Acculée à la faillite, Skymark veut oublier Airbus et prendre un nouvel essor

82d5f3001347e5184d21da4dac0b4820dd0e5e1b.jpg
éroport Haneda de Tokyo, le 29 janvier 2015 (Photo : Kazuhiro Nogi)

[29/01/2015 09:06:43] Tokyo (AFP) La compagnie aérienne japonaise Skymark Airlines, qui vient de déposer le bilan, va désormais partir en quête de soutiens afin de se relever, en tentant d’oublier la commande de six Airbus A380 qui a précipité sa chute.

Ce contrat d’un montant de près de 2 milliards d’euros (au prix catalogue), qu’elle a été incapable d’honorer, est une des principales causes de la faillite, a déclaré le nouveau directeur général, Masakazu Arimori, lors d’une conférence de presse jeudi.

Probablement trop ambitieuse, Skymark avait jeté en 2011 son dévolu sur ces très gros porteurs dans l’espoir d’un développement international. A l’époque, Airbus, si heureux de décrocher son premier client nippon pour l’A380, avait fermé les yeux sur l’audace d’un tel investissement de la part d’une aussi petite compagnie.

Las, celle-ci n’a pu s’acquitter de ses échéances, et le géant européen s’est résigné à annuler l’été dernier la fameuse commande, réclamant le paiement d’indemnités de 700 millions de dollars pour rupture de contrat.

L’affaire a scellé le sort d’une compagnie déjà malmenée par la concurrence et des effets de change défavorables, qui ont renchéri la facture des avions et du kérosène. Faute de pouvoir débourser les sommes requises, Skymark a décidé d’engager une procédure de redressement judiciaire.

Contacté par l’AFP, Airbus a dit “être au courant” de la situation. “Mais il revient désormais aux tribunaux de trancher”, a commenté un porte-parole interrogé à Tokyo.

Lestée d’une dette de 71 milliards de yens (533 millions d’euros), Skymark a pour l’heure obtenu le soutien d’un fonds basé à Tokyo (Integral) pour l’accompagner dans la phase de restructuration.

Les deux remplaçants du PDG démissionnaire, qui ont fait acte de contrition dans la plus pure tradition nippone, ont dit prospecter d’autres sociétés, tout en disant “ne pas avoir de souci de financement immédiat”.

“Nos opérations continuent normalement”, même si des itinéraires peu rentables seront abandonnés, et il n’est pas prévu de supprimer des postes, a promis M. Arimori, tentant de rassurer ses passagers et plus de 2.200 employés.

En revanche, exit la flotte d’appareils Airbus (cinq A330 utilisés en leasing): Skymark n’aura désormais plus recours qu’aux 28 B737 de son concurrent américain Boeing.

– Le titre plonge de 25% –

Inquiets face à ces mauvaises nouvelles, “des clients pourraient cependant leur tourner le dos”, craint Ryota Himeno, un analyste de Barclays Securities interrogé par l’agence Bloomberg. Selon lui, “la clé réside dans les accords de partage de code qui avaient été planifiés avec ANA et JAL” afin d’augmenter le taux d’occupation des vols Skymark.

Les négociations semblaient à un stade avancé avec l’objectif de mettre en oeuvre ces partenariats d’ici à fin mars, mais rien ne garantit que le projet survivra à cette faillite.

A la Bourse de Tokyo, les investisseurs se sont immédiatement défaits de leurs titres: l’action, qui doit être radiée le 1er mars de la liste des entreprises cotées, a plongé de 25,23% à 237 yens.

Skymark est la sixième compagnie aérienne nippone à déposer le bilan depuis 2003, selon le centre de recherche Teikoku Databank, cinq ans après le retentissant naufrage du porte-étendard JAL, depuis revenu en grâce.

Créée fin 1996 à la faveur de la politique du gouvernement de casser le duopole formé par Japan Airlines et All Nippon Airways (ANA) et opérationnelle depuis 1998, elle exploite une flotte de 33 avions loués, qui volent exclusivement sur le territoire nippon, au départ de l’aéroport de Tokyo-Haneda (36 créneaux quotidiens).

Ses déboires révèlent la difficulté de survivre face à ces deux géants membres d’alliances internationales qui étendent leurs capacités sans faire exploser les coûts afférents.

Le gouvernement, qui a dit suivre attentivement le dossier Skymark, “devrait lui venir en aide afin de préserver la compétition dans un marché oligopolistique”, a estimé Hiroshi Hasegawa, de SMBC Nikko Securities.

Les rivales de Skymark, JAL et ANA, avaient le sourire jeudi à la Bourse: la première a gagné 1,76% à 4.040 yens, et la seconde 0,89% à 328 yens.