Les pharmacies françaises dans le collimateur de la Commission européenne

 
 
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Enseigne d’une pharmacie à Paris (Photo : Jacques Demarthon)

[22/03/2007 11:57:03] PARIS (AFP) Une procédure engagée contre la France par la Commission européenne concernant les règles de propriété des officines pharmaceutiques inquiète la profession, qui craint de voir la grande distribution prendre pied sur le marché des médicaments.

La Commission a adressé mercredi aux autorités françaises “une lettre de mise en demeure”, première étape d’une procédure d’infraction pouvant aboutir à une saisine de la Cour européenne de Justice.

Bruxelles entend s’attaquer aux contraintes d’actionnariat imposées par l’Etat français aux professionnels souhaitant ouvrir une officine.

La France interdit en effet qu’un même titulaire puisse posséder plus d’une pharmacie et exige que le propriétaire d’une officine soit un pharmacien, deux conditions qui empêchent la détention de pharmacies par des grands groupes de distribution.

La Commission a en revanche renoncé à attaquer Paris concernant le numerus clausus qui assure l’offre de soins dans l’hexagone, entre villes et campagnes, banlieues et centre-ville, avec une pharmacie maximum pour 2.500 ou 3.000 habitants, selon que la ville compte plus ou moins de 10.000 habitants.

L’Etat dispose désormais de deux mois pour apporter sa réponse à la Commission, avec éventuellement un délai supplémentaire.

“Si la réponse française ne satisfait pas la Commission, elle pourra inscrire à une prochaine réunion du collège infraction, pas avant cet automne, une saisine de la CJCE (Cour de justice des Communautés européennes de Luxembourg, NDLR) qui statuera sur les arguments des deux parties et dira si le régime français est conforme au droit européen”, a-t-on appris de source proche du dossier.

“A l’issue de ce jugement, qui peut prendre un an à un an et demi, la France devra appliquer la décision et, le cas échéant, mettre son droit en conformité”, a-t-on ajouté.

La procédure engagée par Bruxelles suscite l’inquiétude des syndicats et de l’Ordre des pharmaciens, qui redoutent la formation de chaînes de pharmacies comme au Canada ou aux Etats-Unis.

“La Commission a échoué dans sa tentative d’inclure les services de santé dans sa directive sur les services dite Bolkestein”, explique le président du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (Cnop), Jean Parrot, qui représente les 71.747 pharmaciens français (dont près de deux tiers de femmes).

“Depuis, elle tente de passer par des procédures juridiques, notamment contre l’Italie, l’Espagne, l’Autriche, la France et bientôt l’Allemagne, en refusant de considérer que le domaine de la santé n’est pas un élément comme les autres du système marchand”, poursuit-il.

Pour le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), Pierre Leportier, “l’Etat français doit absolument défendre les pharmacies”.

“La pharmacie est basée en France sur trois piliers: la répartition, qui permet à chacun de disposer d’une officine à moins de six minutes de chez lui et qui évite que les pharmaciens soient concentrés dans les grandes villes et au Sud comme les médecins, le monopole de compétence en matière de délivrance des médicaments et le principe de propriété, contesté par la Commission”.

“Il faut que l’Etat préserve ces trois piliers, notamment celui sur la propriété qui empêche l’entrée de la grande distribution dans le monde de la pharmacie”, fait valoir M. Leportier.

Selon lui, les principaux candidats à l’élection présidentielle interrogés à ce sujet “ont tous affirmé leur attachement à ces trois piliers”.

 22/03/2007 11:57:03 – © 2007 AFP