Le télétravail salarié : débuts timides, mais des perspectives grâce à la crise

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ée travaille à son domicile, le 9 janvier 2009 (Photo : Marcel Mochet)

[13/08/2009 06:54:36] PARIS (AFP) Le télétravail salarié peine à trouver sa place au sein des entreprises françaises, encore rétives à laisser leur personnel travailler chez lui, même si à la lumière de la crise et des menaces de grippe A, ce mode d’organisation devient plus séduisant.

La France compte 7% de télétravailleurs pour une moyenne européenne “autour de 15%”, selon Laurent Wauquiez (Emploi).

Mais selon l’Insee, “22% des entreprises disposant d?un ordinateur y ont eu recours en janvier 2008”, comme Renault, Alcatel-Lucent France, la Caisse régionale d’assurance maladie du Haut-Rhin ou plus récemment France Télécom.

Chez Renault, depuis 2007 les volontaires peuvent travailler chez eux 2 à 4 jours par semaine, avec un jour minimum dans l’entreprise, pour “garder un lien”.

Au printemps, le groupe a dépassé les “300 télétravailleurs”, une “minorité” dans “une entreprise dont ce n’est pas la tradition”, reconnaît cependant un porte-parole.

La satisfaction est pourtant grande, selon une enquête de 2008. “Ils gèrent leur temps comme bon leur semble, et réduisent leur problème de transport et de garde d’enfants”, confirme Frédéric Joux (CFDT Renault).

Chez Alcatel-Lucent France, depuis 2008, près de 1.400 salariés sur 7.000 télétravaillent, en moyenne un jour par semaine, selon le DRH Didier Baichère.

Au final, “à peine une dizaine” d’entre eux ont “réintégré les bureaux faute d’avoir pu s’adapter”.

“En télétravail, le lien social est réduit à la portion congrue”, admet Gwénaël Barroux, télétravailleur bordelais d’un bureau d’étude en environnement de Clichy (Hauts-de-Seine). S’il apprécie son autonomie, il se sent “un peu loin de la vie de l’entreprise” et du “centre décisionnel”.

Pour Arnaud B., salarié bordelais d’une société d’ingénierie informatique, qui privilégie sa “qualité de vie”, le télétravail lui a évité une mutation à Paris. Cela lui “permet de voir les choses avec du recul”, même s’il aurait gagné 20 à 30% de plus dans la capitale.

Mais avec son poste “un peu politique”, “il faut être réactif, avoir des appuis proches qui nous donnent l’information en temps réel” et “montrer qu’on est en train de faire quelque chose”, explique-t-il.

Selon lui, les entreprises ont tardé à se lancer dans le télétravail à cause “des managers qui aiment bien affirmer leur pouvoir par une +prise en main physique+”, mais avec la crise, optimisation des coûts et réduction des frais immobiliers les poussent plus vers cette option.

Même constat pour Gérard Vallet, président de l?Association Nationale pour le Développement du Télétravail (ANDT) qui reçoit “beaucoup d’appels, notamment pour apprendre aux managers à gérer les salariés qui ne sont pas devant eux”.

“Aujourd’hui tout se mesure en économie-carbonne, les entreprises veulent éviter” les déplacements, et pour garder “les meilleurs éléments”, tout est fait pour leur faciliter la vie, analyse-t-il.

Des entreprises prévoient aussi de développer le télétravail en cas de pandémie de grippe A. “Mais ça ne s’improvise pas”, avertit-il.

L’Assemblée a adopté début juin un texte favorisant le télétravail, mais un amendement de Frédéric Lefebvre (UMP), proposant de l’autoriser en congé-maladie ou maternité, a été retiré, après un tollé.

Reste à vaincre les réticences de salariés craignant de ne pouvoir séparer vies privée et professionnelle. “C’est une +laisse électronique+”, lâche Joseph Thouvenel (CFTC) qui évoque aussi les problèmes de responsabilité notamment en cas d’accidents: “Je tombe dans l’escalier qui mène à mon ordinateur chez moi, c’est un accident du travail ?”.