Les Jardins du Lac : l’habit ne fait pas le moine…

vidange-1.jpg« Cette ville phare doit briller de toutes ses parcelles, un seul
terrain non bâti et le charme et l’harmonie sont rompus, on n’entre pas
dans la modernité les rangs dispersés. Les retardataires sont prévenus,
mieux vaut prendre le train de la postérité. Construire la ville du
troisième millénaire n’est pas un slogan, c’est une tâche colossale. La
SPLT est forte de la bonne volonté de ses agents, de la compétence de ses
cadres et de la judicieuse stratégie arrêtée par les responsables qui se
sont succédé à la tête de la société. »

On a du mal à reconnaître dans les propos exprimés sur le magazine l’Economiste
au début de 2006 par Tahar Babaï, PDG de la SPLT, la ville phare en
question. Car en guise de ville phare, on a aujourd’hui affaire, excusez le
terme à une ville « dépotoir ». Amusez-vous donc à vous promener dans la
zone « Les Jardins du Lac » et vous en aurez pour votre fuel en sensations
fortes car le lotissement en question ne reflète en rien l’image d’une cité
résidentielle de haut standing, l’exemple même de la ville moderne et
futuriste que tout le monde attend et surtout vous n’y trouverez point de
jardins, le seul qui y ressemblait un petit peu semble à l’abandon. Aux
coins des rues, les ordures et résidus ménagers s’entassent et débordent de
partout sans parler des odeurs pestilentielles qui s’en dégagent et des
moustiques qui, pour s’être autant gavé des restes de nourritures déposés
par les riverains faute de bennes à ordures toutes proches des centres
d’habitations, souffrent d’obésité.

Les Jardins du Lac, une zone résidentielle de haut standing dont
l’aménagement a fait l’objet de plusieurs conseils ministériels, se trouve
aujourd’hui, aux dires, des certains résidents dans une situation de
négligence, de laisser aller révoltants.

Ils se demandent d’ailleurs, à quoi cela servirait de payer trois mille
dinars le m2 dans une zone résidentielle, de s’acquitter de taxes
municipales de presque 500 D à l’année, de se conformer aux règlements
stipulés dans le contrat d’acquisition d’un terrain si les autorités locales
sensées préserver la loi et garantir le bien être et la sécurité des
riverains n’assurent pas ?

A qui la faute ? A la société promotrice ? A la municipalité de la
Goulette ?

vidange-2.jpg« Nous sommes conscients de la réalité de la situation qui sévit aux
Jardins du Lac, affirme M. Ahmed Maali, président de la municipalité de la
Goulette mais il est des données qui ne sont pas connues par tout le monde.
Tout d’abord, toute la zone du Lac, ne relève pas de nos compétences. La
partie Jardins du Lac relève de la commune de la Goulette et celle du Nord
du Lac est soumise à la tutelle de la municipalité de Tunis. Ensuite, fait
non négligeable, 20 % uniquement de lots sont construits dans la zone
résidentielle, le reste est encore en chantier, les acquéreurs n’ayant pas
encore démarré la construction de leurs futures habitations ». Ceci
exclurait-il pou autant la responsabilité de la municipalité par rapport aux
habitants résidents ? « Nous considérons que la situation de cette zone est
indécente et ne répond pas aux attentes des citoyens » approuve M. Maali qui
ajoute, « Nous comptons faire le nécessaire pour y remédier, bien que le
lotissement, n’a pas été définitivement réceptionné par la municipalité, et
qu’il se trouve encore sous la responsabilité de la société du lac, nous
assurerons. Nous voulons satisfaire le citoyen, qui bien entendu, paie ses
taxes à la municipalité ». Aux dires du maire de la Goulette et selon les
réglementations en vigueur, la municipalité ne commence à intervenir que dès
le moment où le lotissement approuvé lui est totalement remis, or
administrativement, ça n’est pas encore le cas. A sa réception, tout
lotissement doit être doté de toutes les commodités comme l’éclairage, les
bennes à ordures et autres. Le rôle de la commune doit se restreindre à
l’entretien tel le nettoyage et la préservation de l’environnement et des
biens publics.

Des rappels à l’ordre mais…

La municipalité est donc décidée à s’attaquer aux problématiques posées
au niveau de cette zone et en premier lieu, celle des chantiers. Elle compte
remédier aux phénomènes des grues gigantesques installées en pleines rues,
des bétonnières qui vidangent sur la chaussée, aux « restes » de chantiers
jetés sur la voie publique, les trottoirs et même sur les lots problèmes,
sans oublier les fils de fer qui traînent sur la route et auquel cas il
devient très dangereux de laisser ses enfants s’y aventurer et pour terminer
les meutes des chiens errants qui menacent la sécurité des ces mêmes
enfants.

« Nous sommes sensibles aux doléances de nos concitoyens, et
rassurez-vous, nous ne faisons pas la sourde oreille à leurs réclamations ».

Le maire de la Goulette assure d’ailleurs qu’un certain nombre d’actions
sont programmées pour mettre fin à cette situation « désolante » et pour
commencer au problème des gravats. La municipalité a, à ce propos, dégagé
une équipe spéciale pour contrôler et étudier les raisons des dépassements
et œuvrer à ramasser les chantiers. Une opération pour le nettoyage des
chantiers est donc en cours. « Cette action est tellement importante que
c’est le gouverneur lui-même qui la supervise. Nous avons mis en place une
équipe, composée par la municipalité de la Goulette, celle de Tunis et la
société du Lac. Un groupe, représentant ces trois départements, planche
spécialement sur l’action à propos des chantiers, vous parlez de
dépassements par rapport à l’environnement, dépôts de gravats et autres, je
vous parlerais de dépassements par rapport à la superficie même de la
construction ». Pour ce, la commune a appelé les acquéreurs à respecter à la
lettre les autorisations de construction de peur qu’ils ne débordent sur les
parkings et les trottoirs ou carrément sur les lots voisins.

