Après les cartes bancaires, Bruxelles s’attaque à la banque de détail

 
 
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La commissaire européenne à la Concurrence Neelie Kroes lors d’une conférence de presse, le 12 juillet 2006 à Bruxelles (Photo : Gérard cerles)

[17/07/2006 15:39:55] BRUXELLES (AFP) Après avoir épinglé au printemps les profits “scandaleux” engrangés sur les cartes bancaires, la commissaire européenne à la Concurrence Neelie Kroes s’est attaquée lundi au manque flagrant de concurrence et aux prix excessifs, en Europe, des services des banques pour les particuliers.

L’enjeu est d’importance car la banque de détail représente plus de 50% de toute l’activité bancaire en Europe occidentale. La Commission estime qu’en 2004, les activités de détail ont généré dans l’UE un revenu brut de 250 à 275 milliards d’euros, soit 2,5% du PIB européen.

Selon les premiers résultats de l’enquête lancée il y a un an, la concurrence ne fonctionne pas au mieux et les prix facturés aux clients sont excessifs.

Pour la commissaire, deux grandes questions se posent : “Pourquoi est-il si difficile pour les banques de pénétrer un nouveau marché en Europe?” et “Pourquoi est-il si rare que les consommateurs changent de banque?”

Concernant la première question, Neelie Kroes constate que les marchés sont encore “fragmentés” et demeurent très nationaux. C’est en Italie, en Espagne et surtout en Allemagne que cette dispersion est la plus flagrante.

En outre, il existe encore d’importants obstacles à l’arrivée de nouveaux entrants.

Et, déplore Bruxelles, même si on dénombre moins d’interventions publiques, “les Etats membres continuent à intervenir de diverses manières sur les marchés bancaires. Cela va d’un traitement préférentiel à l’égard de certains produits bancaires, à la protection de certains types de banques, en passant par les tentatives pour empêcher l’entrée sur leur territoire de banques étrangères”.

Mais pour la commissaire, ce sont les consommateurs qui sont floués par ce système. Nombre d’entre eux souhaiteraient changer de banque, mais ils en sont dissuadés par des coûts astronomiques.

Selon le Bureau européen des unions de consommateurs (Beuc), le coût total d’un changement de banque en France en 2004 s’élevait en moyenne à 335 euros.

Quant à la Belgique, 8 consommateurs sur 10 n’ont pas changé de banque dans les 10 dernières années, alors que… 65% ne sont pourtant pas satisfaits du service qui leur est offert.

En outre, relève le Beuc, les clients sont parfois freinés dans leurs velléités de changement car “en changeant de fournisseur, le taux d’intérêt qu’ils ont obtenu par exemple pour leur crédit hypothécaire pourrait être remis en question”.

Autre dysfonctionnement : la grande diversité des tarifs des services bancaires d’un pays à l’autre. Alors que les banques italiennes et luxembourgeoises ont enregistré en 2004 le plus gros revenu par compte courant (respectivement 204 et 265 euros), les établissements lituaniens et suédois ont affiché seulement 15 et 22 euros.

Côté rentabilité, les différences sont tout aussi édifiantes. Ainsi, tandis que l’Autriche et l’Allemagne ont dégagé en 2004 des bénéfices avant impôts représentant 11% et 17% de leurs revenus bruts en banque de détail, en Irlande, en France ou en Espagne, ces chiffres avoisinaient plutôt les 40%.

Pour la commissaire, tout comme pour le Beuc, une des clés tient à plus de transparence. Lorsque le consommateur saura ce qu’il paie et pour quels services, il sera enfin en mesure de se défendre.

Si la liste de griefs présentée lundi n’est qu’un premier avertissement, la véritable bataille pourrait débuter fin 2006 ou début 2007. Avant la fin de l’année, la Commission publiera en effet son rapport final sur ce thème.

Ensuite, elle pourra décider, le cas échéant, de lancer des procédures d’infraction individuelles à l’égard des banques dont les pratiques commerciales auront été jugées douteuses.

 17/07/2006 15:39:55 – © 2006 AFP