Taxis contre Uber, les raisons d’un nouvel accès de colère

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à Orly, en région parisienne, le 15 décembre 2014 (Photo : Stéphane de Sakutin)

[15/12/2014 09:45:27] Paris (AFP) Des dizaines de taxis ont lancé lundi des opérations escargot depuis les aéroports parisiens de Roissy et Orly pour protester contre la “concurrence déloyale” des véhicules avec chauffeurs Uber.

Question: Quelle est la cible de ces manifestations?

Réponse: Les taxis protestent contre la “concurrence déloyale” que leur fait selon eux subir Uber, le géant du véhicule de tourisme avec chauffeur (VTC). Ils accusent la société américaine, récemment valorisée à 40 milliards de dollars et à la conquête des marchés du monde entier, de s’affranchir impunément en France des règles encadrant le transport de voyageurs. Ces dernières ont été remises à jour via la “Loi Thévenoud” promulguée début octobre et qui sera plus contraignante pour ces sociétés de VTC à partir du 1er janvier. Elle était censée apaiser les relations tumultueuses entre les taxis et les VTC qui s’étaient traduites par de nombreux mouvements d’humeur des chauffeurs de taxi ces derniers mois.

Q: Quel a été l’élément déclencheur?

R: La décision du tribunal de commerce de Paris, publiée vendredi, de ne pas interdire “UberPOP”, l’un des services proposés par l’entreprise californienne via son application sur téléphone mobile. Au lieu de mettre en relation ses clients et des chauffeurs de VTC, UberPOP fait le lien entre des passagers et des automobilistes qui sont de simples particuliers. Ces derniers n’ont pas suivi les 250 heures de formation nécessaires pour obtenir un agrément VTC, leurs voitures ne respectent pas forcément les règles applicables aux VTC, sans parler de leur assurance. Ce sont d’ailleurs des entreprises de VTC concurrentes d’Uber qui ont lancé cette procédure au civil, des groupes de taxis s’y associant. Mais les requérants ont été déboutés par les magistrats du tribunal de commerce. Ces derniers n’ont pas contesté qu’Uber viole la loi avec UberPOP. Mais ils ont estimé qu’il leur serait impossible de se prononcer vu que les décrets d’application de la loi Thévenoud n’ont pas encore été publiés. Et le tribunal a aussi transmis à la cour de Cassation deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) soulevées par les défenseurs d’Uber, sur le fait de savoir si la loi Thévenoud respecte les principes de liberté d’entreprendre et d’égalité. Motif de colère supplémentaire pour les taxis, l’une des QPC concerne le tarif horokilométrique, prérogative historique des taxis préservée par la loi Thévenoud.

Q: Pourtant, Uber n’a-t-il pas été déjà condamné pour UberPOP?

R: En effet, au pénal. Le 16 octobre, le tribunal correctionnel de Paris, saisi par la répression des fraudes, a condamné Uber à 100.000 euros d’amende pour ce service. Mais la société américaine a fait appel et ce dernier est suspensif, ce qui veut dire qu’Uber a pu continuer à proposer UberPOP. Une décision en appel pourrait prendre entre six mois et un an, selon des avocats suivant le dossier. Pendant ce temps, les taxis redoutent de voir UberPOP, qui a déjà séduit 160.000 utilisateurs, conquérir de nouvelles parts de marché à leurs dépens, grâce en particulier à ses tarifs défiant toute concurrence. Les adversaires d’Uber au tribunal de commerce reprochaient eux aussi à la société de vouloir gagner du temps à tout prix pour essayer d’étouffer la concurrence.