Les inégalités de revenus grandissent au Royaume-Uni

 
 
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Caisses d’un supermarché Tesco à Londres le 3 septembre 2006, chaîne dont le directeur général a gagné plus de 5 millions de livres, soit plus de 400 fois plus que la moyenne de ses employés (Photo : Adrian Dennis)

[03/10/2006 15:06:11] LONDRES (AFP) Les écarts de salaires se creusent au Royaume-Uni, alors que les entreprises du pays n’ont jamais été aussi rentables et que la récente hausse du Smic a déclenché une levée de boucliers parmi les chefs d’entreprises, en particulier dans la distribution.

Selon une enquête annuelle du quotidien The Guardian, publiée mardi, les revenus ont fortement augmenté en 2005 dans la finance, l’industrie pétrolière et l’immobilier, mais beaucoup moins dans la distribution, la restauration collective et les sociétés de nettoyage.

Parmi les plus grosses entreprises de la Bourse de Londres, les plus privilégiés sont les 700 employés de la société de capital-risque 3i, qui ont perçu en moyenne 174.625 livres (258.704 euros au taux de change actuel) avant impôts en 2005, soit 60% de plus qu’en 2004.

A l’opposé de l’échelle, le numéro un britannique des supermarchés, Tesco, a versé une moyenne de 11.594 livres (17.176 euros) à ses 389.000 salariés l’an dernier, soit 9% de moins qu’il y a deux ans.

Le salaire annuel médian est de 23.000 livres au Royaume-Uni.

L’étude montre que les écarts se creusent aussi entre dirigeants et employés. En moyenne, les revenus au sein des conseils d’administration ont progressé de 28% en 2005, contre une hausse de 3,7% pour les salaires moyens, qui dépasse de peu l’inflation (2,5%).

Terry Leahy, directeur général de Tesco, a gagné par exemple plus de 5 millions de livres, soit plus de 400 fois plus que la moyenne de ses employés.

Ces chiffres interviennent alors que la hausse du salaire minimum au 1er octobre, à 5,35 livres (7,93 euros) brut de l’heure contre 8,27 euros en France, a déclenché une vive protestation patronale, les syndicats réclamant de leur côté un Smic à 6 livres en 2008.

Selon la Confédération de l’industrie britannique (CBI), les entreprises, confrontées à la cherté de l’énergie et à une régulation du travail renforcée, ne pourront pas supporter une “lourde” augmentation du Smic l’an prochain. Dans la distribution, l’hôtellerie-restauration et l’agro-alimentaire, les employeurs auraient déjà du mal à payer le salaire minimum et seraient contraints de réduire les horaires de travail, voire de supprimer des postes.

Les entreprises britanniques n’ont pourtant jamais gagné autant d’argent qu’à l’heure actuelle, selon des chiffres publiés mardi par l’Office des statistiques nationales. Leur taux de rendement net a été de 14,7% au deuxième trimestre, le plus élevé depuis le début de la série statistique en 1989.

Et plusieurs économistes ont salué, mardi, la capacité des entreprises à maîtriser leurs coûts, en particulier ceux du personnel.

“Le rythme annuel de hausse des coûts unitaires de la main d’oeuvre a encore ralenti à 2% au deuxième trimestre, au plus bas depuis presque deux ans. La croissance rapide du nombre de personnes à la recherche d’un emploi, qui est d’abord la conséquence d’une forte immigration, est le facteur qui contribue le plus à contenir la hausse des fiches de paie”, a estimé Roger Bootle, du cabinet Deloitte.

La question des inégalités salariales a été posée au dernier congrès du Labour, où la ministre Harriet Harman a appelé à “mettre un terme aux bonus excessifs” de la City de Londres, tandis que le Premier ministre Tony Blair se félicitait d’avoir su marier “efficacité économique et justice sociale”.

L’Institute for Fiscal Studies, organisme de recherche indépendant de référence, avait estimé en mars, dans son rapport 2006 sur les inégalités de revenus en Grande-Bretagne, que huit années de gouvernement travailliste n’avaient permis aucun progrès dans ce domaine.

 03/10/2006 15:06:11 – © 2006 AFP