Tunisie – Aéroports : «Nous ne méritons pas qu’on nous dise ‘’DEGAGE’’», se plaint le Président de la TAV

monastir-bourguiba-320.jpg«Non, nous ne méritons pas cela, nous ne méritons certainement pas que l’on nous dise “dégagez“», a déclaré, non sans émotion, Mustapha Sani Sener, Président du Directoire de TAV Airports Holding, lors de la conférence de presse organisée mercredi 16 mars à Tunis.

Objet de la conférence: remettre les pendules à l’heure et rassurer les contestataires quant au maintien des activités sur l’aéroport de Monastir au même titre que celui d’Enfidha.

Pour les manifestants, il n’est pas question que les vols soient «détournés» sur «Enfidha», que les compagnies aériennes y déplacent leurs sièges où que les grands TO internationaux, tels Thomas Cook, y élisent domicile. Il s’agit également de maintenir l’aéroport historique du Sahel en bonne «santé» (économique et financière) car il serait mal entretenu d’après les manifestants..

Ce n’est pas l’avis des représentants de la compagnie aérienne turque qui estiment qu’ils ont assuré le maintien de l’Aéroport de Monastir en état et ont même amélioré ses prestations.

Le groupe turc a doté cet aéroport de systèmes informatiques de pointe et ont affirmé qu’ils assureront son exploitation selon les normes internationales. «Pour nous, les aéroports internationaux de Monastir Habib Bourguiba et d’Enfidha Hammamet seront deux portes d’entrée complémentaires distinctives et complémentaires vers la Tunisie».

Pour le ministre du Transport, nul doute que l’Etat tunisien respectera ses engagements avec la TAV, la remise en cause du contrat signé avec TAV Airports n’est donc pas d’actualité.

«Nous avons signé un contrat avec l’Etat tunisien. Le premier Etat arabe dont la constitution date de 1861. Nous ne doutons donc pas du fait que cette nouvelle atmosphère démocratique … offrira pour nous tous la possibilité de travailler efficacement à la réalisation des meilleurs résultats pour le secteur du tourisme tunisien».

Alors qui nourrirait ou encadrerait le feu des protestations anti-TAV à Monastir?

Ca serait les représentants de l’UGTT, bien sûr, et également ceux de l’OACA (Office de l’Aviation Civile et des Aéroports) sensée être une administration publique et appliquer les décisions de l’Etat. Des revendications qui pourraient paraître logiques pour certains mais dont la victime ne devrait certainement pas être l’un des plus importants investisseurs du pays.

Bizarre, depuis la révolution, nous assistons à plusieurs “Etats“, dans l’Etat.

Espérons que ce cauchemar prendra fin au plus vite.

En attendant, le risque que les investisseurs perdent confiance dans le site Tunisie n’est pas écarté. D’ailleurs et très diplomatiquement, sur le bout des lèvres, M. Sani Sener l’a laissé entendre. Car son groupe a respecté tous ses engagements et lorsque tout s’est arrêté durant la crise financière, lorsque partout dans le monde on avait annulé les investissements et licencié les employés, «TAV Airports a poursuivi son investissement en Tunisie et n’a licencié aucun employé, bien au contraire, il a fourni 570 opportunités d’emplois supplémentaires».

Des emplois dont les détenteurs étaient pour la plupart «oisifs puisque l’Aéroport ne décollait pas réellement».

Les pertes enregistrées par le groupe turc se situeraient entre 30 et 40 millions de $. L’Aéroport qui n’a pas été inauguré officiellement par l’ancien président, n’a pu être montré au monde alors que «s’il y avait eu une inauguration officielle d’Ennfidha, tout d’abord, le pésident turc aurait été présent mais nous aurions signé l’entrée en grande pompe dans le monde du tourisme de cette grande réalisation. Car Ennfidha est le plus grand aéroport de la rive Sud de la Méditerranée et de l’Afrique».

De la déception et beaucoup d’amertume, même si le PDG de la TAV ne voulait pas trop en faire, car il tient à mener à terme son contrat. «L’aéroport vous appartient, nous n’en sommes que les concessionnaires», comme pour dire, c’est un investissement que vous devez protéger car il vous reviendra un jour ou l’autre.

Le groupe TAV a assuré sa part du contrat, il a mené des campagnes promotionnelles dans différents pays du monde pour mettre en valeur «les régions et non pas Ennfidha», a tenu à préciser Mustapha Sani Sener.

Reste que si nous commençons à ordonner aux investisseurs étrangers de «dégager» sous prétexte que les contrats signés avec l’ancien gouvernement ne sont pas convaincants pour nous, nous risquons non pas d’y perdre des plumes mais beaucoup plus. Nous risquons de voir le nombre de chômeurs encore plus nombreux et de voir les investisseurs étrangers bouder la Tunisie sans oublier le malaise qui touche d’ores et déjà des investisseurs potentiels tunisiens qui ont peur de toutes sortes d’accusations concernant des richesses qu’ils auraient prétendument «mal acquises»…

Rappelons que pour gagner l’offre de concessionnaire de l’aéroport Enfidha, le groupe turc TAV avait présenté la meilleure offre financière de l’ordre de 500 millions d’euros dont 25% en fonds propres et 75% financés par des institutions financières internationales. Une année plus tard, la Banque mondiale acquerrait 15% par le biais de sa filiale, IFC, et 18% au Fonds panafricain de développement des infrastructures (PAIDF)..