Les rappels à l’ordre, y compris par le biais de la Société du Lac, pour
que les acquéreurs clôturent leurs lots n’ayant servi à rien, la Mairie a
pris des mesures exceptionnelles pour délivrer les autorisations de
construire à ceux qui en expriment la demande juste par simple approbation
de la part du responsable municipal et sans passer par une commission,
histoire de rendre les formalités administratives plus souples. « Nous
aurions eu les moyens, nous aurions, nous-mêmes, construit les clôtures,
affirme, grand seigneur, le maire de la Goulette, nous l’avons fait à l’Aouina,
mais cela ne sera pas possible pour toute la zone du Lac. Nous ne disposons
que de deux maçons qui assurent tous les travaux dans une circonscription
qui s’étend à perte de vue». Ce qui est, par contre, rassurant est que la
mairie de la Goulette reçoit entre 20 et 30 demandes d’autorisations de
construire pour la zone « Les Jardins du Lac », ce qui est un bon présage.

Des meutes de chiens errants

Les zones de chantiers représentant un endroit propice pour le
développement du phénomène des chiens errants, le Lac n’a pas fait
exception, des meutes de chiens se déplacent sur tout le lotissement
trouvant dans les restes jetés dans les coins des rues, faute de bennes à
ordures, de quoi vivre peinards « Les bennes à ordures sont placées loin de
nos résidences, clame un habitant, je ne vois pas pour quelle raison je
ferais 200 ou 300 mètres pour y déposer les ordures ménagères. Je suis
conscient que la nourriture attire les chiens errants et la saleté, les
moustiques mais vous me voyez me déplacer en voiture pour chercher une benne
à ordures ?». Le comité de la mairie, élu, il n y a pas longtemps, est
conscient relativement de cette problématique, affirme le maire. « Le
problème des chiens errants ne se pose pas uniquement au niveau des Jardins
du Lac mais également à l’Aouina et la Goulette ainsi que dans le port et à
Kheireddine. Nous avons en réalité concentré nos efforts, pour lutter contre
ce phénomène, sur les zones les plus habitées, pour Les Jardins du Lac, nous
avons mis en place des programmes d’abattage des chiens errants avant
l’aïd». Quand au problème des bennes à ordure, il comprend selon le
responsable municipal deux volets : la zone résidentielle, que la
municipalité a doté de bennes à ordures « En nombre insuffisant certes, mais
vous voyez, il y’en a quelques unes qui ont carrément disparues et nous
avons dû mettre des cadenas à celles qui sont restées » Volées ? Mystère et
boule de gomme… D’autre part, explique M.Maali, et concernant la partie
industrielle, ce sont les privés qui assument la responsabilité des bennes à
ordures… ».

Pour les moustiques, il est facile à comprendre que c’est inhérent au
dépôt des ordures ménagères. La municipalité répond présente à toutes les
réclamations affirme le maire, s’il y a des réclamations, il y a réaction.
Au niveau de l’Ambassade des Etats-Unis, une équipe communale s’est rendue
plus de trois fois pour effectuer les traitements nécessaires contre les
moustiques. «Nous ne sommes pas sourds aux demandes des riverains, ils
doivent cependant comprendre que pour que tout rentre dans l’ordre, il nous
faut beaucoup plus de moyens financiers (et les 500 D de taxes municipales,
ne sont pas suffisantes) et des moyens humains et surtout du temps pour y
voir plus clair. C’est en définitive une question de patience » termine le
maire de La Goulette.

« Tout vient à point à celui qui sait attendre » dit le proverbe, la cité
du Lac pourrait peut être devenir la ville phare que l’on veut si l’on
déployait les efforts qu’il faut et l’on faisait preuve de bonne volonté de
part et d’autre. Tout d’abord, de la part des acquéreurs qui doivent
respecter les délais qui leur sont impartis pour la construction de leurs
lots et l’achèvement de leurs travaux. Et de la part des sphères de
décisions qui doivent être vigilantes et omniprésentes pour préserver les
lois et réglementations et veiller à leur respect et leur application afin
de sauvegarder le cadre de vie ambitionné. La transition vers la modernité
passe également par des choix judicieux sur le plan urbanistique, la
réalisation d’espaces résidentiels de haut standing en est un.

L’aménagement urbain dans toutes ses composantes est l’expression du
degré de civilisation d’un pays et d’une communauté quelle qu’elle soit. La
civilisation humaine se meut et évolue selon un processus de développement
graduel, civilisateur et urbanisateur. Dans ce processus, le respect des
règles en vigueur au niveau de tout projet urbanistique revêt une importance
capitale que ce soit pour les particuliers ou par les responsables. La
qualité urbanistique d’une ville, permet de mesurer le degré de raffinement
et d’évolution d’une civilisation.

Lire aussi :

– Esthétique et aménagement urbain :L’exemple de la Zone du Lac de Tunis

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collaborons avec.

– SOS Municipalités

– Hammamet en quête de silence