“Projets d’été? Se faire licencier” : chez Chaffoteaux, la lutte continue

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éléguée syndicale CGT et Joël Moro, employé, montrent des cartes postales éditées par les salariés menacés de licenciement de l’entreprise Chaffoteaux-et-Maury à Ploufragan, le 7 août 2009 (Photo : Franck Perry)

[09/08/2009 12:09:42] SAINT-BRIEUC (AFP) “Projets d’été? Se faire licencier”: les mots claquent sur la série de cartes postales en noir et blanc affichant un portrait de salariés, de familles ou d’enfants de futurs licenciés, chez Chaffoteaux-et-Maury, à Ploufragan, près de Saint-Brieuc.

Chez Chaffoteaux, pendant l’été, la lutte continue par d’autres moyens. L’annonce début juillet de la suppression de 207 emplois supplémentaires signe l’acte de décès de ce fleuron industriel centenaire, souvent novateur, spécialisé dans la fabrication de chauffe-eau et chaudières, qui a compté plus de 2.000 salariés au début des années 80. Les élus locaux parlent de “pillage industriel”.

Six cartes différentes ont été éditées à 13.000 exemplaires. Elles sont disponibles dans les offices de tourisme, les mairies, certains commerces, pour être envoyées aux amis, à la famille, aux élus locaux ou nationaux. Ou mieux encore, à la direction de l’entreprise, le groupe italien Aristo Thermo Group (ATG) basé à Osimo (Italie centrale).

“Les cartes, elles permettent de se donner des nouvelles pendant les vacances. Ca passe entre plusieurs mains, ça fait parler de nous!”, se réjouit Brigitte Coadic, déléguée du personnel, chez Chaffoteaux depuis 28 ans.

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és en grève, participent à l’occupation de l’entreprise Chaffoteaux-et-Maury à Ploufragan, près de Saint-Brieuc, le 7 août 2009 (Photo : Franck Perry)

Au dos de chaque carte, une citation empruntée aux nouveaux propriétaires de l’usine, lorsqu’ils l’ont reprise en 2001 et qu’elle comptait encore 850 salariés: “Vous allez désormais faire partie d’une entreprise dont les paramètres les plus importants sont la continuité, la capacité entrepreneuriale, la personne humaine et ses valeurs”.

“Il y une carte qui me touche particulièrement: des petits bouts d’chou (des enfants de collègues) dans un atelier. Je l’ai envoyée à M. Merloni (président d’ATG) et j’ai écrit derrière: +merci pour ces vacances inoubliables+”, raconte Brigitte Coadic.

L’entreprise est fermée depuis la mi-juillet pour congés annuels et la reprise du travail, pour quelques derniers mois, est fixée au 18 août.

Mais l’usine n’a pas été désertée pour autant: “nous y passons nos vacances. C’est un moyen de maintenir la pression. L’autre jour, on a eu un concert, on mange ensemble, des gens viennent nous voir, on fait visiter. C’est une belle entreprise, il y a un potentiel dans cette usine. Nous en sommes fiers”, affirme la représentante syndicale.

Discret, le photographe François Daniel s’est fondu depuis juin parmi les salariés qu’il accompagne au jour le jour. “L’idée de départ, c’était de faire des portraits des travailleurs et de leurs familles. De témoigner, de garder une trace de ce qui se passe”, dit-il. Puis s’est greffée en complément l’idée des cartes postales, téléchargeables sur internet (http://soutien.chaffoteaux.over-blog.com).

Si les salariés se retrouvent “aussi nombreux pendant les vacances, c’est qu’ils ont besoin d’être ensemble. Pour beaucoup, le site les a faits vivre, travailler, pendant 30 ans. Ils le respectent”, constate le photographe.

“Les gens savent que notre lutte est juste. Comme c’est +Chaffoteaux+, on est un peu comme des modèles. Combien de petites +boîtes+ qui ferment tous les jours et dont personne ne parle?”, s’interroge Brigitte Coadic. “On essaie de faire toutes les démarches possibles. Après, on verra s’il faut lever le ton”, ajoute-t-elle.

Dans l’immédiat, une nouvelle série de 8 cartes est en cours de réalisation. Avec six mots en haut de chaque photo: “Projets de rentrée? Se faire licencier”.