Pétrole : le Tchad veut renégocier l’accord avec le consortium exploitant son brut

 
 
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Infrastructures pétrolières à Komé, le 10 octobre 2003 (Photo : Desirey Minkoh)

[23/08/2006 17:07:38] N’DJAMENA (AFP) Le Tchad a la ferme intention de renégocier la convention le liant au consortium international exploitant son brut, afin de prendre part directement à la production et accroître ses revenus pétroliers, après un long conflit avec la Banque mondiale sur la gestion de ces ressources.

Lors du conseil des ministres, mardi, le président tchadien Idriss Deby Itno a demandé au gouvernement “de négocier la convention de 1998 avec le consortium pétrolier pour lui permettre d’entrer dans la production pour mieux en profiter”, indique un communiqué publié mercredi.

Il a aussi demandé au gouvernement de “traiter de façon diligente de certaines questions fiscales pendantes avec le consortium pour permettre au Tchad de disposer de toutes ses ressources nécessaires aux financements de ses projets de développement et de réduction de la pauvreté”, poursuit le texte.

Contacté par l’AFP, le consortium n’a pas souhaité faire de commentaire.

En octobre 2004, la présidence tchadienne avait accusé le consortium américano-malaisien ExxonMobil/Chevron-Texaco/Petronas de ne pas respecter cette convention, de brader le brut tchadien sur le marché et de ne pas reverser la totalité des sommes dues au Tchad. Les relations avec le consortium s’étaient ensuite officiellement apaisées.

Un dur conflit a en revanche opposé pendant plus de six mois N’Djamena et la Banque mondiale (BM) après la modification par le Tchad, fin décembre 2005, de la loi sur la gestion des ressources pétrolières, adoptée en 1999 sous la pression des bailleurs de fonds. Le différend a pris fin avec la signature d’un accord en juillet.

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Le président Idriss Déby lors de son investiture, le 8 août 2006 (Photo : STR )

Cette loi imposait au Tchad de réserver l’essentiel de ses pétrodollars à des projets de développement en matière de santé, d’éducation ou d’infrastructures et d’en affecter une partie à un “fonds pour les générations futures”. Or le régime tchadien, confronté à une grave crise financière et menacé par des rébellions arrivées en avril aux portes de N’Djamena, souhaitait disposer à sa guise de ces revenus.

L’accord avec la BM a assoupli les conditions d’utilisation de ces ressources, mais le Tchad souhaite désormais contrôler également la production de son or noir.

Selon le communiqué publié mercredi, “le président Deby a mis un accent particulier sur le fait que le Tchad doit jouir pleinement de toutes ses ressources pétrolières, minières et autres”.

“A travers cette négociation, le Tchad souhaite entrer dans le consortium par le biais de la Société des hydrocarbures du Tchad (SHT), entreprise qui veillera aux intérêts de l’Etat”, a précisé à l’AFP un responsable du ministère du Pétrole, sous le couvert de l’anonymat.

La SHT a été créée en juillet avec pour mission “la prise en main du secteur pétrolier et l’augmentation de la part de la rente qui revient à l’Etat tchadien en s’associant à l’exploitant”.

“L’objectif de cette négociation, c’est de permettre au Tchad de participer directement à la production de son pétrole au lieu de se contenter de percevoir juste les 12,5% des revenus totaux de la vente de notre pétrole”, prévus par la convention, a également expliqué un responsable du Mouvement patriotique du Salut (MPS), le parti présidentiel.

“Si j’avais dû négocier le contrat (avec le consortium), je ne l’aurais pas fait comme ça”, soulignait déjà en juin 2005 le ministre du Pétrole de l’époque Youssouf Abdallah. “Le système de la concession ne marche que lorsqu’une administration a les moyens de contrôler les flux de production. Ce qui n’est pas le cas de la nôtre…”

La toute récente reprise des liens diplomatiques entre le Tchad et la Chine, fortement intéressée par le pétrole tchadien, place désormais N’Djamena en position de force vis-à-vis du consortium et de la Banque mondiale.

 23/08/2006 17:07:38 – © 2006 AFP