Le Kazakhstan dévalue sa monnaie, la population sous le choc

[11/02/2014 12:06:39] Almaty (Kazakhstan) (AFP)

La banque centrale du Kazakhstan a procédé mardi à une forte dévaluation de la monnaie nationale, le tengué, dernière victime de la tempête sur les marché émergents, provoquant un mouvement de panique dans la population.

Plusieurs bureaux de change ont fermé par manque de devises et certains magasins d’électro-ménager, vendant des produits d’importations, ont aussi baissé le rideau temporairement le temps de se refournir en liquidités.

Le ministre de l’Economie Erbolat Dossaev a assuré que la situation se stabiliserait d’ici “quelques jours”.

La devise du pays d’Asie centrale se trouve sous forte pression en raison de l’évolution de la politique monétaire des Etats-Unis, qui affecte les marchés émergents et notamment la Russie voisine, l’un de ses principaux partenaires commerciaux.

Jusqu’à présent, la banque centrale intervenait pour soutenir le tengué à son niveau officiel.

“La Banque nationale du Kazakhstan a décidé de renoncer à partir du 11 février à soutenir le cours du tengué à son niveau précédent, de réduire les volumes de ses interventions en devises et de diminuer son niveau d’intervention dans le processus de formation du cours du tengué”, a indiqué l’institution dans un communiqué.

Alors que la monnaie évoluait dans une fourchette de 145 à 155 tengués pour un dollar, son nouveau cours sera de 185 tengués pour un dollar avec une oscillation possible de plus ou moins trois tengués.

Cela équivaut à une appréciation de 19% du dollar par rapport au tengué et à une dévaluation de 16% du tengué.

La banque centrale du Kazakhstan explique notamment sa décision par la réduction du soutien de la Réserve fédérale américaine (Fed) à l’économie. Les investisseurs se préparant à une hausse des taux aux Etats-Unis rapatrient leurs capitaux des économies émergentes, ce qui pèse sur la monnaie des pays émergents et accroît “la volatilité sur les marchés financiers”, indique-t-elle.

Ce phénomène, ajouté aux difficultés économiques ou crises politiques qui touchent certains pays, a déjà entraîné un plongeon de monnaies émergentes en Inde, Turquie ou Russie.

Depuis plusieurs semaines, l’Argentine laisse également son peso se déprécier face au dollar. L’Ukraine, qui a dépensé des milliards de dollars depuis un an pour maintenir à flot la hryvnia, a annoncé la semaine dernière qu’elle fixerait désormais le taux officiel en fonction du taux réel sur le marché interbancaire, tout en imposant des restrictions sur les achats de devises.

Réaction à la situation en Russie

La banque centrale invoque en outre la dépréciation du rouble, qui a perdu 7,1% de sa valeur en 2013. La monnaie russe, aussi affectée par la politique de la Fed, a accentué son déclin en ce début d’année.

Or Russie et Kazakhstan (ancienne république soviétique) sont liés dans une zone de libre-échange et l’économie kazakhe et son commerce sont très exposés aux fluctuations du rouble.

La banque centrale a ainsi souligné vouloir soutenir ses exportations alors qu’à l’inverse ses importations ont eu tendance à augmenter récemment.

“La correction des cours mènera à une amélioration de la compétitivité des produits nationaux, ainsi que des entreprises exportatrices et des branches permettant de réduire les importations”, a-telle souligné.

Elle a dit vouloir par ailleurs réduire son inflation, ce qui nécessite de renoncer à une stricte régulation du cours du tengué.

“La dévaluation actuelle du tengué montre une fois de plus que l’économie du Kazakhstan et les décisions de son gouvernement dépendent beaucoup de facteurs extérieurs, soit des prix des matières premières, soit de la situation chez la Russie voisine”, a commenté pour l’AFP l’analyste Dossym Satpaïev, pour qui cette décision est essentiellement une “réaction à la situation économique en Russie”.

Le Kazakhstan, ex-république soviétique d’Asie centrale riche en hydrocarbures, avait déjà en 2009 dévalué le tengué de 20% environ face au dollar, sa devise de référence, en raison de la crise financière mondiale qui l’avait durement touchée et de la chute des prix du pétrole.