L’Opep préfère voir les cours du pétrole remonter graduellement

[16/03/2009 14:57:35] VIENNE (AFP)

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éunion des ministres des pays de l’Opep, le 15 mars 2009 à Vienne (Photo : Samuel Kubani)

L’Opep, en maintenant sa production à l’identique, a préféré voir les cours du pétrole remonter graduellement, prenant en compte les risques sur la demande, tout en courant le risque d’être sanctionnée par le marché, estiment les analystes lundi.

L’Organisation des pays exportateurs de pétrole a décidé dimanche, lors de sa réunion ministérielle, de maintenir à 24,84 millions de barils par jour (mbj) son plafond de production (pour 11 de ses 12 membres soumis au système de quotas, en excluant l’Irak) et annoncé qu’elle se réunirait le 28 mai à Vienne, après le G20 du 2 avril à Londres.

Elle a appelé ses membres à respecter à 100% les baisses de production antérieures, qui n’ont été appliquées qu’à 80%. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), le cartel produit 800.000 barils de plus que son objectif.

“A long terme, l’Opep veut des prix plus élevés. Mais elle va se montrer patiente et attendre que les conditions économiques soient plus favorables avant de prendre des mesures plus fortes”, a analysé David Kirsch, du cabinet PFC Energy.

Le prix “idéal” du baril de pétrole se situe “entre 60 et 75 dollars”, a estimé lundi le ministre saoudien du Pétrole, Ali al-Nouaïmi, en marge d’une conférence internationale sur l’énergie à Genève.

Les marchés, qui tablaient sur une baisse de production, ont réagi par une recul modéré à la décision de l’Opep. Vers 11H00 GMT, le baril s’échangeait à 44,36 dollars à Londres en baisse de 1,95 dollar.

Le secrétaire général de l’Opep, le Libyen Abdallah El-Badri, ne s’en est pas inquiété, jugeant “très normal” ce mouvement de prix.

“Le dilemme était de ne rien faire et de risquer un effondrement des prix, ou de faire quelque chose et d’augmenter les chances d’être critiqués pour cela, ce qui aurait été plus dommageable pour la crédibilité de l’Opep”, a résumé l’analyste indépendant John Hall.

En choisissant d’ignorer les attentes du marché, l’Opep a joué le long terme: elle s’est donnée le temps de voir les précédentes baisses de production porter leurs fruits.

“L’Opep fait bien attention de ne pas tuer la poule aux oeufs d’or”, a ainsi observé Dave Evans, de BetOnMarkets.

Les experts doutent toutefois que l’Opep parvienne à respecter à 100% ses quotas de production, comme elle s’y est engagée, sachant qu’un respect à 80% de ses décisions est déjà une performance historique pour le cartel.

“Honnêtement je ne sais pas comment certains vont faire, le Nigéria, par exemple, et les Saoudiens ne prendront pas sur eux d’assumer toute la baisse”, soulignait ainsi Andrey Kryuchenkov de VTB Capital.

“Un respect des quotas à 93, 94 ou 95% serait un succès”, concédait le secrétaire général du cartel, admettant que, “techniquement”, il était impossible d’adhérer à 100% à l’objectif de production.

Plus confiant, Torbjørn Kjus, analyste chez DnB Nor Markets, estime que “des pays comme l’Iran et l’Angola n’arriveront à respecter qu’aux deux-tiers les baisses de production qu’ils doivent appliquer mais que l’Arabie saoudite compensera”.

De fait, l’Arabie saoudite, premier exportateur du groupe, a donné l’exemple et fait même du zèle: elle produit moins que son quota de production, fixé à 8,05 mbj.

En termes d’image, la décision de l’Opep ne peut toutefois qu’être payante: “Alors que la récession frapppe durement, le cartel ne voudrait pas être vu comme celui qui alimente la récession avec des prix du pétrole encore plus élevés”, notait ainsi John Hall.

C’est une décision “sensée vu les pressions auxquelles fait face l’économie mondiale et que l’Opep a prises en considération”, a indiqué à l’AFP David Fyfe, analyste en chef de l’AIE.