La France devra se serrer davantage la ceinture si elle veut réduire ses déficits

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çois Fillon, le 5 mai 2010 à Paris (Photo : Lionel Bonaventure)

[07/05/2010 16:01:48] PARIS (AFP) Gestion rigoureuse, “austérité” ou “plan de rigueur”: peu importe les formules, il faudra beaucoup plus que les quelques milliards d’économies annoncées par le gouvernement pour que la France puisse tenir ses promesses en matière de réduction des déficits.

En pleine tourmente des marchés et sur fond de crise grecque, le Premier ministre François Fillon a affiché jeudi la volonté du gouvernement de serrer la vis au cours des prochaines années.

Au programme: gel des dépenses des ministères, coupes dans les niches fiscales et baisse du train de vie de l’Etat.

Des annonces aussitôt qualifiées par le PS de “plan de rigueur”, qui tombe comme “un coup de bambou sur les Français”.

“On est très très loin d’un plan de rigueur”, a asséné vendredi François Fillon, soulignant que tout en s’attachant à redresser ses finances, le gouvernement allait poursuivre les “investissements d’avenir”.

“On a sonné le coup d’envoi du processus de revue de la dépense”, souligne une source gouvernementale.

Mais face à l’ampleur des déficits, les efforts budgétaires annoncés semblent encore loin du compte.

Le déficit public (Etat, sécurité sociale, collectivités locales) de la France est attendu à 8,0% cette année. Le pays a ensuite prévu de le réduire à 6% l’an prochain, 4,6% en 2012 et à 3% du Produit Intérieur Brut (PIB) en 2013.

Cela implique d’économiser environ 95 milliards d’euros en trois ans, indique-t-on à Bercy.

Or, le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ne suffira pas.

Le gouvernement entend aussi trouver cinq milliards en deux ans en rognant sur les niches fiscales, qui coûtent chaque année 70 milliards à l’Etat.

Et pour les trois ans à venir, les dépenses de l’Etat, gelées jusqu’à présent “en volume” (en tenant compte de l’inflation), le seront désormais “en valeur”, mais hors prise en compte des remboursements annuels des intérêts de la dette et des pensions, a annoncé François Fillon jeudi.

Comme ces remboursements absorbent généralement la quasi totalité des marges de manoeuvre générées par l’inflation, “on ne change en fait rien à la politique menée depuis 2005”, souligne Christian Saint-Etienne, professeur à l’université Paris-Dauphine.

Cette nouvelle présentation permet de mieux faire comprendre aux ministères qu’ils devront dépenser moins, justifie-t-on à Bercy.

Mais pour tenir les objectifs de réduction de déficit, “il faudrait aussi geler la dépense des collectivités locales et de la sécurité sociale, or rien n’a été encore annoncé qui laisse penser qu’on va dans cette direction”, rétorque M. Saint-Etienne.

Le gouvernement annoncera certainement de nouvelles mesures lors du deuxième volet de la conférence sur les déficits publics, prévue le 20 mai.

La réforme des retraites sera aussi un indicateur de l’ampleur des sacrifices demandés aux Français.

Reste que si la croissance est moins forte que prévu, l’Etat devra faire des efforts supplémentaires.

Or l’objectif d’une croissance de 2,5% à partir de 2011 semble trop optimiste aux yeux de nombreux économistes. Bruxelles table de son côté sur une croissance de 1,5% seulement l’an prochain en France.

“Tous les pays vont devoir réduire leurs dépenses en même temps, ce qui risque de créer un environnement européen très déprimé”, estime Olivier Gasnier, économiste à la Société Générale.

Un sentiment partagé par Eric Heyer, économiste à l’OFCE, selon lequel les différents plans d’austérité vont miner la croissance européenne.

“Les marchés ne sont pas dupes: ils savent très bien qu’on n’arrivera pas à passer en trois ans d’un déficit de 8% à un déficit de 3% avec une croissance qui va être plate”, juge-t-il.