqué que la commission choisira des personnes connues pour leur
intégrité et loyauté, n’ayant pas été associées à l’élaboration d’anciens textes
de loi et décrets et qui n’ont pas participé aux campagnes appelant à l’élection
de l’ancien président en 2014.

Le président de la commission a ajouté qu’il a entamé ses contacts préliminaires
avec les partis et les personnalités nationales pour les inviter à prendre part
aux travaux de la commission qui regroupera plus d’une centaine d’hommes
politiques, de représentants de la société civile et des juristes.

Il a précisé que la priorité sera accordée à l’élaboration des textes organisant
les élections et à l’amendement du code électoral afin de permettre aux
candidats de se présenter, sans entraves, à la présidentielle et garantir par là
même l’organisation d’élections libres et crédibles, conformément aux objectifs
de la révolution populaire à savoir la liberté, l’égalité, la démocratie et
l’Etat de droit.

M. Iyad Ben Achour a aussi affirmé que les personnalités désignées pour présider
ces commissions sont connues pour leur indépendance et leur neutralité. Il a
affirmé que l’opinion publique sera informée de toutes pressions ou tentatives
d’ingérence dans les travaux des commissions.

Répondant à une question relative aux nouveaux projets de loi, le président de
la commission a indiqué que l’élaboration de ces projets est en cours mais leur
adoption ne peut se faire dans le cadre de l’actuel parlement, une instance qui
ne bénéficie pas de crédibilité ni de légitimité.

Il a indiqué que le nouveau président de la république sera appelé à organiser
la scène politique conformément au projet de loi élaboré par cette commission.

M. Iyad Ben Achour a également évoque l’amendement du code de la presse,
indiquant qu’il fera l’objet d’une réforme intégrale et fondamentale, afin de
permettre aux journalistes et aux responsables du secteur de l’information
d’exercer leur profession dans la liberté et l’indépendance, précisant que la
question de la déontologie est du ressort des professionnels.

De son coté, M. Abdelfattah Amor, président de la commission nationale
d’établissement des faits sur les affaires de malversations et de corruption a
indiqué qu’il s’agit d’une commission technique composée notamment d’experts
dans les domaines des finances, de la comptabilité ainsi que dans le droit
fiscal, administratif en plus de spécialistes en droit des affaires et en bourse
et dans les opérations bancaires.

En ce qui concerne les prérogatives de la commission, M. Abdelfattah Amor a
affirmé l’impératif d’enquêter sur tous les actes de corruption et de
malversations quelle que soit la personne concernée. Il a indiqué que la
commission auditionnera toute personne pouvant apporter un témoignage fondé et
précis.

Le président de la commission a appelé à protéger les documents publics et à les
préserver indiquant que cacher, détruire ou falsifier ces documents constitue un
crime à caractère pénal.

Il a précisé que le travail de la commission sera à la hauteur de l’évènement
historique que vit le pays et s’inscrit dans le cadre d’une nouvelle déontologie
politique, affirmant que la commission respectera le secret de l’instruction et
le droit de toute personne à un procès équitable.

M. Abdelfattah Amor a expliqué que la commission n’est pas un tribunal ni une
commission politique, même si elle revêt une dimension politique.

Concernant l’éventualité de la venue en Tunisie d’une équipe relevant du haut
commissariat des droits de l’homme, il a affirmé qu’il s’agit d’une initiative
positive et que des contacts seront établis avec l’équipe onusienne.

Pour sa part, M. Taoufik Bouderbala, président de la commission nationale
d’établissement des faits sur les abus durant la dernière période a expliqué que
la commission se chargera de rassembler les documents et de les transmettre aux
parties concernées.

Il a précisé qu’il n’existe pas de lignes rouges pour la commission dont le
travail se fera dans la transparence.

Il a indiqué que la lumière sera faite sur les cas de violation des droits, dont
en premier lieu, le droit à la vie, le droit à l’intégrité physique, et le droit
à la sécurité.

M. Bouderbala a indiqué que la commission se compose d’avocats, de magistrats,
de médecins, de journalistes et d’experts. Elle s’adressera en premier lieu au
ministère de l’intérieur et à certains de ses agents responsables en grande
partie des dégâts et de la mort de citoyens désarmés. (TAP)