La chute des prix des vignobles bordelais attire de nouveaux acquéreurs

 
 
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Vue d’un vignoble bordelais (côteaux de Bourg) prise en septembre 1998 (Photo : Derrick Ceyrac)

[06/09/2006 06:49:17] BORDEAUX (AFP) La chute des prix du foncier viticole en Gironde, qui touche aujourd’hui quasiment toutes les appellations, fait surgir sur le marché de nouveaux acquéreurs, particuliers ou étrangers, qui ne connaissent pas forcément le milieu du vin, selon les experts.

Arjen Pen était jusqu’à l’an dernier directeur commercial de compagnies aériennes aux Pays-Bas, et à ce titre, responsable de la qualité du vin sélectionné pour la clientèle de première classe. Aujourd’hui, cet oenologue amateur a sauté le pas en devenant propriétaire d’un domaine à Fronsac.

“J’avais l’idée d’acheter un vignoble depuis un an, notamment en raison des prix bas du marché. J’espère que les prix vont ensuite remonter”, explique à l’AFP M. Pen, qui a acquis Château Richelieu, une propriété de dix hectares payée 80.000 euros l’hectare, ainsi qu’une chartreuse traditionnelle.

Il y a encore quatre ans, cet ancien cadre, qui affiche aujourd’hui une production de 80.000 bouteilles par an, aurait dû débourser pas moins de 144.000 euros l’hectare pour acquérir ce domaine, propriété du Cardinal Richelieu lui-même en 1632.

Le foncier viticole girondin a pris de plein fouet l’arrivée des vins du “Nouveau Monde” (Chili, Australie, Californie) et la zone de Fronsac a été l’une des premières à subir l’effondrement des prix, après les Côtes du bordelais et du Médoc en 2001. Ont ensuite plongé les Côtes de Bourg, Côtes de Blaye, Côtes de Castillon et les Graves.

Les satellites de Saint-Emilion et Lalande de Pomerol ont à leur tour décroché. Et aujourd’hui, pour la première fois, le prix du foncier à Saint-Emilion n’augmente plus, souligne Hervé Olivier, chef de service à la Société d’aménagement foncier et d’établissement rural d’Aquitaine (Safer).

Entre 2001 et le premier trimestre 2006, la valeur totale du foncier viticole girondin s’est dépréciée de 17%, passant de 8,2 à 6,8 milliards d’euros, indique Jacky Bonotaux, chef du service statistiques à la direction départementale de l’agriculture.

“La crise dans la viticulture a attiré nombre d’investisseurs, industriels, promoteurs immobiliers ou riches fortunes qui veulent s’acheter une part d’éternité en inscrivant leur nom sur des bouteilles”, estime Bruno Marie, négociateur chez Saint-Emilion Immobilier, une agence créée en 1989 par un viticulteur.

“Environ 60% des acheteurs de biens viticoles sont des gens qui n’ont pas d’expérience du vin”, relève M. Marie.

Selon la Safer, le profil type correspond à des Européens, en général Britanniques ou Hollandais, qui maîtrisent les questions de marketing mais pas les techniques de vinification. Ils demandent alors l’aide des meilleurs spécialistes pour gagner une réputation.

Un an après avoir changé de vie, M. Pen a vu ses bouteilles de Château Richelieu distinguées par le célèbre critique américain Robert Parker, se félicite-t-il.

Mais l’offre ne correspond pas forcément à la demande. “Beaucoup de parcelles de quelques hectares seulement sont mises en vente par des viticulteurs qui ont besoin de trésorerie et en général elles ne sont pas de la meilleure qualité, donc ça n’intéresse personne”, explique la Safer.

L’effondrement des prix a aussi épargné quelques appellations, comme les Saint-Julien, Pauillac et Margaux. Trois hectares de Pomerol se sont ainsi récemment vendus 7 millions d’euros sans difficulté, souligne Bruno Marie.

 06/09/2006 06:49:17 – © 2006 AFP