Tunisie : Kairouan, une ville tunisienne à l’heure du Ramadan


kairouan-16082010.jpgPlus d’une attraction attend le visiteur en ce mois saint de Ramadan à Kairouan.
La ville a gardé, en effet, un charme particulier qui séduit, à commencer par
ses habitants.

Taoufik et Samira sont des Kairouanais de pure souche. Ils sont mariés depuis
dix ans, ont deux enfants et une habitude, voire un rite devenu obsession :
rompre le jeûne des deux ou trois premiers jours du mois saint de Ramadan dans
leur ville natale. «Nous aimons retrouver la famille, les plats préparés par ma
belle-mère, mais il y a bien plus : humer les odeurs de la ville qui n’ont pas
leur pareille ailleurs», souligne Taoukik. Avant d’ajouter qu’il n’est pas prêt
à sacrifier cette belle tradition «même si cela devient de plus en plus
difficile ; cela perturbe la quiétude des quelques jours de congé que je prends
ces dernières années».

Ce qui séduit Taoufik, d’abord, à
Kairouan, au cours du mois de Ramadan c’est
cette «belle impression de propreté» qui se dégage de la ville. A
Kairouan,
beaucoup plus sans doute qu’ailleurs, les habitants entreprennent quelques jours
avant l’avènement du mois saint des travaux de peinture et de grand ménage. La
cuisine notamment est «totalement prise en charge». Tous les ustensiles de
cuisine en cuivre, d’ailleurs d’un grand usage, prennent la direction des
boutiques d’artisans –et ils sont nombreux à Kairouan où un souk leur est dédié-
spécialisées dans l’étamage du cuivre.

Côté activités économiques, certains commerces connaissent tout le long du mois
saint un réel développement. Des activités qui font pour l’essentiel partie du
secteur alimentaire. A commencer par les boulangeries ; le pain est, du reste,
une des grandes spécialités culinaires de la ville des
Aghlabites. Certains
affirment que les boulangeries de la ville en fabriquent au moins une dizaine de
variétés. Mais si certaines de ces variétés sont répandues dans d’autres villes
du pays, certaines autres sont par contre bien spécifiques à Kairouan comme
celle du pain dit «Bzezel» (mamelles), un pain petit et rond à la surface duquel
émergent précisément des formes qui dessinent des mamelles.

Des tonneaux, des sceaux et des… brouettes calcinées

Au sortir de la ville sur la route qui ceinture Kairouan en direction de Gabès,
une attraction attend le visiteur. Sur environ deux kilomètres, la ville
accueille au lieu appelé, nous dit-on, «Djihinet» et à quelques encablures du
quartier «Almanchia», une grande boulangerie à ciel ouvert. «Melaoui» et «Tabouna»
sont les spécialités offertes par des femmes et des jeunes filles, pour
l’essentiel, qui fabriquent leur pain dans des fourneaux de fortune : des
tonneaux, des sceaux et des… brouettes calcinées sur lesquels sont posés des
plateaux en terre cuite. La marchandise est vendue sur des tables sous des
parasols aux couleurs de marques de soda. Avec pour seuls matériaux de la pâte,
de l’eau, de l’huile et des restes de morceaux de bois pour raviver les flammes.

Celui qui se rend à Kairouan ne peut également rater le spectacle qui, à
quelques minutes de la rupture du jeûne, se déroule dans les cafés de la ville
et notamment au café «Taktak», situé à «Bab Eljeladdine», une des plus grandes
sinon la plus grande artère de la ville. Une quasi queue s’installe devant le
comptoir de ce café par des habitués venus remplir qui une thermos qui un autre
récipient comme une bouteille de soda vide avec du café filtre. Et recevoir
après avoir accompli ce rituel trois morceaux de sucre enroulés dans du papier
servis par un garçon de café se tenant à la porte de l’établissement avec une
bassine en plastique à la main. Les Kairouanais sont friands de ce café … qui a
quasi disparu des principales artères de nos grandes villes.

Et il n’est pas rare que ceux qui se saisissent de ce breuvage combien
indispensable au rituel du jeûne, et qui prennent à pied ou à bicyclette la
direction de leur foyer, entendent, le canon, installé sur les remparts qui font
face à la Mosquée Okba Ibn Nafaa (la grande Mosquée), tonner fort pour annoncer
la rupture du jeûne. Un canon dont les salves sont toujours suivies et
applaudies par une kyrielle d’enfants qui ont pris le pli de sortir pour saluer
la fin d’une longue journée de Ramadan. Une journée bien chaude et bien
familière aux Kairouanais.