L’envolée du prix des céréales est dramatique pour les pays pauvres

 
 
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Une vendeuse est assise à côté de paniers de différentes céréales, le 26 mars 2008 sur un marché de Hanoi (Photo : Hoang Dinh Nam)

[11/04/2008 15:44:07] ROME (AFP) L’envolée mondiale des prix des céréales crée une situation dramatique dans de nombreux pays pauvres et un plan massif de distribution de semences et de fertilisants est indispensable à court terme pour éviter que n’éclatent des émeutes de la faim, a estimé vendredi la FAO.

“On parle beaucoup en ce moment des droits de l’homme”, a affirmé Jacques Diouf, directeur de la FAO, dans une allusion transparente à la situation au Tibet, mais “avec une vraie urgence alimentaire dans 37 pays (…) je suis surpris de ne pas être convoqué d’urgence au Conseil de Sécurité à New York tant la hausse du prix des céréales a un impact sur la sécurité des peuples et les droits de l’homme, notamment les plus pauvres”.

M. Diouf, qui dirige l’organisation depuis 1994, estime que les prix montent car l’offre de céréales dans le monde est affectée en premier lieu par le changement climatique qui empêche une hausse de la production alors que la population mondiale augmente.

Deuxième raison pour lui, le niveau des stocks de céréales est à son niveau le plus bas depuis 25 ans (405 millions de tonnes) et il devrait encore baisser de 5% en 2008.

La troisième raison de la hausse des prix est la demande croissante des deux colosses émergents que sont la Chine et l’Inde pour des produits alimentaires de qualité. En 20 ans, a souligné M. Diouf, la consommation de viande par habitant en Chine est passée de 20 à 50 kg par an alors qu’il faut 7 kilos de céréales pour produire un kilo de viande.

La vogue des bio-carburants a également un effet: 100 millions de tonnes de céréales par an sont désormais utilisées pour fabriquer de l’éthanol ou du bio-diesel. Une telle ponction invite “à étudier et peser les avantages et les inconvénients de produire de l’énergie à partir de l’agriculture”, selon M. Diouf.

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Un agriculteur en pleine récolte, le 18 juillet 2007 à Neutsch, en Allemagne (Photo : Thomas Lohnes)

Enfin, le directeur de la FAO a attribué une part de la responsabilité de la hausse des prix “à des actions spéculatives malheureusement inévitables” sur les marchés nationaux ou internationaux comme le marché des céréales de Chicago.

Ces facteurs, ajoutés à la hausse du prix du baril de pétrole et aux tarifs du fret, ont renchéri de 56% en un an la facture des pays qui doivent importer des céréales pour nourrir leur population, a calculé la FAO.

Fin mars, les prix du blé et du riz avaient doublé par rapport à ceux observés un an plus tôt.

La FAO a débloqué 17 millions de dollars pour renforcer sa structure d’aide aux pays les plus affectés mais a décidé d’alerter une nouvelle fois les 191 pays membres de l’organisation et les bailleurs de fonds internationaux pour rassembler les 1,2 à 1,7 milliard de dollars nécessaires pour mettre en oeuvre ses programmes d’urgence.

Une conférence des chefs d’Etat et de gouvernement sera organisée du 2 au 5 juin à Rome pour étudier les modalités de mise en oeuvre de ces programmes qui visent, selon M. Diouf, à permettre aux pays pauvres d’acheter des semences et des fertilisants leur permettant de revenir le plus rapidement possible à l’auto-suffisance.

L’organisation prévoit cependant que, tirée par la hausse des prix, la production mondiale de céréales et notamment du blé pourrait atteindre en 2008 le chiffre sans précédent de 2.164 millions de tonnes en hausse de 2,6 pour cent par rapport à 2007.

Si les conditions climatiques dans les mois à venir le permettent, cette hausse devrait permettre aux prix internationaux des céréales de se détendre pour la saison 2008/2009, pronostique enfin la FAO dans le rapport sur les perspectives de récolte céréalières dans le monde qu’elle a publié vendredi.

 11/04/2008 15:44:07 – © 2008 AFP